Maître Jean Philippe Delsol, administrateur de l’IREF, observe que les collecteurs d’impôts se sont mis en campagne un peu partout dans le monde. Les « riches » sont les cibles préférées, mais rien n’empêche le fisc d’innover avec imagination (impôt sur le rouge à lèvres) et cynisme (pour lutter contre la concurrence fiscale). L’hiver sera rude.
Le temps n’avait que trop tardé : après la débâcle budgétaire, les collecteurs d’impôts se mettent enfin en campagne, à la chasse aux contribuables. Tous les gouvernements, ou presque, annoncent désormais de nouvelles taxes, complétant les bienfaits de la hausse des impositions existantes. Il faut en effet faire face au double effet de la crise qui d’une part a réduit les prélèvements fiscaux et d’autre part a poussé les gouvernements à dépenser sans compter.
La chasse fiscale est ouverte
Sous l’aiguillon de l’opposition conservatrice, l’Angleterre a été la première à frapper fort. Les travaillistes ont dû accepter de faire des coupes sombres dans les dépenses publiques, en plafonnant par exemple pendant 2 ans à 1% les hausses de salaires des fonctionnaires. Mais, comme cela ne semble pas très « social » aux yeux du gouvernement de Gordon Brown, Alistair Darling, Chancelier de l’Echiquier de Sa gracieuse Majesté, a augmenté les pensions publiques de 2,5% par an. Ces quelques changements dans la dépense publique ne suffisent sans doute pas à faire face à un déficit qui atteint 12,6% du PIB et qui risque de valoir à la Couronne une dégradation de sa notation sur les marchés financiers. De la sorte, la mesure la plus spectaculaire en Angleterre est bien le lancement de nouveaux impôts, avec notamment la fameuse surtaxe sur les bonus des traders, qui sera pour cette nouvelle année de 50% pour tout bonus supérieur à 25.000£.
L’Irlande aussi s’engage dans une politique d’économie en réduisant ses dépenses de 4 milliards d’euros, dont un milliard correspondant à des baisses de salaires des fonctionnaires de 5 à 15%, voire 20%, ministres compris. Côté revenus, elle maintient son taux d’impôt sur les sociétés au taux de 12,5% qui a fait sa fortune depuis 20 ans. Dommage sans doute pour elle de prendre une mesure en sens inverse en décidant d’imposer une nouvelle taxe de 200.000€ à ceux qui disposent d’un patrimoine de plus de 5 millions d’euros et gagnent plus d’un million d’euros au niveau mondial. Ne vont-ils pas tuer leur poule aux œufs d’or ?
En France : du rouge à lèvres à la vaccination contre la grippe
Il est vrai que les législateurs ne savent plus où trouver des recettes. La France aussi se promet désormais de taxer les bonus, mais cela ne suffira pas. Le Sénat français a voté un amendement pour instaurer une taxe sur les cosmétiques à hauteur de 0,25% du chiffre d’affaires des entreprises réalisant plus de 763 000€ de chiffre d’affaires. Cette taxe sur les rouges à lèvres doit financer un peu plus l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. L’Etat veille sur nous en matière de santé publique. Lui seul croit en être capable et c’est pourquoi lui seul se garde jalousement le droit de vacciner de la grippe. Il pense économiser ainsi l’intervention des médecins libéraux au prix épouvantable de 21 euros la consultation ! Chacun de ceux qui auront voulu se faire vacciner auront constaté l’efficacité de l’Etat en la matière. Au total, l’addition des pompiers, infirmières et autres internes réquisitionnés risque d’être autrement plus lourde. Il faudrait aussi mesurer le coût d’occupation de locaux communaux au détriment des activités habituelles et les dommages causés aux patients exposés aux risques des multiples bévues administratives.
