La crise sanitaire bouscule le planning des arrêts pour maintenance des réacteurs nucléaires. Les travaux retardés au printemps dernier imposent des « arrêts de tranche » qui pèsent sur la production d’électricité. Y aura-t-il des coupures de courant cet hiver ?
« En janvier, le risque [de difficultés d’approvisionnement en électricité] sera de même nature que lors des dernières années [déjà placées sous vigilance]», indiquait le 19 novembre dernier RTE, le Réseau de Transport d’Électricité. Le 7 janvier, son dispositif « EcoWatt », qui a été étendu à l’échelle nationale en novembre, est passé pour la première fois en signal rouge. Pas de coupures en vue, rassurait RTE. Tout en recommandant aux Français de réduire leur consommation entre 7 et 13 heures le lendemain.
L’équilibre offre-demande mis à mal cet hiver
En cas de tension sur l’approvisionnement, notamment en cas de vague de froid, les consommateurs sont ainsi incités à adopter des « éco-gestes », tels que chauffer à un degré de moins ou retarder une lessive. Pas de « rupture d’alimentation non contrôlée » à craindre cependant sur l’ensemble du territoire. En d’autres termes, il n’y a pas de risque blackout cet hiver selon l’analyse prévisionnelle « Répercussions de la crise sanitaire sur l’approvisionnement en électricité pour l’hiver 2020-2021 » que RTE a publiée le 11 juin dernier.
Reste qu’RTE a la « possibilité d’activer de manière graduée des moyens post marché » en fonction de l’évolution de l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité. À savoir, outre les gestes citoyens, d’abord l’ « interruptibilité » de grands consommateurs industriels [[Industrie lourde grosse consommatrice]] d’énergie rémunérés. En cas de besoin, 16 sites peuvent ainsi être coupés en quelques secondes. Ensuite la « légère » baisse de la tension sur les réseaux de distribution [[Baisse de 5% qui réduit très légèrement la performance des appareils électriques.]] constitue un autre levier de pilotage de la demande. Enfin, et en dernier recours, RTE peut procéder à des « coupures d’électricité temporaires, anticipées, localisées et tournantes, préservant les consommateurs sensibles ». Il s’agirait alors de délestage. Dans ce cas, « risques » et « suppositions » sont pointés dans les jours précédents. L’information est donnée la veille. Et à 18 heures 30 à J-1, les départements et rues concernés sont connus pour les foyers et PME clients du réseau de distribution.
Des « arrêts de tranche » qui se téléscopent
En février et début mars, le risque de tension sur les approvisionnements sera « plus important que les années précédentes », prévenait RTE le 19 novembre. La raison ? Fin février, 13 réacteurs seront à l’arrêt à la suite du report des programmes de maintenance des réacteurs nucléaires depuis le début de la crise sanitaire. Ces arrêts programmés permettent de recharger les centrales en combustible et/ou d’effectuer certaines opérations de maintenance et les visites décennales [[Visite décennale : arrêt de tranche (arrêt de la production pour changer une partie du combustible nucléaire) particulier effectué tous les dix ans, durant lequel des essais et tests spécifiques de grande ampleur sont réalisés sous le contrôle stricte de l’Autorité de sûreté nucléaire (Source : L’Energeek)]] ou périodiques.
Dans son analyse probabiliste de juin dernier, le transporteur d’énergie précisait en outre que les protocoles sanitaires conduisaient à augmenter la durée prévisionnelle des arrêts pour tous les réacteurs. À minima pendant l’année 2020. Dans cette étude préliminaire, RTE concluait ainsi à « une disponibilité du parc nucléaire historiquement faible à partir de cet été et jusqu’à l’hiver prochain au moins ».
Lors du premier confinement, « la difficulté (…) à intervenir et à mobiliser les prestataires » a en effet rendu les arrêts de tranche pour maintenance beaucoup plus longs que prévu indiquait déjà en avril Bernard Doroszczuk, président de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), devant la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat. Selon l’ASN, toujours en avril dernier, le décalage dans le planning de maintenance des centrales nucléaires peut faire sentir ses effets sur l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité, non seulement cet hiver mais également à l’hiver 2022. De plus, 75 % des réacteurs du parc nucléaire en exploitation d’EDF ont été construits entre 1980 et 1990, selon l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), ce qui accentue le besoin en maintenance.
Un planning de maintenance réactualisé
EDF a confirmé dans un communiqué du 4 janvier un niveau de production d’origine nucléaire en France très légèrement supérieur à 335 TWh en 2020. Le 16 avril, son estimation avait été revue à la baisse à 300 TWh, et comprise entre 330 et 360 chaque année en 2021 et en 2022, contre une cible de 375 à 390 TWh avant la crise Covid. Le groupe a alors commencé à revoir son programme de maintenance. Selon RTE, l’arrêt préventif de certains réacteurs durant l’été a été décidé afin d’économiser du combustible et de maximiser la disponibilité du parc de production durant la saison froide.
