En 2013, la Cour des comptes avait publié un référé brocardant le système d’assurance chômage des intermittents du spectacle qui avait fait grand bruit et même conduit à l’occupation de ses locaux par les intéressés en colère.
Deux ans plus tard, sous le mandat de François Hollande, Manuel Valls étant Premier ministre, un rapport enterre discrètement toute velléité de réforme. Depuis lors, aucune mesure n’a été mise en œuvre pour mettre fin à la gabegie.
A l’époque, nous avions déjà évoqué cette situation inique qui n’a fait que prendre de l’ampleur depuis.  Des réformes ont permis à l’Unedic de retrouver son équilibre mais les bénéficiaires de l’assurance chômage n’ont pas tous été mis à contribution, ce qui illustre les travers d’un modèle social français incapable de mettre fin aux privilèges de niche.
Les assurés ont consenti des efforts, mais l’Unédic mettra des années avant de rembourser sa dette
L’année dernière, pour la première fois depuis 2008, les comptes de l’Unédic avaient terminé dans le vert avec un excédent de 2,5 Mds€. Cette trajectoire optimiste devrait se poursuivre en 2023 (+ 3,8 Mds€), 2024 (+ 4,7 Mds€) et 2025 (+ 8,6 Mds€), permettant de réduire la dette de l’assurance chômage, de 55,5 Mds€ cette année à 42,2 Mds€ en 2025.
D’une part, du fait de l’inflation, les salaires sont tirés à la hausse, ce qui entraîne une augmentation des cotisations chômages versées par les entreprises et, partant, des recettes de l’Unédic, qui progressent de 45,7 à 48,9 Mds€ pendant la période 2023-2025 ; d’autre part les dépenses de l’organisme paritaire sont en baisse, de 41,9 à 40,3 Mds€ pendant la même période.
Outre les facteurs conjoncturels, les réformes successives de l’assurance chômage voulues par le Gouvernement permettent de donner une bouffée d’oxygène à cette branche connexe de la Sécurité sociale (le total des économies réalisées devant atteindre 5,2 Mds€ pour l’année 2025). Cette embellie financière permettra donc de rembourser la dette abyssale, de l’ordre de l8,4 Mds€, qu’avait contractée l’Unédic pendant la pandémie.
Pour rappel, le décret promulgué le 26 janvier prévoit, tant que le taux de chômage ne dépassera pas 9 %, d’abaisser de 25 % la durée d’indemnisation des demandeurs d’emplois par rapport à leur durée de cotisation avec un plancher à 6 mois et plafond à 24 mois. Des conditions plus strictes qui ne s’appliqueront pas aux intermittents du spectacle ni aux habitants des DROM-COM (départements et régions d’outre-mer, ex-Dom-Tom)).
Chroniquement déficitaire, l’assurance chômage des intermittents devrait disparaître
En 2019, juste avant la crise sanitaire, sur 280 000 intermittents du spectacle, 100 000 avaient été indemnisés par l’assurance chômage (soit plus de 35 %).
Les artistes, les ouvriers et les techniciens du spectacle sont employés via un contrat dérogatoire du droit commun, le contrat à durée déterminé. Ce qui distingue leur régime des autres et constitue un bel avantage, c’est qu’ils ne doivent justifier que de 507 heures effectives de travail pour ouvrir leurs droits au chômage (régis par les annexes 8 et 10 du règlement d’assurance chômage), contre 910 heures pour le reste des salariés.
En outre, leur activité est par nature irrégulière, enchaînant les périodes travaillées et non travaillées selon qu’ils trouvent de l’embauche ou pas. Comme d’autres. Mais eux ont la possibilité de cumuler les CDD sans restriction de temps ni d’espace, et de toucher des indemnités pour chacun isolément, sans prendre les autres en considération. Comme le révèle l’Unédic elle-même, 95 % des intermittents cumulent salaires et indemnités (qui atteignent 42 % de leur revenus) au cours d’une même année.
