La productivité du travail a fortement ralenti au cours des quatre dernières décennies en France et dans les pays de l’OCDE, les gains de productivité étant passés, en effet, d’un niveau annuel moyen compris entre 3 et 5% dans les années 70 à moins de 1% actuellement. Il s’agit d’un ralentissement généralisé lié à la tertiarisation de l’économie et à sa désindustrialisation, mais dont l’ampleur est cependant inégale entre les territoires d’une même nation.
Selon les principes classiques ricardiens, les gains de productivité d’une zone géographique sont d’autant plus élevés que celle-ci est spécialisée dans un secteur à forte croissance de productivité ou que sa structure d’emploi se modifie, faisant place à de nouveaux secteurs à haut niveau de productivité.
Aussi, dans de nombreux pays, la croissance est-elle vécue inégalement selon les régions ; en particulier en France, où l’Île-de-France est la véritable locomotive de tout l’appareil productif national.
Vue d’ensemble
La France conserve un taux de productivité satisfaisant mais depuis les années 2000, elle s’est faite distancer par les Etats-Unis et la Suède, comme le montre le tableau suivant :
Notre pays se démarque par la grande concentration géographique de la croissance de sa productivité, en Île-de-France plus précisément. Il est le seul des pays développés où une région affiche un taux de croissance supérieur à 1% par an. La retrancher des statistiques pendant, par exemple, la période 2000-2016, reviendrait à ôter 4 points de pourcentage de la croissance de la productivité nationale. En Allemagne, en Espagne, en Italie et aux États-Unis, la croissance de la productivité est tirée par un groupe de régions important et freinée par les autres, le Royaume-Uni et la Suède étant sur un modèle plus proche du nôtre, avec une région centre motrice.
Le Royaume-Uni a vu diminuer l’influence du grand Londres avec la crise de 2008, à l’inverse de la Suède où la région de Stockholm a dopé la productivité après la crise. En Allemagne, ce sont les Länder de l’Est et la Bavière qui ont le plus contribué aux gains de productivité nationaux. En Espagne et en Italie, un rôle identique a été tenu par la Catalogne, la Galice, la Lombardie et la Campanie.
Le degré de concentration géographique des gains de productivité est très disparate selon les secteurs d’activité et les pays. Dans l’industrie manufacturière elle est ainsi plus concentrée en Allemagne et en Espagne mais mieux distribué dans les autres pays. Dans l’immobilier et les services, on trouve une surreprésentation des régions les plus productives en France, au Royaume-Uni et en Suède, à l’inverse des autres pays où celle-ci est mieux répartie.
Les services et les dynamiques intrasectorielles sont les deux éléments moteurs de la productivité nationale
Parmi les onze secteurs de l’économie, quatre concentrent la majeure partie des gains de productivité : les services non-marchands ; les activités scientifiques, techniques et administratives ; l’immobilier et le commerce ; les transports et l’hébergement-restauration. Cela est surtout lié au fait qu’ils représentent une part prépondérante des emplois des économies développées (50% en France). Toutefois et à l’exception de l’Allemagne, l’effondrement de l’industrie manufacturière a contribué négativement à l’évolution de la productivité, notamment à cause de sa baisse dans la part de l’emploi total.
En France par exemple, le secteur est passé de 13,7 à 9,6% de l’emploi pendant la période 2000-2017. A partir de 2000, la contribution de l’industrie à la croissance de la productivité devient négative à -0,5 points jusqu’en 2010 où elle redevient positive à un faible niveau (+0,1 points).
Les services non marchands, pendant la période 2000-2017, ont contribué pour 0,2 à 0,3 points annuels à la croissance de la productivité, le secteur de l’immobilier ayant lui aussi été porteur. Le secteur de l’information et de la communication influe positivement sur la productivité partout en Europe mais un peu plus en Suède, tout comme le secteur de la construction, moins productif en France qu’ailleurs. Le tableau suivant montre les détails des évolutions secteur par secteur :
Les gains de productivité au travail peuvent relever d’une dynamique intra-sectorielle, soit la croissance de la productivité dans chaque secteur, ou être liés aux mouvements d’emploi entre les différents secteurs plus ou moins productifs. Par exemple, si l’emploi agricole se déplace vers la construction où la productivité est plus élevée mais où le taux de croissance de cette productivité plus faible, cela contribue à augmenter le taux de croissance de la productivité d’une année sur l’autre mais ralentit la progression une fois l’emploi déplacé.
