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Julius Margolin, l’autre Soljenitsyne

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L’Archipel du Goulag est paru il y aura exactement cinquante ans le 28 décembre. L’œuvre monumentale d’Alexandre Soljenitsyne allait bouleverser tout l’Occident et faire de son auteur l’un des plus célèbres dissidents du monde totalitaire communiste. Tout le monde connaît son nom. Il y eut cependant bien d’autres victimes et témoins des camps soviétiques et nous aimerions ici rendre hommage à l’un d’entre eux, beaucoup moins connu : Julius Margolin. Né en 1900 dans une famille juive de Pinsk (Biélorussie), installé en Palestine à la fin de ses études de philosophie (1923), il se trouve à Lodz, en 1939, lorsque la Pologne est envahie. Il est arrêté par les Soviétiques et envoyé au Goulag où il restera jusqu’en 1945. De retour à Tel Aviv, il rédige son Voyage au pays des Ze-Ka (« Ze-ka » est une abréviation de l’administration pénitentiaire pour désigner les détenus) dans lequel il raconte ses années de travaux forcés. Comme l’écrit Luba Jurgenson dans la préface, « Julius Margolin vient d’ailleurs ». Son regard sur les camps soviétiques n’est pas celui d’un Russe qui connaît déjà le système totalitaire communiste. Il n’est pas préparé, il ne s’attend pas à la terrible violence des camps. Il est juste l’une des victimes du pacte germano-soviétique. Son témoignage est d’autant plus fort qu’il subit tous les mécanismes de la destruction de l’être humain, son avilissement par la machine du pouvoir soviétique. Ce qu’il découvre aussi à son retour avec un grand choc est presque aussi  important, c’est l’attitude de tous ceux – très nombreux – qui nient l’essence criminelle du régime de Moscou. Margolin sera d’ailleurs à Paris, en 1950, pour témoigner au procès de David Rousset contre Les lettres françaises. « En sortant des barbelés des camps, je me suis heurté à un deuxième mur de pierre, dressé par la lâcheté et la traîtrise », accusera-t-il, à propos de l’aveuglement des Occidentaux.

C’est un témoin clé, qui a vu l’horreur en face. « Ce livre, a-t-il dit, est avant tout écrit pour la défense de millions d’êtres enterrés vivants(…) Le gouvernement soviétique a créé dans son pays, mettant à profit des conditions spécifiques – géographiques et policières – un royaume d’esclaves derrière des barbelés, fermé au contrôle de l’opinion mondiale ». Et encore : « Il est possible, de nos jours, qu’un homme n’ayant commis aucun crime et complètement étranger à l’Union soviétique soit saisi sur un territoire étranger, et, sans jugement, dans l’anonymat le plus complet, arraché au monde pour un certain nombre d’années. On m’a condamné à l’esclavage, on m’a déporté au bout du monde, on m’a fait subir des tortures physiques et morales pendant plusieurs années alors qu’il était facile de me renvoyer dans ma patrie où m’attendaient ma maison, ma famille et mon travail… Ce que j’ai vécu en Union soviétique est un cauchemar(… )Chaque matin, à cinq heures, j’ouvre les yeux et je  connais un moment de terreur. Chaque matin, à mes oreilles, retentit la sirène de l’autre monde : Debout ! ».

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Evelyne Tschirhart 23 décembre 2023 - 9:28

Merci à Nicolas Lecaussin d’avoir rappelé le livre de Julius Margolin : « voyage au pays des ZE-Ka ». Je l’avais lu dès sa parution. C’est en effet une formidable épopée qui raconte la vie d’un homme broyé par l’histoire: en tant que Juif et en tant que victime du système totalitaire soviétique. Ce récit est d’une grande richesse. Il témoigne de la résistance humaine à la barbarie.

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