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Budget 2014 : rigueur pour tous, sauf pour les fonctionnaires civils

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Dans sa version actuelle, le budget reflète les choix politiques fondamentaux du gouvernement : ne rien toucher au secteur public et aux avantages des « camarades militants », et faire porter l’effort sur le secteur privé, aux dépens de la compétitivité des entreprises françaises. Panorama du budget décrit pour l’IREF par Alain Mathieu (Président Honoraire de Contribuables Associés)

Le budget de l’Etat pour 2014 a été établi sous de fortes contraintes politiques et économiques. Les élections municipales, qui auront lieu le 23 mars prochain, risquent de voir tomber de nombreux élus socialistes. « La politique nationale aura un effet sur les élections municipales, et cela me préoccupe » déclare déjà à BFM TV la candidate socialiste à la mairie de Paris, Anne Hidalgo.

Jouer sur les statistiques du chômage

François Hollande ayant promis un retournement de la courbe du chômage pour la fin de l’année, les statistiques du chômage de janvier et février seront importantes pour le résultat de ces élections et l’atténuation des gémissements des camarades battus. A court terme, ces statistiques peuvent être modifiées par une accélération des radiations sur les fichiers de chômeurs, ce qui a commencé en août (+30 % sur le mois précédent) et par l’embauche d’emplois publics : 150.000 « emplois d’avenir » sont prévus, qui coûteront des milliards. « Des contrats aidés qui ne débouchent sur aucun poste » écrivait François Hollande en février 2012 dans son livre « Changer de destin ». Mais la nécessité électorale à court terme, c’est-à-dire la satisfaction des camarades élus, est prioritaire.

Une baisse des effectifs « sélective » et compensée

Une deuxième contrainte politique est également déterminante : la satisfaction des camarades militants, qui se recrutent essentiellement parmi les fonctionnaires et notamment les enseignants. Il faut leur éviter tous les efforts qu’une baisse d’effectifs et des horaires de travail plus longs risqueraient d’exiger. La promesse d’embaucher 60.000 enseignants supplémentaires pendant le quinquennat sera tenue. Certes, François Hollande a annoncé que les effectifs globaux de l’Etat seraient stables. 13.123 postes seront donc supprimés en 2014 dans les ministères non prioritaires, mais 60 % de ces suppressions (7.881) affecteront les militaires, soit une réduction de 2,9 % de leurs effectifs : les militaires ne sont pas d’ardents pourvoyeurs de militants socialistes. Le ministère des Finances est également affecté (2.564 suppressions de postes, soit 1,7 % des effectifs, environ la moitié de ses départs en retraite). Les autres ministères sont peu concernés. Si l’on ajoute les 2.000 postes créés à Pôle emploi en 2014, après les 2.000 créés en 2013, qui pourraient être pris sur les effectifs des ministères mais ne le seront pas, les efforts consentis sur les effectifs de fonctionnaires civils de l’Etat sont dérisoires.

Préserver les privilèges de la fonction publique

La réforme des retraites annoncée en août a épargné tous les régimes spéciaux, y compris celui des fonctionnaires, qui bénéficient de privilèges extravagants : départ à la retraite avancé en moyenne de trois ans au moins par rapport au régime général, et pensions supérieures d’au moins 60 % à salaires équivalents. Enfin les salaires individuels des fonctionnaires continueront à progresser en moyenne d’environ 2 % par an, grâce au « GVT » (glissement vieillesse technicité : augmentations individuelles dues à l’ancienneté, aux promotions par changement de catégorie et aux augmentations de diverses catégories). Les fonctionnaires vont même pouvoir s’absenter plus facilement. Le budget prévoit en effet la suppression du « jour de carence » institué pour les fonctionnaires par la précédente législature : un jour non payé en cas d’absence pour maladie, réelle ou non. Les salariés du privé sont soumis à trois jours de carence.

