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Réformes structurelles : l’exception française

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Baisse des dépenses publiques, diminution du nombre de fonctionnaires, réduction des impôts : tous les pays ont réagi à la crise de façon salutaire. Bien souvent ce sont les plus touchés qui ont réalisé les réformes les plus drastiques ; aujourd’hui ils s’en sortent. Pourquoi pas la France ?

En juin 2010, l’IREF organisait à l’Assemblée nationale, en partenariat avec l’association Contribuables Associés, un colloque intitulé « Baisse des dépenses publiques : ils l’ont fait, pourquoi pas nous ? » avec comme principaux invités un ancien ministre canadien et un haut fonctionnaire suédois. L’objectif était de montrer que ces deux pays, la Suède et le Canada, avaient réalisé d’importantes pour réformer l’Etat et pour baisser les dépenses publiques. Aujourd’hui, quatre ans après, si l’on voulait organiser le même colloque, il faudra inviter des représentants d’au moins une trentaine de pays. Car, partout dans le monde, on diminue les structures étatiques et on fait des coupes budgétaires drastiques.

Partout, sauf…en France. Notre pays est probablement le seul parmi les membres les plus riches de l’OCDE à ne pas avoir touché au nombre de fonctionnaires et à leurs privilèges. Et pourtant, plus de 23 % de la population active travaille pour l’Etat et les collectivités locales contre 14 % en moyenne dans les pays de l’OCDE. Nous avons 90 fonctionnaires pour 1 000 habitants contre 50 pour 1 000 en Allemagne. Notre Etat dépense en moyenne 135 Mds d’euros de plus par an que l’Etat allemand. Et, d’après les calculs de Jean-Philippe Delsol, 14.5 millions de Français vivent, directement ou indirectement, de l’argent public. Il y a donc urgence à faire de vraies réformes. D’autant plus que tout le monde l’a fait ou est en train de le faire.

Etats en crise, grosses réformes en vue

Un Rapport (Economic Policy Reforms 2014) de l’OCDE qui vient de sortir (février 2014) montre que pratiquement tous les pays membres (à l’exception de plusieurs émergents) ont mis en place depuis le début de la crise de 2008 des réformes structurelles importantes. Parmi ceux qui ont agi le plus figurent aussi les plus touchés par la crise : l’Irlande, l’Espagne, le Portugal ou bien la Grèce.

L’Irlande par exemple a été l’un des pays les plus touchés par la crise de 2008. Les dépenses publiques et le chômage ont explosé, par l’effet direct de l’écroulement du secteur immobilier et des faillites bancaires. Fin 2010, l’économie du pays était à l’agonie, dont la dette et les déficits récurrents le prédestinaient à un avenir toujours plus morose. Dès 2011, le Fonds monétaire international et l’Union européenne venaient à son secours et débloquaient 85 Md€ d’aides financières, soit plus de la moitié de son PIB. Dès 2010, l’Irlande décide de réduire sont budget de 10 Md€, soit 7 % du PIB (l’Irlande est d’ailleurs championne d’Europe de la baisse des dépenses publiques). Par comparaison, c’est l’équivalent d’une réduction de la dépense publique de l’ordre de 120 Md€ en France ! Pour y parvenir, l’Irlande sabre dans les services publics, et réduit de 20 % les traitements de ses fonctionnaires, ainsi que les pensions de retraites. De plus, l’Irlande décide de ne pas céder au chantage de l’Union européenne et de garder son taux d’IS (Impôt sur les sociétés) à 12.5 %. Cet entêtement a porté ses fruits : Il y a trois ans, le marché de l’emploi détruisait 7 000 emplois par mois. Aujourd’hui, on assiste à une création nette mensuelle de 5 000 postes.

