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Les recettes du contrôle fiscal augmentent: positif ou négatif ?

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Les recettes des contrôles fiscaux approchent 11 milliards d’euros en 2019, en dehors des rentrées dues au solde des régularisations de comptes étrangers (STDR). C’est 3,2 milliards de plus qu’en 2018. M Darmanin s’en félicite et en fait une victoire. Pourtant ce gain est le fruit de moyens déloyaux comme le data mining qui consiste à éplucher les comptes sociaux des contribuables à leur insu. Ce procédé aurait rapporté 785 millions d’euros aux caisses de l’Etat l’an dernier.

C’est aussi le résultat de la loi anti-fraude votée fin 2018 qui a renforcé la pénalisation de la fraude et de la loi ESSOC sur le droit à l’erreur, étendue aux contrôles sur pièces, qui a permis de faire rentrer plus vite les redressements régularisés « volontairement » par le contribuable durant le contrôle fiscal. Mais cette procédure apparaît aussi comme une forme de chantage des services de contrôle qui incite à reconnaître l’erreur pour éviter au contribuable d’être pénalisé.
Certes, il est tout à fait normal et souhaitable de traquer la fraude qui est toujours un avantage pris par un contribuable au détriment des autres. Mais faut-il pour autant se glorifier de l’augmentation du produit des contrôles fiscaux ?

Des résultats peu performants

S’il s’agit de faire la course aux pays dont les contrôles rapportent le plus, la France n’est pas gagnante. La Cour des comptes constatait en décembre dernier que « les données relatives aux résultats financiers du contrôle fiscal font apparaître la modestie relative des résultats français au regard de ceux des homologues étrangers. En effet, les montants collectés en France au titre du contrôle fiscal sont 2,5 fois moindres qu’en Allemagne et deux fois moindres qu’au Royaume-Uni en 2018 ». La hausse des résultats de 2019 vient réduire cet écart, mais celui-ci reste important :

Résultats du contrôle fiscal en Md€ collectés par an, (taux de change au 1.10.2019)
2013 2014 2015 2016 2017 2018
France 10 8,5 9,5 8,6 8,1 7,8
Royaume-Uni 10,28 11,01 10,11 11,58 11,56 14,72
États-Unis 46,87 44,23 36,58 41,13 38,31 44,23
Allemagne 18,12 20,05 18,33 16,04 19,83 19,02
Source : Cour des comptes avec attachés fiscaux

Avant 2019, les montants collectés ont baissé de 22 % entre 2013 et 2018 en France alors qu’ils augmentaient dans les autres pays, à l’exception des États-Unis où les montants collectés ont reculé de 5 %. L’année 2019 ne serait donc qu’un simple rattrapage sur lequel M Darmanin, comme à son habitude, manie la communication à merveille !

L’aveu d’échec des contrôles fiscaux

Mais plus fondamentalement, le rendement des contrôles fiscaux ressemble plus à un aveu d’échec qu’à un marqueur de réussite. Si le produit du contrôle est important, c’est que la complexité de la fiscalité conduit à beaucoup d’erreur ou de choix contestables, que l’impôt est contourné tant il est élevé, que la fraude est possible et peut-être facile… Et aussi que les contribuables sont harcelés, surveillés, voire espionnés, ce qui n’est pas fait pour avoir une fiscalité apaisée comme le prétend M Darmanin.
On observe d’ailleurs qu’aux Etats-Unis, le produit du contrôle fiscal en proportion du PIB est près de 30% inférieur à celui de la France. Les lois contre la fraude fiscale peuvent conduire à des peines plus sévères aux Etats-Unis, mais il y en a beaucoup moins. Alors que la France et les États-Unis ont des règles relativement proches en matière de sanction de la fraude fiscale, note encore la Cour des comptes, les sanctions prononcées sont très différentes. Ainsi, 700 à 800 condamnations judiciaires interviennent chaque année en matière de fraude fiscale aux États-Unis, ce qui est peu en comparaison avec la France (500 à 600 condamnations par an pour un pays 5 fois moins peuplé). Mais aux États-Unis presque toutes les condamnations sont assorties de peines privatives de liberté : pour 2018, on y relève 774 condamnations avec un taux d’incarcération d’environ 80 %, pour une durée moyenne d’incarcération de l’ordre de 20 mois. En France, les peines de privatives de liberté sont exceptionnelles en matière de fraude fiscale : au 4 octobre 2019, 19 personnes définitivement condamnées étaient incarcérées et 5 personnes étaient détenues sous le statut de prévenu (détention provisoire ou jugement non définitif).

Il y aura toujours des tricheurs. Mais la meilleure solution est sans doute dans une simplification significative de la fiscalité en même temps que dans son allègement. Aux Etats-Unis, les prélèvements obligatoires étaient de 24,3% du PIB en 2018 contre plus de 46% en France (source OCDE). Il y a moins de raison de tricher quand l’impôt est modeste et tolérable. C’est pourquoi il paraît préférable d’avoir un taux uniforme de TVA pour tous les produits et un impôt proportionnel à taux unique et raisonnable sur tous les revenus sans exception. On peut alors mettre en place un système plus sévère pour les grands fraudeurs. Ce serait le meilleur moyen de réduire la fraude et le ministre des Finances pourrait légitimement s’en glorifier.

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2 commentaires

François Audouze 7 juillet 2020 - 9:32 am

fraude fiscale
Président d'un groupe de sociétés, j'ai eu un contrôle fiscal. Le contrôleur, contrôlant seulement une société, a contesté des imputations de frais et recettes entre deux sociétés. Elle a donc redressé. Toutes les sommes ont été remboursées par l'autre société. Il n'y a eu aucune amende, mais le contrôleur a pu mettre les sommes redressées dans son bilan personnel de redressement. Il faudrait savoir dans les chiffres de Darmanin ce qui ressort des erreurs d'imputation, qui ne sont pas de la fraude, mais comptées dans les résultats des contrôleurs.

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VANNIER Alain 7 juillet 2020 - 3:13 pm

CONTROLE FISCAL
S'agit-il des recettes réelles ou des notifications ce qui n'est pas la meme chose. J'en veux pour preuve un controle fiscal chez mon employeur de l'époque où je travaillais qui avait reçu une notification de plusieurs millions d'euros. Après contestation tout fut annulé donc zéro euro encaissé.

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