Pendant la crise sanitaire, ceux-ci ont encore eu droit à un régime spécifique avec le dispositif de l’année blanche, dont le coût a dépassé le milliard d’euros et qui leur a permis de voir prolonger leur durée d’indemnisation après épuisement de leurs droits de mars 2020 à décembre 2021.L’étude détaillée des chiffres fournis par le ministère de la Culture montre d’ailleurs une augmentation de la proportion d’intermittents n’effectuant aucune heure de travail en août (un tiers des artistes et 40% des techniciens) et en janvier.
Jamais, à aucun moment depuis 2006, le système n’a été à l’équilibre, les dépenses atteignant 1,2 Mds€ jusqu’en 2018 puis augmentant à 1,4 Mds€ en 2019 quand les recettes ont plafonné à 200M€ jusqu’à la même date puis ont été portées à 400 M€.
En somme, le système d’assurance chômage des intermittents du spectacle constitue une rupture flagrante d’égalité devant les charges publiques, principe pourtant garanti par la Constitution. Aussi faut-il recommander sa suppression pure et simple, maintes fois envisagée mais jamais concrétisée. Cette réforme pourrait d’ailleurs s’accompagner du relèvement global du nombre d’heures travaillées pour éviter les désincitations au travail dans d’autres métiers saisonniers comme ceux de la restauration ou du tourisme.
Le relèvement actuel des comptes de l’Unédic ne doit pas faire oublier les nombreuses années que prendra le remboursement de sa dette (et notamment de sa dette covid) ainsi que le poids des charges sociales en France qui frappent durement la compétitivité de nos entreprises. Aligner le régime des intermittents sur le régime général ne fera pas pour autant disparaître le nombre d’allocataires ayant droit à une indemnité chômage, mais il permettrait au moins de faire des économies. Une réforme plus efficace consisterait à revenir à un véritable régime assurantiel, où chacun cotiserait pour soi.
5 commentaires
L’idéal serait que chacun cotise pour son assurance chômage, et que chacun cotise pour sa retraite, en résumé responsabilisé les gens. Apres tout chacun cotise pour assurer sa maison, sa voiture…. Ras le bol que ceux qui bossent, investissent, prennent des risques… se voit privé du fruit de leur courage, pour subventionner une minorité qui a décidé que le travail était nuisible…. De plus, il faudrait créer un organisme unique de distribution d’aides sociales, que ce soit contrôlé, et plafonné, parce qu’il est anormal, que à tout cumuler, de plusieurs distributeurs, certains gagnent plus que celui qui va bosser, souvent un métier pénible, pour un trop petit salaire…
Ce régime est une façon de faire supporter aux salariés une partie du coût de la politique culturelle du pays.
Chère Madame,
Oui vous avez tout fait raison, c’est un pan déguisé de l’Etat culturel.
Bien à vous,
L’intermittence est une escroquerie car on « n’assure » pas un évènement prévisible: on provisionne!
Les intermittents, comme le nom l’indique, savent très bien qu’ils ont des périodes d’Inactivité, donc ils doivent anticiper en provisionnant les moyen de traverser ces périodes: soit en prévoyant un 2e emploi complémentaire soit en facturant leurs prestations qui leur permette d’avoir les moyens de traverser ces périodes d’inactivité.
Résultat de la situation actuelle: Lors d’une promenade en bord de mer je me suis trouvé à proximité de 2 personnes dont j’entendais les propos « Ma période intermittence se termine, je vais bientôt devoir reprendre un travail… »
Conclusion: Les « littéraires  » qui ont le pouvoir savent piller ceux qui créent la richesse pour être indulgents avec les « leurs ».
pourquoi ne pas instaurer une caisse alimentée par eux à la manière du chomage intempérie existant dans le BTP. alimenté par les bénéficiaies du travail des artistes et connexes ce serai normal, sans légiférer et instaurée par les professions concernées