En Espagne, pour économiser 50 Mds d’euros sur trois ans, le Premier ministre de l’époque, Zapatero a annoncé en 2010 une réduction en moyenne de 5 % des salaires des fonctionnaires (le gouvernement s’appliquera une réduction de 15%), le renouvellement d’un seul fonctionnaire sur 10 partant à la retraite et la baisse de l’investissement public de 6 Mds d’euros en 2010 et en 2011. En 2012, le nouveau chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, décide de frapper fort en baissant drastiquement les dépenses publiques. Les budgets des ministères espagnols sont réduits de 17 % en moyenne et les salaires des fonctionnaires restent gelés. On prévoit aussi la suppression de la plupart des niches fiscales et une amnistie fiscale pour lutter contre l’économie au noir qui représenterait environ 20 % du PIB. Les communautés autonomes sont aussi obligées de baisser leurs dépenses afin d’arriver à l’équilibre budgétaire.

Partout, on a compris qu’il fallait moins d’Etat

Le Portugal a baissé le nombre de fonctionnaires et leurs salaires (jusqu’à 20 % de réduction sur la fiche de paye). Même la Grèce l’a fait : 150 000 postes de fonctionnaires supprimés entre 2011 et 2014, soit 20 % du total ! En Grande-Bretagne on ne parle que du chiffre de 700.000. C’est le nombre de fonctionnaires que le gouvernement anglais a programmé de supprimer entre 2011 et 2017 : 100.000 par an.

Par comparaison, la France a supprimé, au titre de la politique de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux, seulement 31 600 en 2011. Trois fois moins qu’en Grande-Bretagne qui a – déjà – beaucoup moins de fonctionnaires que la France : 4 millions contre 6 millions… Depuis 2010, et l’arrivée au gouvernement des conservateurs, le secteur public a vu entre 500 000 et 600 000 emplois publics supprimés (et cela continue) là où le secteur privé a créé 1,4 millions. La Grande-Bretagne ne fait pas aussi bien que les Etats-Unis (1 emploi public supprimé et 5 emplois créés dans le privé) mais elle se situe nettement au-dessus de la France : 2.8 emplois créés dans le privé pour 1 emploi supprimé dans le public entre 2010 et 2013. Aux Etats-Unis donc, sous Obama, entre 2010 et début 2013, on a supprimé 1.2 millions d’emplois dans le secteur public ! Plus de 400 000 postes de fonctionnaire centraux ont été supprimés et aussi plus de 700 000 postes de fonctionnaires territoriaux. A titre de comparaison, sur la même période (2010-2013), le nombre d’agents publics a augmenté de 13 000 en France (surtout au niveau local) et on a compté 41 000 emplois privés détruits tandis que l’Amérique en créait 5.2 millions !

Toutes ces réformes ont été provoquées par la crise de 2008 mais aussi par les exemples canadien et suédois. Ces pays ont déjà diminué le poids de l’Etat dès le début des années 1990. Et cela s’est vu car les deux pays ont plutôt été épargnés par la crise comme l’Allemagne qui a aussi réformé durant les années Gerhart Schroeder. Une comparaison mérite l’attention. Le Canada a supprimé environ 23 % de sa fonction publique en trois ans (entre 1992 et 1995). Si la France faisait la même réforme et dans les mêmes proportions, 1.3 millions de fonctionnaires français devraient quitter leurs postes !

Moins d’impôt c’est plus de rentrées fiscales

Mais les réformes ont concerné aussi la fiscalité. Tous les ans, l’IREF publie un aperçu (Taxation in Europe) de la fiscalité dans plus d’une trentaine de pays européens.

Ce qu’on remarque depuis environ 4-5 ans, c’est que de nombreux pays préfèrent baisser la pression fiscale, surtout la fiscalité sur les entreprises. La concurrence internationale et la mondialisation obligent les Etats à s’adapter tout en supprimant des réglementations et en donnant plus d’air aux entreprises. Il y a deux ans, la Grande-Bretagne avait annoncé une baisse de l’impôt sur les sociétés de 28 à 24 %. Mais le gouvernement de David Cameron veut aller encore plus loin et annonce une baisse jusqu’à 22 % d’ici 2015. Moins 6 points en 3 ans seulement. En janvier 2013, l’impôt sur les sociétés a baissé de 26.3 à 22 % en Suède. Une baisse sensible, qui suit l’exemple d’autres pays comme l’Allemagne (de 30 à 26 %). La Finlande l’a fait aussi (de 28 à 26 %). Et le Danemark : son taux d’impôt sur les sociétés passera d’ici 2016 de 25 à 22 %. Tous les pays ont d’ailleurs compris qu’il faut soulager les entreprises sauf… la France. Dans le classement des taux d’imposition sur les sociétés, la France est championne européenne avec un taux à plus de 36 %.