La France, durant les deux dernières décennies, présente des gains de productivité intra-sectoriels comparables à ceux de l’Allemagne, au-delà de la moyenne de la zone euro mais en dessous de la Suède et des États-Unis. Pour une progression de la productivité horaire annuelle de 1% en moyenne, les gains de productivité intra-sectoriels y contribuent pour 1,4 point alors que la réallocation de l’emploi vers des secteurs moins productifs de l’économie a tendu à la ralentir. La force des impôts de production a continué à défavoriser les secteurs où la croissance de la productivité est forte, comme l’industrie. L’indice de réallocation de l’emploi, très faible en France, est un second frein à la croissance de la productivité puisque le mouvement des travailleurs des entreprises les moins productives vers les entreprises les plus productives est entravé par la règlementation. La littérature économique explique cette faiblesse en grande partie par une législation trop contraignante du marché du travail.
En somme le génie créateur de notre pays nous préserve d’un catastrophique affaissement de notre productivité. Toutefois, le processus de désindustrialisation n’ayant pu être conjuré depuis la fin des années 80, tout un pan de notre économie, moteur de la croissance de la productivité, demeure en déshérence. En cause, les impôts de production et le matraquage fiscal des entreprises, qui rognent leurs marges et les empêchent d’investir. Deuxième problème, le droit du travail, qui bloque le mouvement naturel des travailleurs vers les secteurs les plus productifs de l’économie et les confine à une attitude passive, les dissuadant de prendre le moindre risque. Une attitude néfaste pour la croissance desdits secteurs, les plus influents pour la croissance de la productivité nationale.
3 commentaires
Cela fait 30 ans que j’entends cette musique là sans que Rien ne change au contraire les prélèvements ne font qu’augmenter. Si ce n’est l’Etat c’est les collectivités locales. C’est un peu comme les couches stratosphériques de la République à chaque mandat Présidentielle il y a quelques couches supplémentaires. Un gros bourbier Républicain qui nous amène petit à petit dans un système sous développé, les migrants aidant en cela pour faire face à l’égalité à obtenir le même niveau social et intellectuel. Reste un autre frein et non des moindres qui est celui de l’assistanat. Faites le calcul que la grande majorité de ouvriers a déjà fait RSA + Primes + CMU + logement gratos + énergie payée par les collectivités locales + accès à tous les resto dits du Coeur, offre un meilleur cadre de vie que celui qui va bosser pour le minimum social et qui doit se payer une voiture + assurance + carburant + mutuelle + remboursement minimum en cas de maladie + énergie + loyer .. etc. Pourquoi croyez-vous que certaines entreprises ne trouvent pas de main d’oeuvre ? Seul objectif se faire embaucher par un service public, salaire garanti, aides sociales, rendement minimal, pas de stress, beaucoup de vacances et de RTT, restaurant communal ou l’on y mage pour quatre sous, etc. Même le corps médical en est venu à ce minimum social du rendement bien rémunéré bien entendu. Seul les pays communistes ont de telles organisations. Hélas, la grande majorité des Français se complaisent dans cette organisation comme d’ailleurs la majorité des étrangers qui viennent en France. C’est une roue sans fin qui tourne, tourne sans plus jamais s’arrêter autrement qu’a travers de gros bâtons dans les roues.
Le seul responsable est l’assistanat tous azimuts. Le reste c’est de la prose pour vierges effarouchées !!! ou profiteurs stériles invertébrés !!!
D’accord avec ce qui précède. Le rôle des syndicats, trop souvent politisés, n’est pas neutre dans cette situation. Peu représentatifs, ils imposent la loi du TOUJOURS PLUS (pour certains) à une majorité de non syndiquée… qui paye la note.
L’exemple des éboueurs de Marseille, ajouté aux grèves de transport (SNCF en tête) est à ce titre assez symptomatique. Leur train de vie est financé par la manne publique. Qui sait qu’ils sont propriétaires de châteaux ? Les ouvriers connaissent-ils le montant des salaires et avantages payés à leurs cadres ? A quand des syndicats financés par les seules cotisations de leurs adhérents (totalement déductible des impôts) ?