À l’automne, EDF a ensuite « régulièrement actualisé son planning de maintenance des centrales nucléaires et revu à la baisse la durée prévisionnelle de certains arrêts », précise encore RTE dans son « Analyse du Passage de l’hiver 2020-2021 » publiée en novembre. Toute la séquence des arrêts obligatoires de réacteurs nucléaires a ainsi été réorganisée. Mais les effets du ralentissement économique ne compensent pas le pic de consommation lié au chauffage par temps anormalement froid.
Fermetures de centrales en perspective
Quelles sont les perspectives d’approvisionnement à plus longue échéance ? Dans son prochain « Bilan prévisionnel à dix ans », RTE intégrera la mise en œuvre des programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE). Après Fessenheim cette année, la fermeture de 4 à 6 réacteurs nucléaires est prévue d’ici 2028. Et 14 autres d’ici 2035… Est-ce vraiment nécessaire de fermer ces centrales qui de l’avis des autorités en la matière pourraient rester en service encore pendant de longues années ? Ces décisions de fermeture prématurée purement idéologiques risquent de peser lourdement sur l’économie française autant que sur le confort des Français.
RTE : Réseau de Transport d’Électricité, Gestionnaire du réseau de transport d’électricité haute tension
Délestage : coupures d’électricité d’une durée maximale continue actuellement fixée à 2 heures. La procédure en est commandée par RTE et réalisée en lien avec les distributeurs concernés et les autorités préfectorales.
Sources :
https://www.rte-france.com/actualites/approvisionnement-electrique-vigilance-particuliere-pour-lhiver-2020-2021
https://www.rte-france.com/actualites/rte-incite-les-francais-reduire-leur-consommation-delectricite-le-8-janvier-2021
https://www.rte-france.com/actualites/ecowatt-devient-national-decouvrez-le-nouveau-site
https://www.monecowatt.fr/
https://www.rte-france.com/actualites/point-sur-la-securite-dapprovisionnement-en-electricite-des-francais
https://www.lefigaro.fr/flash-eco/nucleaire-un-nouveau-planning-des-arrets-pour-maintenance-envisage-asn-20200428
https://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations_nucleaires/Les-centrales-nucleaires/visites-decennales/Pages/2-Le-calendrier-des-visites-decennales.aspx#.X_gRuBbjJPY
https://assets.rte-france.com/prod/public/2020-09/Impacts-crise-sanitaire-COVID-19-systeme-electrique.pdf
https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/journalistes/tous-les-communiques-de-presse/production-d-origine-nucleaire-du-groupe-edf-en-france-en-2020
https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/journalistes/tous-les-communiques-de-presse/edf-revise-son-estimation-annuelle-de-production-d-electricite-nucleaire
https://assets.rte-france.com
https://www.ecologie.gouv.fr
2 commentaires
Réduction de la consommation d'Electricité
Le problème de fond consisterait à enfin encourager les consommateurs à réduire leur consommation électrique.
Si on exclue les cas de chauffage électrique qui peut être piloté intelligemment, les particuliers ne sont pas vraiment acteurs, ce sont les industries comme les fonderies travaillant en continu, un train de laminoirs ne s'arrête pas pour quelques heures! (aluminium, etc…) qui permettraient de mieux réduire la consommation générale, de même pour les usines de production qui doivent rénover et utiliser du matériel moins gourmand et plus performant. Mais il a y a du souci à se faire si la 5G se généralise à l'ensemble des particuliers, ça va faire exploser la consommation en créant des (faux) besoins qui n'existaient pas avant!
Faudrait réserver cette technologie uniquement aux applications professionnelles où elle apporte un véritable PLUS (télé-médecine, etc…)
Comme pour les téléviseurs, il faudrait imposer au fabricants des "box internet", même avec la fibre, d'avoir une consommation minimale en veille, les processeurs actuels sont très peu gourmands en veille permettant une attente sans énergie, avec un maintien nécessitant juste une petite pile ou un super condensateur. Leur "réveil" lors d'un appel téléphonique par exemple, ne prendrait que quelques millisecondes voir quelques secondes maximum pour charger tout un OS.
PhB
consommation & augmentation tarif EDF
Comment la France pourrait subvenir au surcroît du besoin en énergie électrique avec les voitures électrique qui nécessite 3 fois plus d'énergie que ce qui est consommé actuellement ???
Augmentation des tarifs liés au non payés des entreprises : Est ce légal. Si je ne paye pas , les autre abonnés vont-ils payer pour moi ??