L’IREF a même montré que parmi les membres de l’OCDE, c’est en Norvège que l’IS génère le plus de rentrées fiscales (11 % du PIB). Et pourtant, le taux de l’IS se situe à 24 %, plus de 10 points de moins que l’IS français (36 %) qui ne fait rentrer que… 2.5 % du PIB. Voici d’autres exemples : au Luxembourg, le taux d’IS est à 17.1 % mais les recettes générées représentent 5 % du PIB, le double de ce qu’elles génèrent en France. En Grande-Bretagne, c’est 3 % du PIB pour un IS à 26,7 %. En Belgique, c’est 3 % du PIB pour un IS à 17 %. Faut-il encore rappeler le 12,5 % de l’Irlande qui avec 2,6 % du PIB rapporte davantage que ce que nous vaut le taux français, trois fois supérieur !

Tout le monde l’a fait, sauf la France : baisses des dépenses publiques, réduction du nombre de fonctionnaires, moins de pression fiscale… Les politiques français seraient-ils complètement coupés de la réalité économique ?

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8 commentaires

M; SELLEM 8 mars 2014 - 12:26

votre article sur les basses de fiscaloiyte en Europe
j'approuve cet article ! mais la cause principale de la non action du pouvoir Parisien est…..la CENTRALISATION de tous les pouvoirs …économiques, politiques, sociaux, médiatiques en Ile de France ….vieille histoire purement française qui date de la Révolution française de 1789 !
C'est une L'EXCEPTION française parmi les pays européens qui sont tous DECENTRALISES avec des parlements et budgets forts dans leurs Province !

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Royer 8 mars 2014 - 12:52

Statut des fonctionnaires
Comment voulez-vous que l'on touche au statut des fonctionnaires alors qu'une bonne partie de nos députés sont issus de la fonction publique. Les fonctionnaires bénéficiant de la garantie de l'emploi tout mutation fait l'objet de contrepartie..;;

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Astérix 8 mars 2014 - 5:21

L'immobilisme
Point n'est besoin d'être grand clerc pour voir ce qui va se passer.

Hollande ne fera STRICTEMENT RIEN, sauf des conneries…! Il faudra que les marchés financiers montent les taux et que les agences de notation dégradent notre note jusqu'à la faillite et la ruine du secteur privé pour faire réagir les Français…!

Nous sommes le seul Pays européen à n'avoir procédé à aucune réforme de structures qui auraient dû être réalisées, sur la durée, depuis 1980.

Il sera impossible de s'en sortir sans tout remettre à plat, avec des économies drastiques. Ce Pays est gouverné depuis plus de 30 ans par des fonctionnaires qui pensent que 1 + 1 = 100000 et pour lesquels l'argent tombe du ciel.. Il s'agit en fait de votre… argent qu'ils empruntent en quelque sorte…

Ils n'ont toujours pas compris que si le secteur privé est exsangue, la vie du Pays s'arrête et plus personne n'est payé.

Or, nous sommes déjà en état de cessation de paiement. Il faut bien comprendre que les salaires des fonctionnaires, les retraites, toutes les dépenses publiques, subventions de nos irresponsables sont réglées par L'EMPRUNT…! et non par de la richesse créée par le secteur privé qui ne peut plus faire face à tant de prélèvements, impôts, charges, taxes…

Les lampes rouges sont allumées, mais personne ne le voit…???!!!

Les PME/PMI/TPE, force vive de ce Pays, vaut "sauter" les unes après les autres… Je prends date..

Il faut vraiment être complètement bouché pour ne pas comprendre que cette situation ne peut durer.

Imaginez un couple dont les revenus mensuels seraient de 2500 € et qui dépenserait chaque mois 7500 €…!

C'est pourtant ce que font nos gouvernants depuis des années en toute impunité… mais lorsqu'il faudra régler l'addition et rembourser les dettes, ce sont les Français qui paieront avec leur épargne et leur patrimoine..

