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La dernière chance de Sarkozy

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Cet article de Nicolas Lecaussin, Directeur du développement de l’IREF, a été publié dans le Wall Street Journal du 30 mars sous le titre « Sarkozy’s last Chance« 

« Si l’on réfléchit aux qualités que doit réunir l’homme d’Etat en démocratie, écrit le philosophe Jean-François Revel dans L’Absolutisme inefficace (Plon, 1992), on peut en énumérer cinq : avoir des convictions de fond et une vision d’ensemble personnelle ; maîtriser la tactique politicienne, savoir convaincre l’opinion ; posséder la capacité de décision (et de décision rapide) ; avoir le courage d’appliquer ce qui a été décidé (et de l’appliquer vite). »

Les politiques français, en commençant avec le président Nicolas Sarkozy, ne réunissent aujourd’hui aucune de ces qualités. Les résultats des élections cantonales de dimanche montrent qu’ils n’ont toujours rien compris à la volonté des électeurs. L’abstention massive ou le vote en faveur de l’extrême droite ne sont pas des scénarios nouveaux. Il faut être aveugle ou avoir été la victime d’un infarctus idéologique pour ne pas réaliser qu’il existe un problème d’insécurité en France dans de nombreuses banlieues et que ce problème est étroitement lié à l’immigration. Mais, en même temps, il ne faut pas chercher les motifs de ce vote (ou de l’abstention) uniquement là. Depuis 1981, aucun parti au pouvoir en France n’a réussi à gagner les élections législatives deux fois de suite. Sauf en 2007 mais cela est arrivé sur un programme de « rupture ». Lorsque Nicolas Sarkozy a terrassé le FN en 2007, il ne l’a pas fait en menant campagne contre les étrangers. Il a réussi parce qu’il a dit haut et fort que le pays devait être réformé et qu’il fallait changer de modèle. Il avait fait campagne pour la rupture et non pas pour la continuité et il a réussi là où personne n’avait réussi depuis plus de 25 ans : permettre au parti du gouvernement de se maintenir en place après des élections présidentielles. Le message des électeurs est très clair : ils veulent des réformes. Pourtant, les politiques ne le comprennent toujours pas. Seul, Nicolas Sarkozy avait donné l’impression de l’avoir compris. Force est de constater que, après quatre années de présidence, l’envie de réformer le pays ne s’est pas toujours traduite dans les faits et que la déception est grande au sein de ses électeurs. Les réformes des institutions, des retraites, des Universités, des syndicats, du monde du travail, de l’école, de la fiscalité, de l’Etat ont été faites avec des pincettes sans jamais aller jusqu’au bout. La baisse des dépenses publiques n’a été que très partielle et, au rythme actuel, elle prendra des années pour faire baisser les déficits. Les actions de la majorité – elles ont été nombreuses – à défaut de convaincre, ont souvent créé un sentiment de confusion. D’ailleurs, à un an de la fin du mandat présidentiel, qui peut dire avec certitude, quelles sont les convictions et la vision qui guident l’hôte de l’Elysée ?

La majorité actuelle aurait pu aussi s’inspirer de ce qui s’est passé ailleurs où l’on voit que la volonté de réformer se traduit par des résultats aux élections. Margaret Thatcher et Ronald Reagan ont profondément transformé leurs pays en demandant aux électeurs beaucoup de sacrifices. La première a été réélue trois fois de suite, le deuxième a conservé son mandat en 1984 en remportant 49 Etats américains sur 50 ! Plus tard, Tony Blair, candidat de la « gauche » britannique a même approfondi les réformes thatchériennes : il fut, lui aussi, réélu trois fois de suite. Aux Pays-Bas, Ruud Lubbers, Premier ministre chrétien-démocrate, a alors procédé à de profondes coupes budgétaires, notamment dans le domaine de la santé, de l’éducation et de la protection sociale, ce qui a permis une spectaculaire réduction des déficits publics. Il a aussi privatisé les télécommunications, les postes, les chemins de fer tout en baissant les impôts. Il est resté au pouvoir de 1982 à 1994. Jean Chrétien, le Premier ministre canadien qui a baissé les budgets des ministères de 18 à 30 % et a licencié des milliers de fonctionnaires, a gagné trois élections législatives de suite entre 1993 et 2000. Pareil en Suède, pays étatisé au bord de la faillite au début des années 1980 et soumis à une cure d’austérité sans précédent et à des privatisations massives (transports, postes, télécommunications, hôpitaux…) par un Premier ministre socialiste, Ingvar Carlsson, au pouvoir entre 1986 et 1996. Ces quelques exemples démontrent qu’il ne suffit pas de faire semblant de réformer. Il faut aller jusqu’au bout et montrer une volonté politique sans faille en écoutant les électeurs. C’est la clef du succès aux élections.

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