Dans le même temps, Nicolas Sarkozy n’a pas réussi à maintenir son propre engagement de ne pas toucher au bouclier fiscal. Désormais, les dividendes seront retenus à 100% (ou peut-être 94,2% après déduction de la CSG remboursable) pour le calcul du bouclier, et il ne sera plus tenu compte de l’abattement de 40% dont bénéficiaient les contribuables jusqu’à présent au titre du paiement en amont de l’impôt sur les sociétés. De la même manière, les moins values et déficits fonciers des années antérieures imputés, selon le cas, sur les plus values ou bénéfices fonciers d’une année, ne seront plus pris en compte pour le calcul du bouclier.
Enfin et non le moindre, les gains des contrats d’assurance vie en Unités de compte ou multi supports seront désormais assujettis aux prélèvements sociaux additionnels au jour du décès du titulaire du contrat. Cette disposition vaudra non seulement pour les contrats nouveaux, mais aussi pour les contrats anciens, en violation flagrante de l’article 2 du Code civil : « la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a pas d’effet rétroactif ».
L’opacité fiscale s’épaissit
Car la loi n’est plus jamais ni simple ni claire. Et elle le sera de moins en moins. Aux Etats Unis, un amendement a été introduit à la Chambre des Représentants pour appliquer aux petites et moyennes entreprises les règles de la loi Sarbanes-Oxley dont elles étaient dispensées jusqu’à présent. Si ces dispositions sont adoptées, ce sont des milliards de coûts administratifs qui seront infligés aux PME. D’autre part, des élus américains des deux chambres ont présenté un projet de loi, Foreign Account Tax Compliance Act of 2009, une législation tendant à traquer l’évasion fiscale internationale qui ressemble à une usine à gaz pour les contribuables. La France n’est pas en reste et organise son dispositif de lutte contre les paradis fiscaux : elle établira sa propre liste noire des pays avec lesquels les transactions seront surtaxées, et elle va instituer une police fiscale disposant de pouvoirs judiciaires sur simple présomption. Les traders vont peut-être voter avec leurs pieds et avec eux de plus en plus de contribuables installeront peut-être leurs affaires ailleurs, à Hong Kong ou dans les autres centres d’activité qui vont inéluctablement émerger pour accueillir ceux qui voudront fuir cette chasse aux sorcières.
Des régions moins fiscalisées ?
Dans ce paysage assez sombre, apparaît en France une lueur d’espoir à la veille des élections régionales. Xavier Bertrand, secrétaire général de l’UMP, qui prépare les élections régionales du printemps prochain, a dénoncé la fiscalité vertigineuse des régions à gouvernement socialiste. « Dans chacune des régions que nous gagnerons, dit-il, nous prendrons l’engagement écrit de ne pas augmenter la fiscalité locale pendant six ans ». Souhaitons que cette promesse n’engage pas que ceux qui la reçoivent !
Pour la tenir, il faudra que les efforts de Monsieur Woerth pour faire des économies soient efficaces. A ce titre et à bon droit, il demande 10% de réduction des frais de fonctionnement des 600 opérateurs de l’Etat (Météo France, CNRS, Pôle Emploi…).
Dommage que Monsieur Woerth soit aussi celui qui justifie la complicité de vol par l’Etat d’informations confidentielles saisies par un employé malhonnête de HSBC en Suisse. Ce procédé est destiné à fonder sa politique de régularisation des avoirs non déclarés à l’étranger. Il aurait eu sans doute plus de succès en procédant comme en Italie, avec une taxe forfaitaire et définitive de 5%.
Je me suis laissé dire qu’en Allemagne quelque 46 millionnaires auraient adhéré à une initiative des « gens riches pour un impôt sur les riches », avec l’idée que l’argent donne des responsabilités. Libre à ces riches de payer plus d’impôts s’ils le désirent, mais pourquoi l’imposer aux autres ? Pour ma part, je crois que la vraie responsabilité des « riches » ne consiste pas à payer un supplément d’impôts, mais bien plutôt à investir efficacement. L’investissement développera beaucoup plus sûrement la richesse des nations qu’une nouvelle vague d’impôts déversée dans le tonneau des danaïdes de l’Etat.
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Que les (vrais) riches paient !
Autant il faut