Mais ouvrez les yeux Bon Dieu… Qu'est-ce que vous croyez…???

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FA31151 8 mars 2014 - 10:33

Dépenses publiques
Nos politiciens, et surtout les "socialistes" se moquent totalement de l'entreprise "France" dès l'instant que leur ego est satisfait et qu'íls peuvent profiter d'un système qui LEUR profite!
Réduire les dépenses de l'état, sans les transférer aux municipalités!, serait menacer leur terreau électoral ET donc leur position in fine.
Ne rèvons pas, seule une guerre civile arrivera ]a changer les choses… et elle arrive car quand la pression est excessive la cocotte-minute explose!

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Jean im 9 mars 2014 - 8:24

Municipales
Appel à idées pour une action au plus près du terrain : sur quels budgets peut-on en général demander une baisse de la dépense aux candidats -surtout aux Sortants renouvelables- en restant crédible et en pouvant espérer quelque résultat alors qu'ils se plaignent d'une baisse des aides de l'Etat ? 5 ou 10 % ? Pour le moment, la plupart se glorifient de ne pas augmenter les impôts mais mon asso de CONTRIBUABLES BELLEGARDIENS EN COLERE aimerait mieux ! Merci.

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balt 10 mars 2014 - 8:35

d'accord mais
je suis d'accord avec le fait que les dépenses inutiles nous ruinent. Mais le problème est plus global:il se situe entre productifs et non productifs.En France ,les effectifs des banques sont pléthoriques,la productivité est faible.Qu'est ce qui coute le plus cher au pays:les emplois superflus de fonctionnaires ou les secteurs subventionnés du style sport professionnel,cinéma,finance services du type eau?L'immigration de population,la corruption des décideurs coutent aussi très cher. Je pense qu'il nous coutera bien plus cher d'apurer les comptes de nos banques que de payer 1 millions de fonctionnaires superflus

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Dgé 10 mars 2014 - 9:49

Faut problème
Pourquoi s'acharner sur "les petits fonctionnaires" ? Merde !
Combien distribue t'on à l'agriculture ?
Combien la FRANCE rétribue t-elle de parlementaires et assistants ( France et Europe) et combien coûtent-ils???
Il faudrait peut-être voir où le bât blesse !!!
Soyez un peu plus objectif.

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libé-râle 10 mars 2014 - 2:27

Le problème, c'est l'Etat, pas les fonctionnaires.
Le problème de la France, c'est l’étatisme. C'est çà qu'il faut combattre en rendant aux Français ce qui peut-être soustrait de l'emprise de l'Etat et ne lui conserver que les pouvoirs régaliens (Police, Armée, justice..). 20% des emplois sont des emplois publics, 20% de la population en extrapolant et de 30 à 40% si on considère que le statut de fonctionnaire est un amortisseur en cas de chômage du conjoint, l'encourageant ainsi à défendre tout simplement sa famille en votnt pour les Etatistes. Il est probable, en outre, que ceux qui ont des droits importants voire exceptionnels à défendre (fonctionnaires) sont plus nombreux que ceux qui vivent en essayant de s'adapter au marché et qui n'attendent pas grand chose des Politiques. Le poids des fonctionnaires dans les élections est donc très certainement largement supérieur au poids de leur effectif. Comme les Politiques sont également fréquemment issus de la Fonction Publiquie, on ne voit pas ce qui peut faire évoluer les choses dans le bon sens. Il est donc inutile de s'attaquer aux fonctionnaires en place, ils se défendront avec vigueur et la France entière risque d'en être durablement affectée, mais il faut limiter au maximum les fonctionnaires de demain en privatisant ce qui peut l'être tout en conservant les fonctionnaires titulaires jusqu'à leur retraite. Ce n'est pas faire injure aux fonctionnaires que de relever que la productivité du Privé dépasse largement celle du Public. " L'Etat n'est pas la solution, c'est le problème". Transférer au fur et à mesure des départs en retraite, l'activité du Public vers le Privé, est une solution "en douceur" qui devrait limiter les vagues.

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