Si « la vie peut renverser les bonheurs », elle peut aussi les renforcer. C’est ce dont convainc la plume de Clara Dupont-Monod pleine de poésie et de fine psychologie. L’histoire est bien commune, celle d’une famille autour d’un petit handicapé. Le respect de l’auteure l’empêche de parler d’anomalie, sa pudeur de lui donner un prénom trop banal. Tout le long du livre ce sera « l’enfant », celui qui, parce que inadapté, a dans un premier temps brisé la joie parentale, volé l’amour et la témérité de l’aîné, suscité la révolte et la haine dans le cœur de la cadette. Ainsi les réactions qu’il engendre sont diverses, parfois même antagonistes, en tout cas très complexes et inégales.
L’auteure ne donnera pas plus de prénom au petit benjamin né bien après le décès de l’enfant. Elle le nomme « le dernier », celui qui console ses parents et sa fratrie, celui qui saura courir dans les bois, retourner les pierres et chasser les gloméris. Et si cette histoire familiale racontée avec tant de beauté n’était autre qu’un prétexte à rappeler le sacré de l’existence ? C’est le souffle de la vie qui importe, cette respiration de l’inadapté qui va donner à l’un le souci des défaillants, à l’autre l’amour de la vie, au dernier l’intuition de la présence surnaturelle de l’enfant qu’il n’a jamais connu. Avec Clara Dupont-Monod on rejoint la petite espérance de Péguy qui entraîne ses deux grandes sœurs, la foi et la charité…Car rien n’est impossible à l’écrivain : même les pierres parlent et ont un cœur! Très joli livre qui a reçu plus d’un prix littéraire.