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Immigration : entre le contrôle efficace, la décentralisation et le partenariat avec les entreprises privées

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Lorsque je suis arrivé de Roumanie en France au début des années 1990 à la chute du communisme, j’étais encore étudiant et j’avais le droit de m’inscrire dans une université française. Néanmoins, cette possibilité était assortie de nombreuses contraintes.

Si l’on n’avait pas de bourse, il fallait prouver avoir les moyens financiers pour pouvoir faire ses études en France. Sinon, aucun permis de séjour n’était accordé. A l’époque, il s’agissait d’une carte de séjour temporaire qui pouvait éventuellement se transformer en une carte de résident. Trouver quelqu’un (un Français) pour être pris en charge financièrement n’était pas chose aisée et nombre de jeunes Roumains de talent, malgré leur amour pour la France, ont préféré d’autres pays plus accueillants pour y faire des études, comme l’Allemagne, l’Angleterre, le Canada ou les Etats-Unis. Une fois le fameux sésame obtenu, il fallait le renouveler tous les ans, en étant obligé de montrer la même paperasse à la préfecture. Pour les fonctionnaires, il n’y avait d’ailleurs aucune différence entre l’étudiant non-boursier, fût-il inscrit dans une grande école, et l’immigré classique, même ayant un casier judiciaire. Il était même plus facile pour ce dernier d’obtenir un permis temporaire de travail que pour l’étudiant que j’étais. Faut-il rajouter l’humiliation subie par les membres de la famille invités en France ? Sans une lettre d’hébergement, pas d’autorisation d’entrée (visa) sur le territoire. Rappelons que mon pays d’origine est européen, son seul tort étant celui d’avoir été occupé par les Soviétiques et d’avoir connu presque 45 ans de communisme.

Une situation inquiétante qui semble dépasser les autorités publiques

Cette situation représente en gros le problème de l’immigration en France. D’un côté, une vague d’immigrés qui échappent aux contrôles et réussissent à s’installer, de l’autre, des personnes désireuses de respecter la loi pour vivre dignement dans ce pays et qui ont souvent du mal à le faire. Un rapport de la Cour des comptes d’octobre 2015 montre d’ailleurs que 96 % des immigrés dont le dossier n’a pas été accepté, ne repartent jamais et deviennent donc illégaux. Et en 2017, il y a eu 5 fois plus de demandeurs qu’en 1997 (100 000 contre 20 000 environ). Quant à l’immigration régulière, elle bat tous les records en 2017 avec 262 000 étrangers supplémentaires contre 125 000 en 1995.

L’Etat arrive-t-il encore à contrôler l’immigration ? On peut en douter, vu les statistiques. Les populations se montrent de plus en plus mécontentes. Malgré la victoire d’E. Macron aux dernières élections, le vote en faveur de Marine Le Pen a battu des records. Au Royaume-Uni, la raison principale du Brexit est l’immigration. Aux Pays-Bas et en Autriche, les électeurs ont massivement voté en faveur des partis qui ont promis des mesures contre l’immigration. En Allemagne, il y a une forte percée anti-immigration qui a empêché A. Merkel d’avoir la majorité. Aux Etats-Unis, le président Trump a promis la construction d’un mur tout au long de la frontière avec le Mexique que 25.000 personnes franchissent par jour ! Et même des pays comme la Hongrie, la Pologne et la Roumanie, où il n’y a pas d’immigrés, se montrent à l’avant-garde de la lutte contre l’immigration. Face à cette situation inquiétante pour le fonctionnement de nos démocraties, comment agir ? Il est totalement utopique de fermer les frontières et la libre circulation des personnes est l’un des piliers de la construction européenne. Que faire ?

En finir avec l’Etat providence et effectuer un contrôle efficace de l’immigration

Selon un rapport (décembre 2017) de l’organisation Open Europe, 56 % des Britanniques souhaitent une immigration contrôlée et seulement 36 % plaident pour moins d’immigration. Faire un tri efficace parmi les demandeurs serait déjà un pas en avant. Il existe de nombreux cas de réfugiés dus à la guerre et aux différentes catastrophes provoquées par l’homme ou par la nature. Accueillir des réfugiés dans ces cas-là relève de l’action humanitaire mais à condition de vérifier le bien-fondé des demandes et de prévoir, si possible, un retour après l’amélioration des conditions de vie dans le pays d’origine.

L’immigration en provenance de pays plus pauvres est dans la nature humaine. Qui ne chercherait à améliorer sa situation matérielle en allant s’installer dans des endroits plus propices ? Il s’agit d’immigrés qui cherchent à travailler et gagner de l’argent, pas nécessairement pour rester dans le pays d’accueil. Très nombreux sont ceux qui préfèrent rentrer ou laisser leur famille dans le pays d’origine et lui envoyer de l’argent. Une véritable manne financière pour ces pays. Les travailleurs immigrés sont à l’opposé de ceux qui veulent profiter de l’Etat providence. Mettre fin à ce dernier et réaliser un contrôle strict de l’immigration pourrait résoudre déjà une partie des problèmes.

Mettre en place un système par points, décentralisé et en collaboration avec les entreprises

Fin avril 2017, le département américain de l’Intérieur a introduit le State-Sponsored Visa Pilot Program (S. 1040) qui donne aux états américains plus de pouvoirs concernant l’immigration. Ce programme leur permet non seulement de « choisir » les immigrés mais aussi de les « prendre en charge » en fonction de leurs besoins. Les ouvriers, les investisseurs et les entrepreneurs sont concernés par ces dispositions. Il est clairement précisé que les travailleurs immigrés sont acceptés « to perform services, provide capital investment, direct the operations of an enterprise, or otherwise contribute to the economic development agenda of the State » (« l’immigré devra fournir des services, fournir des investissements en capital, diriger une entreprise ou contribuer au programme de développement économique de l’état »). Le programme concerne déjà plus de 500 000 personnes et les états sont libres d’y adhérer.

