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Vers un « droit à » son animal de compagnie en EHPAD ?

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La liberté est toujours suspecte dans notre beau pays. Actuellement, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) sont libres d’accepter ou de refuser les animaux de compagnie. Aussi un amendement du député LR Philippe Juvin, par ailleurs médecin, a-t-il modifié l’article 11 de la proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie qui doit être discutée en commission mixte paritaire mi-mars. Les EHPAD devraient « garantir le droit de leurs résidents d’accueillir leur animal domestique et de prendre les dispositions nécessaires selon des modalités définies par décret en Conseil d’État ».

Les justifications du « droit à » son animal de compagnie

Au fondement de l’amendement se trouvent les louables idées, d’une part d’améliorer la santé physique et mentale des personnes âgées dépendantes, d’autre part d’éviter les abandons ou les dons de leurs animaux domestiques. Une autre justification est que les résidents devraient se sentir plus « chez eux » au sein des établissements.

L’amendement, introduit à l’Assemblée nationale, avait pourtant été supprimé lors de la lecture de la proposition de loi au Sénat, qui avait préféré laisser le choix aux établissements. D’autant plus qu’une telle obligation pouvait entraîner, pour eux comme pour leurs résidents, des conséquences dommageables (organisation lourde, développement de maladies, etc.).

L’amendement, soutenu par le gouvernement, a été rétabli et il sera examiné en commission mixte paritaire. Il faut espérer qu’il ne sera pas définitivement adopté grâce à la résistance des sénateurs.

Une proposition à rejeter

Amoureux des animaux, propriétaire de nombreux animaux de compagnie, nous ne nions pas la force de la plupart des justifications de l’amendement et cependant, quitte à choquer beaucoup de lecteurs, nous nous y opposons résolument.

En effet, s’il était adopté, il créerait un nouveau « droit opposable », en l’occurrence un « droit à » son animal de compagnie, autrement dit un « faux droit » de l’homme qui affaiblirait encore plus les « vrais droits ». Rappelons que les vrais droits constituent des oppositions aux empiètements d’autrui, État compris (par exemple, nul n’a, par principe, le droit de violer ma propriété), et non pas des droits sur autrui pour les obliger à faire telle ou telle chose à leur détriment (par exemple, je n’ai pas le « droit à » un emploi que telle entreprise devrait me donner ou que la puissance publique devrait me garantir).

Ensuite, il est permis de s’étonner que le législateur intervienne pour obliger des établissements, non seulement publics mais aussi privés, à accepter des animaux de compagnie. C’est la conséquence évidemment de l’existence de la Sécurité sociale en France. Que l’amendement considéré parte d’un bon sentiment ne fait aucun doute, mais une loi n’est pas et ne doit pas être un catalogue de bons sentiments. Elle ne doit pas non plus se substituer au libre contrat et porter atteinte à la concurrence.

Enfin, sur un plan purement utilitariste, ce court amendement au sein d’une proposition de loi informe et illisible (au moment où l’on parle une fois encore de simplification administrative et de refus de la sur-réglementation !) renvoie à des modalités d’application qui seraient prises par décret en Conseil d’État.

Traduisons : il s’agira d’une nouvelle usine à gaz, ne serait-ce que pour définir ce que sera un animal de compagnie accepté dans un EHPAD. Un dessin humoristique du Canard enchaîné (6 mars 2024) montre des infirmières avec la bulle : « Le pire, c’est les anciens agriculteurs ! » et un vieillard dans sa chambre accompagné de sa vache… A priori, on parle de chats, de chiens, d’oiseaux et de poissons, pas d’éléphants ou d’alligators. Mais s’agissant des chiens, le décret prévoira-t-il un poids maximum ? Certes, les résidents en EHPAD doivent rarement être propriétaires d’un saint-bernard ou d’un mâtin de Naples… Et qu’en sera-t-il des autres NAC (nouveaux animaux de compagnie) que les oiseaux, notamment les rongeurs ?

Comme souvent lorsqu’un parlementaire veut bien faire, on peut lui reprocher de ne pas en faire assez. Au sein de la rédaction de l’IREF, une idée lumineuse a jailli : pourquoi ne pas installer les EHPAD à la SPA ou inversement ?…

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8 commentaires

TRIPON 8 mars 2024 - 9:52

Opposition totale comme il est dit le droit d’une personne ne saurait s’imposer sur le droit de tous.

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Huret 8 mars 2024 - 10:29

Nos politiques dans leur bien-pensants démagogique oublie l’adage que « la liberté de chacun s’arrête là où commence celle des autres ». Que feront les allergiques aux poiles de différents animaux, ceux qui en ont une peure maladive, etc.? De grâce, un peu de réflexion et de bon sens!

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Caroline Muller 8 mars 2024 - 12:06

Tout à fait d’accord, les EHPADs doivent rester libres d’accueillir ou non les animaux de compagnie.

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Bonet 8 mars 2024 - 12:27

Lorsqu’on sait combien il est douloureux pour une personne âgée de quitter son domicile , c’est une souffrance intolérable de devoir laisser son petit compagnon à poils ou plumes !
Je suis donc étonnée que vous traitiez d’un revers de main un peu désinvolte une proposition profondément généreuse .. il me semble que cela mérite débat… certains établissements ouvrant deja leurs portes aux animaux de compagnie pourquoi ne pas s’appuyer sur leur expérience pour enrichir la réflexion ??

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ORILOU 8 mars 2024 - 1:01

Propriétaire de chien, chat(s) chevaux, j’avoue que cette nouvelle usine à gaz me laisse perplexe. La possibilité existe déjà sur la base du volontariat. Nos députés et sénateurs n’ont-ils rien d’autre à faire que de légiférer sur les « problèmes » de société du moment ?
Ne risque-t-on pas d’introduire des motifs de querelles au sein d’EHPAD qui n’ont vraiment pas besoin de cela ?
Le propriétaire d’un « canari ou d’une perruche » sera-t-il contraint de transformer sa chambre en bunker parce que son voisin est accompagné d’un « gros minou » ? A moins de l’enfermer, comment le propriétaire d’un chat arrivera-t-il à faire comprendre au félin que le canari du voisin n’est pas comestible ? A force de marcher sur la tête, nos dirigeants seraient-ils devenus fous ?

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Gérard koerckel 8 mars 2024 - 3:58

Ça part effectivement d’un bon sentiment, mais le coté pratique de cette évolution est loin d’être réglé, qui va sortir Mirza matin, midi et e soir? Qui va nettoyer la litière du chat, etc…… On a déjà du mal à trouver des soignants pour s’occuper correctement des résidents, comment on va faire pour trouver des soignants pour les petites bêtes à chagrin et qui va payer, et que va-t-il advenir du compagnon le jour où le maitre quitte définitivement l’EPAHD? Je ne doute pas un seul instant que le bon sens va l’emporter, mais avec la logique actuelle tout est possible, même le pire, et on trouvera un ministre qui déclarera qu’un grand pas en avant a été fait.

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agnelab 8 mars 2024 - 11:19

il faudrait que les EPAHD recrutent ; les pensionnaires sont là parce que diminués physiquement. Qui promènera le chien ? qui le lavera ? qui changera la litière du chat ? comment pourra-t-on empêcher que les voisins ne souffrent des cris divers ? Combien d’animal par chambre ? Ces députés, égaux à eux-mêmes…

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Gilles Vedun 9 mars 2024 - 5:38

Le conseil d’état aurait bien fait de se soucier de l’inconstitutionnalité de la loi sur l’avortement et par conséquent désormais de la constitution s’ils veulent garder un semblant de crédit ..

Bien à vous

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