La France, avec sa longue tradition de mouvements sociaux, est bien connue pour son droit de grève. Ce droit, acquis au fil des décennies, est une pierre angulaire de la démocratie du pays, plus sociale que libérale. Cependant, à l’approche des Jeux Olympiques où le monde entier aura les yeux rivés sur nous, certaines voix politiques se font entendre, plaidant en faveur d’une révision de ce droit utilisé parfois de façon abusive.
Les impacts immédiats
Le droit de grève remonte aux mouvements ouvriers du 19e siècle. Légalement reconnu en France depuis 1864 (loi Ollivier), il a constitué une étape cruciale dans l’histoire de notre démocratie. Il est devenu aujourd’hui un instrument puissant entre les mains des syndicalistes. Pourtant, ce qui devait à l’origine donner plus de pouvoir aux travailleurs finit souvent par jouer en leur défaveur puisque les premières victimes n’en sont pas les cadres supérieurs qui ont la possibilité de télétravailler ou de prendre leur voiture mais les employés de niveaux plus modestes qui doivent, soit se lever aux aurores et rentrer tard après avoir passé des heures dans des transports bondés, soit renoncer à une journée de salaire.
Selon l’INSEE, les grèves et manifestations de 2019 ont eu un impact négatif sur la croissance économique de la France : la croissance du produit intérieur brut (PIB) aurait été réduite de 0,1 point de pourcentage au quatrième trimestre 2019 à cause de ses perturbations.
Une autre estimation a été fournie par le gouvernement français lui-même aboutit aux mêmes conclusions. En décembre 2019, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a déclaré que les grèves avaient coûté à l’économie française environ 0,1 point de croissance du PIB.
Les impacts durant les JO de 2024
Les Français, qui ont la réputation d’être râleurs, mais se montrent fatalistes quand il s’agit des grèves : c’est quasiment un réflexe, lorsqu’ils doivent se déplacer, ils vérifient toujours que leur trajet ne sera pas perturbé, protestent quand c’est le cas, puis s’entassent docilement dans les rames. On peut néanmoins se demander comment le monde nous jugera et quelles seront les conséquences économiques d’une grève, s’il s’en produisait durant la période cruciale des Jeux Olympiques. Des tentatives de coercition ont déjà eu lieu : en février dernier, le sénateur LR des Bouches-du-Rhône, Stéphane Le Rudulier, a déposé une proposition de loi visant à « rendre impossible d’exercer le droit de grève » à la SNCF, à la RATP ou dans les avions lors des week-ends de début et de fin des périodes scolaires. De son côté, Véronique Besse, députée non-inscrite de Vendée, voulait carrément d’interdire les grèves pendant toute la durée des vacances scolaires ; ce qui, selon le sénateur LR, serait totalement disproportionnée et non recevable constitutionnellement. Plus récemment, Xavier Bertrand, président du Conseil régional des Hauts-de-France, redoutait que l’exécutif n’ait versé une « rançon » (le montant de l’augmentation indemnitaire consentie n’a pas encore été rendu public) afin d’éviter une grève du ciel durant les jeux olympiques de 2024. De plus, bien que deux syndicats de contrôleurs aériens aient annoncé une « trêve olympique », Xavier Bertrand craint malgré tout une grève de dernière minute avant les JO au sein d’autres services publics comme la RATP ou la SNCF : cet accord prévoit « une augmentation indemnitaire » pour « un engagement d’une trêve olympique jusqu’en septembre 2024 ».
Le président de la Région Hauts-de-France préfèrerait que la France s’inspire de la législation italienne. Selon lui, il faudrait faire évoluer notre loi sur le service minimum en service garanti. Tandis que le ministre des transports, Cléments Beaune se félicite de l’engagement pris par les deux syndicats afin d’éviter tout mouvement social durant les futurs événements sportifs, Xavier Bertrand l’invite cependant à faire preuve de plus de prudence, en rappelant que seule une nouvelle loi pourrait éviter que d’autres professions soient incitées à faire du « chantage à la trêve » : la trêve payante ou la grève !
Pour un encadrement du droit de grève
Il y a deux ans, l’IREF a publié un plaidoyer pour un encadrement du droit de grève. Il n’est plus que jamais d’actualité. L’auteur de ce plaidoyer recommande notamment que le déclenchement d’une grève dans une entreprise soit soumis à des critères stricts, tels que le soutien d’au moins 50 % des salariés exprimé par un vote, à bulletin secret pour garantir sa validité. Il conclut en rappelant que l’encadrement du droit de grève est nécessaire pour éviter que le pays ne soit paralysé par une minorité de grévistes lors de réformes importantes, surtout en période de crise budgétaire. Lors des JO, ce ne sera pas seulement l’économie française qui sera en jeu, mais son image : comment pourrons-nous assumer aux yeux du monde entier une France qui marche au ralenti durant une période où elle est censée briller ? Dans les prochains mois, c’est une sorte de partie de « pierre, feuille, ciseaux » qui se jouera. Quel intérêt l’emportera ? Un droit de grève si durement acquis ou la liberté de circulation qui fait partie de nous droits fondamentaux ? Dans le deuxième pays le plus imposé au monde, pourrons-nous, en 2024, ne pas rougir de notre service public ? Si un véritable encadrement du droit de grève n’est pas mis en place, les conséquences économiques et en termes d’image seront dévastatrices pour la France. Le droit de grève est un contrepoids nécessaire au bon fonctionnement d’une économie de marché, mais à condition qu’il ne soit pas détourné à des fins idéologiques.
6 commentaires
Déjà qui paye les syndicats
Ils font du chantage, OK !
Le gouvernement doit promettre aux syndicats une loi obligeant les syndicalistes à responsabilités de déclarer leurs avoir, comme les ministres !
Je pense qu’ils n’appreciraient pas….
La comparaison entre le pourcentage de travailleurs du secteur privé syndiqués et celui des fonctionnaires et assimilé montre clairement qu’on assiste à un dévoiement de l’action syndicale et du droit de grève . On finance en partie par l’impôt de tous des syndicats politisés, capables de paralyser notre pays pour défendre les intérêts d’une « clientèle » jouissant d’un statut de fonctionnaire ou assimilé. Cherchez l’erreur.
Beaune est satisfait de l’accord ! Il n’est pas difficile à contenter : un « accord » obtenu contre des indemnités complémentaires… Mais d’où vient donc cet argent ? C’est le nôtre et c’est nous qui payons le racket syndical de salariés super protégés. Personnellement je trouve que cela commence à bien faire, ces gens là sont des preneurs d’otages et le gouvernement s’il avait eu un peu de courage aurait dû faire le ménage dans cette affaire de droit de grève car les syndicats n’en ont jamais assez et comme ils s’aperçoivent que le chantage marche, ils en abusent.
Comme dans beaucoup de domaines, des mesures doivent être prises à bras le corps, mais le gouvernement en aura-t-il le courage ?
pour commencer l’état (avec notre argent, celui des contribuables) doit arrêter de financer ls syndicats, qui doivent vivre des cotisations de leurs adhérents