Avec la crise économique et sanitaire, les discussions au sein de l’UE sont tendues. La France se trouve dans une situation de faiblesse économique qui malheureusement ne date pas des problèmes de ces derniers mois. En effet, une analyse de la situation commerciale au sein de l’UE pré-COVID montre que la France possède un retard dans ce domaine. Une situation qui s’avère handicapante dans les discussions de nature économique au niveau européen. L’UE reposant, à la base, sur le marché commun. Et ce compte tenu de la volonté de Paris de redevenir une puissance dominante dans la construction de l’UE et qui souhaite que l’Europe rapatrie sa production industrielle.
Un poids commercial français timide face au géant allemand au sein du marché commun européen
Les données de l’ Observatory of Economic Complexity montrent les échanges commerciaux entre les différents pays et permettent de voir la part qu’occupent respectivement l’Allemagne et la France dans leurs exportations et importations.
On constate que l’Allemagne possède dans tous les pays (à l’exception de l’Espagne pour ses exportations) un poids plus important dans leur commerce que la France. Cette différence étant parfois de l’ordre du quintuple. Une analyse plus détaillée des données démontre aussi que l’Allemagne est pour la quasi-totalité des pays européen leur premier partenaire européen voire mondial.
Inversement, la France tend à se retrouver en troisième position en tant que pays d’importation ou d’exportation pour de nombreux pays. Elle se trouve parfois après les échanges commerciaux entre les pays d’une même zone. Par exemple, les pays du groupe de Visegrad commercent d’abord avec l’Allemagne, puis entre eux et puis enfin avec la France. Même phénomène avec le Benelux ou les pays Scandinaves.
Approche Bottom-up allemande contre le top-down français
Cette domination allemande en matière de commerce international peut s’expliquer par la plus grande importance de l’industrie dans son économie : « 23,4 pour cent était en 2017 la participation de l’industrie manufacturière à la valeur ajoutée brute en Allemagne. Par comparaison, le pourcentage était de 12,7 en France. » Cette situation est liée à son approche en matière d’économie et plus généralement de sa politique internationale. L’Allemagne suit une approche basée sur la société civile où l’Etat a un rôle minimal et doit se borner à faire appliquer le respect de la concurrence équitable. En France l’Etat a un rôle central qui le pousse à diriger l’Industrie et y mêler de la politique qui peut rapidement être néfaste à l’économie: le cas du rejet progressif du nucléaire qui était un atout stratégique de la France en est l’exemple.
Ainsi, si la France tend à remporter des contrats prestigieux dans certains domaines comme l’armement ou le nucléaire (avec la réserve indiquée ci-dessus), les entreprises allemandes remportent les contrats « ordinaires » qui constituent le cœur des exportations. L’Allemagne a ainsi su créer des conditions favorables au développement de son industrie là où l’approche dirigiste de la France a restreint ses capacités.
Un retard handicapant la France dans les négociations européennes
Avec une telle situation, on comprend que c’est l’Allemagne qui a le plus d’importance dans les discussions économiques européennes. Le fait que le Frugal Four (Autriche, Pays-Bas, Danemark et Suède) et le groupe de Visegrad soient peu réceptifs aux demandes du président Macron est en partie lié au fait que ces pays restent beaucoup plus liés à l’Allemagne et à son économie.
Enfin, si l’Allemagne est le premier partenaire économique de la France (13,9% des exportations et 18,3% des importations), l’inverse n’est pas vrai. Le principal pays des exportations allemandes sont les Etats-Unis ; de même les Pays-Bas (suivis de la Chine) sont la première source des importations de l’Allemagne. Une situation qui explique pourquoi l’Allemagne reste frileuse à l’idée d’Europe souveraine défendue par le gouvernement français.