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Les emplois aidés deviennent des… « parcours emploi compétence »

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Jugés par le ministre lui-même coûteux et peu efficaces, les contrats aidés avaient été courageusement critiqués et leur nombre réduit. Mais par la grâce d’un rapport ministériel, établi par Jacques Borello, ils ont mué, et nouvellement baptisés « parcours emploi compétence » (PEC), ils vont maintenant sauver l’emploi en France. Le gouvernement y a ajouté quelques obligations. Encore une fois, rien n’a changé. 457 000 emplois aidés avaient été créés en 2016 pour un coût de 4,3 Mds € selon la Cour des comptes et bien peu de résultats.

Un rapport pour justifier que rien ne change

Pourquoi avoir demandé ce travail à Jean-Marc Borello ? Il est intéressant de retracer son parcours. Il a commencé sa vie politique en 1981, à 24 ans. Il était déjà chargé de la question des formations en 1984 sous le gouvernement de Laurent Fabius. C’est dire qu’il a une grande expérience de la question mais probablement peu de nouvelles idées à apporter. C’est au titre de directeur du groupe SOS qu’il a été choisi, outre le fait qu’il est membre du parti présidentiel. Ce groupe associatif comprend jusqu’à 450 structures. La page Wikipédia consacrée à Jacques Borello ne relève aucun passage dans l’activité marchande et très peu dans le privé. Dès lors, on peut s’interroger sur le bienfondé de lui confier une « mission relative à l’Innovation sociale au service de la lutte contre les exclusions du marché du travail ». Sauf à penser que le marché du travail se résume à l’emploi non marchand, le reste étant probablement malsain ou peu recommandable. De fait, le nouveau PEC est réservé aux structures non marchandes, de peur de créer des « effets d’aubaine ». On reconnait là cette permanente méfiance, presque religieuse, à l’égard du secteur privé, qui n’a d’égale que l’adoration du secteur public ou non marchand. On ne voit pas bien pourquoi les associations ne saisiraient pas non plus l’aubaine d’embaucher à moindre coût ?

Ainsi le rapport débute par un banal commentaire du « retour de la croissance » rapidement nuancé par un commentaire à la méfiance convenue : « Notre système capitaliste, dont la légitimité est de créer des richesses, ne permet pas à 10% de la population de participer à l’activité productive de notre nation ». Pourtant d’autres pays partageant le même « système capitaliste » ne pâtissent pas d’un tel taux de chômage. De plus, ceux qui ne parviennent pas à s’insérer dans « l’activité productive » ne réussiront pas mieux parce qu’on leur aura réservé des emplois dans le secteur non marchand. Mais ça, on n’en parle pas. Pourtant le retour à l’emploi à la suite des emplois aidés non marchands a été inférieur au cours de ces dernières années à celui suivant les emplois aidés en secteur marchand (41% contre 67% selon une étude de la DARES en 2014[[L’étude nuance néanmoins ces écarts par le fait que les bénéficiaires d’emplois aidés non marchands étaient à l’origine plus loin du marché du travail que les autres.]]).

Taux de chômage

Total Jeunes
Allemagne 3,60% 6,70%
Royaume-Uni 4,20% 10,90%
France 9,20% 11,80%
Moyenne UE 7,30% 11,50%
Source : Eurostat – Chômage total : nov 2017 sauf pour RU : sept 2017 et jeunes : 2016

Ces emplois aidés ne sont que des emplois précaires bon marché. La bonne nouvelle dans ce triste tableau est qu’il est prévu d’en créer moins que précédemment (200 000 en 2018 contre 310 000 l’année dernière). Pour l’heure en tout cas puisqu’on sait bien qu’en France les promesses de moindres dépenses s’évanouissent aussi vite que les promesses de faibles prélèvements.

Libérer la formation

Pourtant le rapport souligne des faits intéressants : « Subventionner un contrat quelques mois, sans organiser de formation ni d’accompagnement, revient presque à retirer d’une main ce qu’on donne de l’autre, dans une certaine forme de précarité ». Comment en vient-il alors à légitimer ces emplois aidés ? En y intégrant une exigence forte (sur le papier) de formation. C’était déjà le cas auparavant mais cette obligation était peu observée. La formation est par ailleurs un aspect très décrié en France de par son inefficacité. Aussi cette exigence de formation restera-t-elle probablement plus formelle que réelle.

Cela pose la question de la formation en France. Elle risque malheureusement de demeurer la chasse gardée des syndicats (à travers les branches) et des Régions, le meilleur gage de leur inefficacité ! Muriel Pénicaud affirmait au début de sa mission que les contrats aidés étaient « le dispositif le moins efficace de toutes les politiques de l’emploi ». Mais, largement utilisé par les associations et de nombreuses succursales publiques, il a bien fallu les réinventer.

Comme d’habitude en France, des années de politique inefficace ne prouvent pas qu’il faut changer de politique mais bien plutôt qu’il faut l’amplifier ! Après les TUC, les CES (contrats emploi/solidarité), les CEC (emploi consolidé), les CEV (emploi ville), les CA (contrats d’avenir), les EA (emplois d’avenir), et les CUI-CAE (contrats uniques d’insertion) voici donc les PEC (Parcours emplois compétences) et des promesses de lendemains qui chantent.

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Lexxis 30 janvier 2018 - 3:32

LA CULTURE DE L'ÉCHEC
Pour tous les gouvernants issus du secteur public, ce qui est utile et qui fonctionne bien est suspect, mais les voies de l'échec sont soigneusement entretenues et abondamment financées par des deniers publics. Rappelez-vous l'ineffable Hollande qui avait commencé en début de mandat à saccager l'apprentissage, avant de le relancer sous l'empire de la nécessité en fin de mandat. Pour ce qui est de la diminution des emplois aidés, il faudra voir en fin d'année, pour peu que les chiffres du chômage demeurent toujours aussi médiocres, si la tentation de les améliorer avec quelques pincées supplémentaires de parcours-emploi-compétence n'est pas trop forte.

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