Des prélèvements obligatoires toujours plus lourds

La contrainte économique est aussi très forte. L’activité économique stagne en France, si bien que les recettes fiscales rentrent mal : les nombreuses augmentations et créations d’impôts de 2013 avaient permis de prévoir une hausse des rentrées fiscales de 10,7 % en 2013; elle atteindra sans doute moins de 6 %. « Trop d’impôt tue l’impôt » dit le proverbe. Cette stagnation économique est due à la perte de compétitivité de nos entreprises, concurrencées par nos voisins européens et notamment l’Allemagne. Il y a dix ans, celle-ci était « l’homme malade » de l’Europe. Mais les réformes de « l’Agenda 2010 » lancé en mars 2003 par le chancelier socialiste Gerhard Schroeder lui ont fait retrouver son dynamisme économique. Ses exportations sont florissantes, sa croissance nettement supérieure à celle de la France, son taux de chômage la moitié du taux français (et même moins pour les jeunes). Depuis 1990 les effectifs de fonctionnaires ont diminué de 2,2 millions en Allemagne et augmenté de plus d’un million en France. Si la France avait les mêmes dépenses de rémunération des fonctionnaires que l’Allemagne (en % du PIB), elle ferait 110 Mds € d’économies de dépenses publiques. Les prélèvements obligatoires sur les entreprises françaises sont de 18,3 % du PIB contre 12,2 % en Allemagne, soit 120 Mds € de plus pour les entreprises françaises. D’où nos problèmes de compétitivité. Le gouvernement en est conscient. A la suite du rapport de Louis Gallois, il a annoncé une baisse de 20 Mds € des prélèvements sur les entreprises (Crédit d’impôt compétitivité emploi) mais celle-ci ne représente qu’ 1/6 de la différence avec l’Allemagne. De plus cette baisse va encore être réduite de 2 Mds € par un absurde nouvel impôt pénalisant principalement les entreprises industrielles, les plus exposées à la concurrence internationale.

La rigueur budgétaire « à la française »

L’économie anglaise repart aussi. Depuis l’arrivée au pouvoir des conservateurs en mai 2010, les effectifs de fonctionnaires ont baissé de 440.000 tandis que les effectifs du secteur privé augmentaient de 1.155.000, dont la moitié sur les 12 derniers mois connus. Deux années de véritable rigueur budgétaire ont suffi au Royaume-Uni pour que son économie reparte.
Ce n’est pas le cas de la France. Au total les dépenses de l’Etat français inscrites au budget s’élèveront en 2014 à 379,9 Mds €, soit une augmentation de 9,2 Mds €, ou 2,5 %, par rapport au dernier budget dont les dépenses sont connues, celui de 2012. Dans le même temps, les impôts augmenteront de 16 Mds €, soit 5,7 % par rapport à cette même année. Comme l’impôt sur les bénéfices des sociétés baissera, l’essentiel de l’augmentation, exactement 15,8 Mds €, portera sur l’impôt sur le revenu, qui augmentera de 26,5 % en deux ans. On comprend que le ministre des Finances parle de « ras-le-bol fiscal ». Bien entendu cette énorme augmentation ne touche pas que les riches. L’impôt de 75 % sur les rémunérations supérieures à 1M€, qui sera d’ailleurs payé par leurs employeurs et non par les bénéficiaires, ne devrait rapporter que 260 Millions €.
Contrairement aux autres pays, la rigueur budgétaire n’affecte donc pas en priorité le secteur public, mais tous les ménages contribuables. C’est eux qui supportent « l’effort budgétaire historique » dont se réclament nos ministres. En mai 2013, François Hollande avait déclaré à Leipzig : « Le progrès, c’est aussi de faire des réformes courageuses pour préserver l’emploi et anticiper les mutations sociales et culturelles comme l’a montré Gerhard Schröder ». Mais il avait ajouté : « Tout n’est pas transposable. Nos pays sont différents ; nos histoires ne sont pas interchangeables. Nos cultures politiques syndicales sont singulières ». Il avait raison : la contrainte politique, c’est-à-dire la satisfaction des camarades fonctionnaires, est en France prioritaire.
(Cet article a été aussi publié sur le site de l’association Contribuables Associés)

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2 commentaires

Astérix 4 octobre 2013 - 2:10

En route vers la faillite !
Alors qu'il faudrait baisser massivement les dépenses publiques, la France, toujours géniale, les augmente (7 millions de fonctionnaires alors qu'à population égale et à titre d'exemple, le Portugal en à la moitié…! Par ailleurs, TOUT, je dis bien TOUT est mis en oeuvre pour faire exploser le chômage (travail le dimanche et le soir, taxe sur l'EBE des entreprises, impôts et prélèvements en tout genre, etc… Continuons tranquillement jusqu'à la faillite finale.! La France le Pays de l'intelligence… !?

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Jidé 5 octobre 2013 - 12:32

C'est la failliteeeee finaleeeee!
Il faut dire aussi que l'économie anglaise n'est pas plombée par l'euro , que la GB n'est pas contributive nette par rapport à l'UE autant (i want my money back…) que la France et aussi qu'ils ne sont pas dans l'espace Schengen ce qui leur permet de ne pas avoir de frontières passoires!!!

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