A part les adeptes du nivellement par le bas, dont les marxistes de toutes obédiences ont démontré l’inanité et le caractère purement idéologique, chacun admettra qu’il est préférable de miser sur le développement pour tous plutôt que sur une égalité finalement nuisible d’abord aux plus pauvres. Mise au point de Jean-Philippe Delsol , administrateur de l’IREF.
En France, la réforme des retraites prévoit d’ores et déjà l’augmentation d’un point du taux d’imposition pour la tranche qui concerne les revenus les plus élevés. Confondant les finances de l’Etat et celles de la Sécurité Sociale, cette disposition aurait pour but de compenser le coût – soit environ 585 millions d’euros – du bouclier fiscal. Et le bouclier lui-même pourrait être désormais soumis à la condition que son « bénéfice » soit réinvesti dans des PME.
Aux Etats Unis, le débat est plus significatif et porte sur la question de savoir s’il faut ou non reconduire les exonérations d’impôts prévues par la majorité du Président Bush jusqu’au 31 décembre 2010 au profit d’environ trois quarts des foyers américains, mais surtout des plus aisés d’entre eux. Obama a pour sa part déjà tranché en faisant savoir qu’il voulait que s’éteigne le dispositif actuel pour le remplacer par des mesures provisoires et ponctuelles d’amortissement accéléré des investissements des PME.
Alors même que la croissance économique reste incertaine et que les déficits publics s’envolent, l’augmentation des impôts, et surtout sur les plus riches, peut-elle contribuer à l’assainissement des finances publiques et, par là, à la dynamique économique, ou au contraire ces mesures risquent-elles d’entraver le redressement des pays concernés ?
Selon une formule ancienne attribuée à l’économiste Barthélémy de Laffemas à la fin du XVIème siècle, « les hauts taux tuent les totaux ». Pufendorf faisait même remonter cette expression à Hésiode pour signifier qu’au-delà d’un certain niveau, variable selon les pays et les circonstances ou les époques, une augmentation des taux d’imposition contribue à réduire le produit de l’impôt, non à l’accroître. Avant même qu’Arthur Laffer reprenne avec succès cette formule en traçant sa fameuse courbe dans les années Reagan, l’ingénieur polytechnicien Arsène-Jule Emile Dupuit (1804-1866) en avait conceptualisé le principe scientifiquement dans les Annales des Ponts et Chaussées, n°116, datées de l’année 1844 : « Si l’on augmente graduellement un impôt depuis 0 jusqu’au chiffre qui équivaut à une prohibition, son produit commence par être nul, puis croît insensiblement, atteint un maximum, décroît ensuite successivement puis devient nul ».
Dans un article récent du Wall Street Journal (3 août 2010), Arthur Laffer a rappelé l’évolution inversement proportionnelle des taux d’impôt d’une part et du produit de l’impôt et de la croissance du PIB tout au cours du XXème siècle aux USA. Il souligne également que plus les taux d’impôt sur le revenu des plus riches baisse, plus ceux-ci concourent au produit de l’impôt. Car lorsque les taux d’impôt sont trop élevés, les gens aisés déploient tous les moyens possibles pour réduire leur assiette imposable en même temps que cet excès de taxation décourage nombre d’entre eux d’entreprendre ou pour le moins de travailler plus.
Ces constatations sont vérifiées pour les baisses d’impôt des présidents Harding et Coolidge dans les années 20, comme pour celles des président Kennedy dans les année 60 ou du président Reagan dans les années 80. Les taux marginaux supérieurs d’imposition furent alors réduits respectivement de 73 à 25%, de 91 à 70% et de 50 ou 70% à 15 ou 35%. Et le produit des impôts des 1% de contribuables les plus fortunés passa respectivement de 0,6% en 1920 à 1,1% du PIB en 1928, de 1,3% en 1960 à 1,9% en 1968, de 1,5% en 1978 à 3,3% en 2007. A contrario, lorsque les présidents Hoover puis Roosevelt portèrent les taux supérieurs d’imposition sur les revenus à 63% en 1932 puis 79% en 1936, la contribution des 1% des foyers les plus aisés furent quasiment stables, passant de 1,1% du PIB en 1928 à 1% en 1940, mais dans le même temps la Grande Dépression continuait de détruire la société américaine que seule l’économie de guerre allait sauver. Durant les hausses d’impôts des années Nixon, Ford et Carter, entre 1968 et 1981, la contribution fiscale des 1% les plus riches fut réduite de 1,9% à 1,5% du PIB.
Certes, la baisse de la fiscalité sur les plus hauts revenus accroît sans doute les inégalités, mais seulement parce que les déciles les plus modestes s’enrichissent moins que les plus fortunés. Vaut-il mieux que tous s’appauvrissent pour éviter plus d’inégalité ou faut-il accepter que certains s’enrichissent plus que d’autres proportionnellement pour permettre que tous s’enrichissent ? A part les adeptes du nivellement par le bas, dont les marxistes de toutes obédiences ont démontré l’inanité et le caractère purement idéologique, chacun admettra qu’il est préférable de miser sur le développement pour tous plutôt que sur une égalité finalement nuisible d’abord aux plus pauvres. Ceux qui ne sont pas convaincus pourront s’en remettre à la théorie de la justice de John Rawls : « Ceux qui ont été favorisés par la nature, quels qu’ils soient, peuvent tirer avantage de leur chance à condition seulement que cela améliore la situation des moins bien lotis. ….Ainsi, nous sommes conduits au principe de différence si nous voulons établir le système social de façon à ce que personne ne gagne ni ne perde quoi que ce soit, du fait de sa place arbitraire dans la répartition des atouts naturels ou de sa position initiale dans la société, sans donner ou recevoir des compensations en échange. » Le seul problème, avec John Rawls, c’est qu’il n’a pas su calculer cet optimum de justice fiscale (mais comment aurait-il pu le faire ?) ce qui a autorisé les gouvernements à augmenter sans cesse la pression fiscale sur les plus riches !
