« Si vous voulez éviter la catastrophe économique et les défaites électorales, faites comme Tony Blair ! ». C’est le conseil donné dans une Lettre au Président rédigée par Nicolas Lecaussin. Une analyse saisissante des changements introduits en Angleterre par la gauche britannique.
Monsieur le Président,
La réalité économique l’emporte sur les rêves et les promesses électorales. Le dernier Rapport de la Cour des Comptes nous le rappelle une fois de plus. Dans une économie mondialisée et une Europe en crise, la France n’a pas d’autre choix que de se réformer et s’adapter. Sinon, les conséquences seront dramatiques et les Français, comme ils en ont l’habitude, ne vous le pardonneront pas lors des échéances électorales futures.
Pour éviter ces déconvenues, il existe une solution : agir pour réformer l’économie et faire baisser le chômage. Pour cela, l’IREF vous invite à suivre l’exemple des leaders de gauche réformateurs en Europe, comme le travailliste Tony Blair, au pouvoir en Grande-Bretagne pendant 10 ans, entre 1997 et 2007. Le Parti travailliste, qui n’avait jamais pu se maintenir au pouvoir pendant deux mandats consécutifs, gagne avec Blair trois victoires successives remportées haut la main. En 1997 et 2001, les travaillistes obtiennent 63 % du total des sièges aux Communes, du jamais vu jusque-là. Le secret de ces victoires est simple : le réalisme économique et la volonté de réformer et non pas la hausse de la fiscalité ou l’intervention accrue de l’Etat.
Lorsqu’il a été élu, Tony Blair a coupé tout lien avec le passé marxisant des travaillistes. L’une de ses premières mesures est l’élimination de la clause IV de la charte du parti, portant sur les nationalisations et qui date de 1918. Tony Blair ne remet pas en cause les privatisations faites par les conservateurs et n’augmente pas les impôts. Au contraire, il adopte rapidement toute une série de mesures supplémentaires de libéralisation de l’économie (tous les secteurs seront concernés, y compris l’éducation et la justice) afin de rendre plus efficaces les services étatiques. Dans le domaine de l’Education, on demande aux écoles de faire appel au privé pour la sous-traitance, tandis que les directeurs des écoles bénéficient de la liberté de gestion et d’embauche des enseignants. Ces derniers n’ont plus de statut de fonctionnaire mais sont employés avec un contrat de droit privé. L’entreprise est invitée à s’impliquer dans le secteur éducatif et des partenariats sont conclus avec les écoles, y compris pour des financements directs : les entreprises ont la possibilité d’aider directement les écoles. Pour ce qui est de la justice, les prisons sont sous-traitées par des entreprises privées. Le mot d’ordre est la concurrence et l’évaluation permanente des services rendus par l’Etat et ses administrations. C’est pour mieux servir les clients que le service des passeports a été confié à une entreprise privée…
Dans le domaine de l’emploi, Tony Blair réforme entièrement l’assurance chômage en la rendant dépendante du retour à l’emploi du chômeur. Celui-ci est suivi pendant quatre mois par le personnel des « Job Centers » qui est rémunéré comme les commerciaux, en fonction des résultats, en l’occurrence le placement des chômeurs. Durant cette période, les chômeurs sont obligés d’accepter un travail ou une formation en échange des allocations perçues.
En avril 1999, Tony Blair a instauré un salaire minimum horaire de 3,60 £ (5,20 euros) pour les adultes. Une « révolution » dans ce pays où c’est le marché qui règne. Cette mesure nécessite quelques explications. D’abord, le montant fixé par Blair était largement en dessous du montant officieux, qui se pratiquait dans les entreprises et qui s’élevait à plus de 5 £ (7.35 euros). Ensuite, Blair n’a pas fixé un salaire minimum mais trois salaires minimums. Un pour les 16-17 ans, un autre pour les 18-21 ans et, enfin, un troisième pour les plus de 21 ans. Avec des différences qui peuvent monter jusqu’à 50 % entre le premier et le troisième. Rien à voir avec le SMIC français.
Le Premier ministre britannique est resté au pouvoir jusqu’en 2007 et a donc été réélu trois fois de suite. Au cours de ces 10 années, l’économie britannique est florissante (voir le tableau ci-joint) et connaît le plein emploi : 2,7 millions d’emplois sont créés, tandis que l’inflation est maîtrisée.
Monsieur le Président, si vous souhaitez sauver l’économie française, baisser le chômage et gagner les élections, faites comme la gauche britannique !
Nicolas Lecaussin
La Grande-Bretagne et la France entre 1997 et 2004
Croissance du PIB Chômage Dette publique (en % du PIB)
France + 20 % De 10,7 % à 8.8 % De 45 % à 68 %
Grande-Bretagne + 40 % De 8 % à 4 % De 49 % à 38 %