On sait que les immigrés représentent environ 27 % des entrepreneurs aux Etats-Unis. Par rapport à la population totale, ils sont deux fois plus nombreux à se lancer dans la création d’entreprises. Les Hispaniques sont les plus actifs, eux dont l’activité entrepreneuriale n’a pas cessé malgré la crise. A cet égard, les états où la création d’entreprises est la plus forte sont le Nouveau Mexique et le Texas.

La méthode américaine s’inspire en très grande partie des programmes canadiens et australiens d’immigration. Au Canada, ce sont les provinces qui choisissent les immigrés en fonction de nombreux critères parmi lesquels le besoin de main d’œuvre. Et ce sont les provinces qui décident si les immigrés peuvent ou non rester sur le territoire canadien.

En Australie, il existe un système d’immigration par points (il en faut 60) en fonction des besoins en main d’œuvre. C’est la qualification du demandeur qui détermine ses chances d’obtenir l’asile ainsi que les choix des entreprises qui ont la possibilité d’ « acheter » des quotas d’immigrés selon leurs besoins. Les demandeurs sont déjà divisés en deux catégories : ceux qui ont entre 25 et 32 ans reçoivent d’office 30 points, ceux qui ont moins de 50 ans n’ont droit à aucun point. Ensuite, les points s’additionnent en fonction des qualifications et des connaissances des demandeurs. Il faut déjà maîtriser l’anglais et les qualifications sont choisies selon les demandes sur le marché du travail. Mais avoir un doctorat représente 20 points acquis. Cela fait plus de 15 ans que l’Australie a mis en place ce système d’immigration (il existe aussi un, à caractère humanitaire, pour les réfugiés) et, tous les ans, environ 70 % des nouveaux immigrés ont d’importantes qualifications. L’attribution des points se fait grâce à un partenariat entre le gouvernement et les entreprises privées à la recherche de main d’œuvre.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’immigration est vue de manière beaucoup plus positive dans ces pays qu’en France. Selon un sondage Ipsos (juillet 2017), 38 % des Australiens et des Canadiens ont une opinion positive de l’immigration, 35 % des Américains aussi mais seulement 14 % des Français et 18% des Allemands.

Il est complètement illusoire de mettre en place une immigration zéro. Ce serait d’ailleurs extrêmement contre-productif. Mais la France pourrait réformer dans ce domaine en s’inspirant des exemples qui fonctionnent. Il faut en finir avec les avantages de l’Etat providence, instaurer un contrôle efficace, décentraliser comme aux Etats-Unis et au Canada (pourquoi les régions ne seraient-elles pas responsables de l’immigration ?) et associer pleinement les entreprises à la politique d’immigration. Il serait également souhaitable que les dossiers des immigrés soient traités dans des délais courts de façon à ce que très vite ceux qui ne peuvent pas rester soient renvoyés et que les autres soient autorisés à travailler. Bien entendu, tout immigré est censé respecter les lois et la culture du pays d’accueil. Cela va de soi.

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3 commentaires

jackylain 30 janvier 2018 - 10:51

immigration
ce que vous nous dîtes là existait déjà dans les années 65/70 j'ai voulu partir travailler en Afrique du sud pour avoir un visa il fallait parler l'anglais justifier un certificat d'embauche et une adresse de résidence alors vous voyer que ce n'est pas des idées du 21eme siecle

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J. Perks 4 février 2018 - 4:13

N. Lecaussin ne dit pas que ces propositions sont nouvelles, mais qu'il serait bon de les appliquer en France.

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populo 30 janvier 2018 - 11:14

Immigration du Travail ou immigration humanitaire ?
La grande différence entre l'Europe et les pays anglo-saxons hors Europe réside dans leur système de droits. En Europe nous avons la Convention CEDH de 1950. Elle offre la libre circulation, l'accès au droit d'asile universel, l'accès aux "droits sociaux" au même titre que les nationaux. Ce sont autant de droits-créances justement dénoncés par le Pr JL Harouel. Cette injonction d'indifférenciation atteint les Communautés nationales en mettant à charge des ayants-droits sociaux étrangers, et en obligeant la Nation à les intégrer de plein-droit à elle.

En l'état du Droit européen et français, les freins à une immigration du travail sont donc les droits sociaux imposés, la dilution de la citoyenneté nationale et récemment le risque sécuritaire. Rendre l'immigration du travail libre, suppose que les Etats européens et l'UE elle même, accordent à leurs peuples natifs, des garanties juridiques, politiques, culturelles et identitaires, un peu plus fiables pour leur avenir. L'Europe centrale est en avance sur ce sujet. Sans doute une mémoire plus récente des grandes invasions, dont le second siège de Vienne en 1699.

Ces garanties n'existent pas en Europe de l'ouest, et les Etats-membres ont étendu le principe d'indifférenciation à la Société civile, ses contrats et même son expression publique ou mediatique. La pénalisation de l'atteinte à l'indifférenciation s'appelle discrimination dans le droit positif.

Ainsi les peuples ouest-européens se trouvent privés d'un droit naturel, immémoriel, universel, celui de s'associer de manière privilégiée, d'avoir une préférence nationale. Les européens sont ainsi discriminés dans et par leur propres Etats !

N'est-ce pas la priorité de rendre leur liberté aux européens ?

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