Si la raison l’emporte sur la démagogie, les gouvernements de France, des Etats Unis et d’ailleurs devront éviter des hausses d’impôts à la charge des plus riches qui finalement coûteront plus qu’elles ne rapporteront, et feront peser un fardeau supplémentaire sur les contribuables les plus démunis.
4 commentaires
Reagan
En fait sous Reagan la tranche marginal a été abaissée à 28%
Puis relevé sous les autres président vers 40, avant que Bush ne revienne à 35.
Outre l’incitatif à entreprendre et travailler, il faut aussi prendre en compte l’impact sur le taux d’épargne s’agissant de la taxation des très haut revenus.
Or l’épargne est le carburant de l’économie sur le long terme en permétant le financement de nouveaux investissements qui vont permetre d’augmenter les revenus futurs.
En fin un autre avantage de taux d’impot raisonables outre le produit global est la diminution des dépensses sociales, comme l’assitance chomage par exemple.
Ainsi un taux plus bas poura permetre de réduir le déficit (ou du moin ne l’agravera pas forcément) méme si les recettes diminuent.
Pour qui roulez vous donc?
Si vous estimez que dans notre pays la fiscalité est juste alors vous avez sûrement tout faux.
On ne peut naturellement pas taxer les plus pauvres qui ne s’en sortent déjà pas, on ne veut pas taxer les plus riches de peur qu’ils partent(mdr)alors sus aux clases moyennes, celles qui sont dans la crainte de perdre leur emploi, qui ont des emprunts à rembourser ou qui ayant travaillé toute leur vie doivent se contenter d’une retraite dont le pouvoir d’achat ne cesse de baisser d’année en année simplement parce que les retraités sont ignorés des syndicats et de l’Etat puisqu’ils ne représentent pas un pouvoir de nuisance.
A propos des riches faut il rappeler que les Halliday, Delon, Aznavour et j’en passe qui encaissent leurs gains en France et vont payer leurs impôts en Suisse, bouclier fiscal ou pas.
Je suis de ceux à qui l’Etat demande toujours plus tout en leur donnant moins alors je vous laisse à vos bonnes théories et au risque de vous decevoir je ne suis viscèralement pas marxiste
un meilleur système
Il est vrai qu’un système fiscal qui prétend à la justice est un casse-tête.
Il vaudrait certainement mieux qu’il tente simplement d’éviter l’injustice.
Pour cela, il faut que l’état intervienne très peu et laisse aux individus, seuls ou en associations non subventionnées la grande majorité de leurs décisions.
L’état doit se borner, et c’est déjà une tâche immense, à éviter la spoliation, par les autres et par le public, de la propriété personnelle.
Ainsi les riches n’auraient aucune envie de s’expatrier pour conserver leurs avoirs,
Les moins nantis sauraient qu’ils doivent simplement à eux-mêmes d’améliorer leur condition, que le loto d’état ne leur octroiera jamais un jack-pot les dispensant de travailler.
Les immigrés viendront seulement s’ils aiment un pays libre pour y travailler suivant les habitudes des gens du cru.
Il faut pour que cela fonctionne, un consensus dans le temps, car ce qui fait fuir depuis des années, c’est bien évidemment la presque certitude que les pouvoirs publics aggraveront inévitablement dès que cela leur sera possible le poids qui pèse sur la classe la plus faible.
Une deuxième condition est nécessaire pour un retour à l’équilibre: une baisse très rapide et importante des dépenses de l’état.
Aujourd’hui cette classe la plus faible est la classe moyenne, retraitée ou travaillant dans le privé
hop hop hop
C’est un peu court cette façon de présenter les chiffres. Il est difficile de savoir si l’argumentation est réellement honnête ou si elle est biaisée.
Comment peut-on corréler une politique fiscale et le produit des impôts sur plusieurs années (voire plusieurs lustres) ?! Le phénomène est multifactoriel. Vous ne pouvez pas passer sous silence le contexte économique, social, la situation mondiale de l’époque, etc… Et pourquoi ne prendre que quelques exemples ? Peut-être avez-vous choisis ceux qui servaient votre thèse ? Pourquoi ne pas simplement surperposer sur le 20ème siècle les taux d’impositions et les produits de l’impôt ?
De plus l’enrichissement des individus n’est pas le seul critère du bon état de santé d’une société. pour vous qui aimez les corrélations, je me permet de souligner un fait. Lorsque l’on superpose à l’international les répartitions (et/ou les évolutions) des inégalités sociales et des niveaux d’insécurité, il y a superposition.
Etonant non ? Remarquez que j’ai dit « superposition ». Pour changer cette superposition en corrélation, il y a encore beaucoup de travail que je n’ai pas le temps de développer ici.