Dommage de supprimer les étals des bouquinistes en bord de Seine ! Voici ce qu’on y trouve : un Henri Bosco qui va bien au-delà du banal récit descriptif, de sa célèbre communion avec la nature, de la vie simple tant prônée. Dans « Un rameau de la nuit » écrit en 1950 , l’auteur entremêle rêve et réalité , sentiment de grand vide et de plénitude, noirceur de l’Altaïr et beauté de Loselée . Et pour cause…Quand Frédéric Meyrel s’installe comme locataire à Loselée, il est frappé par l’extraordinaire immobilité du lieu abandonné par sa propriétaire Clotilde de Lutray, sans cesse en voyage. Pourquoi avec lui tout va-t-il revivre? Sa sombre découverte de l’Altaï aurait elle laissé échapper le souffle enfermé de ses naufragés, Marie-Josepha de Jésus et Bernard Dumontel ? Serait-ce celui-ci qui accaparerait son cÅ“ur et lui interdirait d’aimer Clotilde ? Livre qui paraît bien désuet et pourtant accroche le lecteur.
Même Frédéric Meyrel ne peut se détacher de tous ces villageois réticents qui passent dans sa vie comme des fantômes . De quoi le suspecteraient-ils si ce n’est de son « Ombre » qui ne lui appartient pas, mais qui le brûle et le consume? Ainsi cette  poésie en prose habitée par l’amour et le scrupule, par « les forces mal domptées de la terre », par le déchirement de  l’âme de Meyrel, est-elle le reflet même de ce courant surréaliste qui, sous une folle apparence onirique dans un monde aux confins de la réalité, laisse un message biblique : l’ultime refuge n’est autre que celui de l’innocence et, pour le trouver, il faut « ramener l’âme dans le corps » .
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