Institut de Recherches Economiques et Fiscales

Faire un don

Nos ressources proviennent uniquement des dons privés !

Journal des Libertes
anglais
Accueil » Lettre ouverte aux participants à la Conférence sociale

Lettre ouverte aux participants à la Conférence sociale

par
99 vues

Chers Vous, qui êtes chargés de trouver des idées pour relancer l’emploi,

Vous avez de nouveau pris rendez-vous ce lundi pour une quatrième Conférence sociale, un grand raout censé vous permettre d’échanger, de réfléchir, et de partager de belles idées, aussi innovantes qu’efficaces, pour inverser cette satanée courbe du chômage.

Je vous écris cette lettre après avoir rencontré plus de trois mille chefs d’entreprises en deux ans, de Bordeaux à Nice, en passant par Lyon, Paris, Quimper… Ce n’est ni une énième complainte se contentant d’énumérer les points qui font de la France un pays terrible à vivre, ni les derniers mots d’un condamné…

Cette lettre est celle d’un patron plutôt heureux, optimiste invétéré, qui a réussi le tour de force de créer plus d’emplois qu’il n’en a détruit ces dernières années ! Si optimiste je n’avais pas été, je n’aurais certainement pas sauvé ma PME mourante, en empruntant deux cents mille euros au bonhomme vert et à ses copains, sous le prétexte fallacieux d’un joli voyage de noces à entreprendre… : doit-on s’étonner qu’il soit plus facile en France d’obtenir un financement- pour partir en vacances, que pour sauver des emplois !?

Cette lettre est celle d’un optimiste, donc ! mais d’un optimiste lassé de croire en vous. Ou, à tout le moins, lassé d’attendre que vous croyiez vous-même en ces rendez-vous.

Il y a un an, le 7 juillet 2014, pour être exact, j’avais réuni quelques amis, entrepreneurs et leurs collaborateurs (en slip), devant le Palais d’Iéna pour que nous exprimions ensemble notre inquiétude devant le peu de sérieux avec lequel les principaux protagonistes préparaient l’évènement. L’heure était grave (déjà), pourtant des syndicats de tous bords multipliaient les déclarations caricaturales en menaçant à tout va de claquer la porte des discussions, alors même qu’elles n’étaient pas entamées ! Aucune nouvelle idée n’apparaissant, nous sommes venus vous rappeler l’urgence de la situation et vous suggérer de prendre des décisions efficaces, simples à comprendre et à appliquer. Bref, des mesures pour relancer l’emploi. Sympas ! nous avions même apporté quelques idées à nous pour vous aider dans votre gamberge collective. C’était un lundi (déjà aussi). Mais le mardi, FO et CGT considéraient avoir gagné la bataille selon un critère bien à eux : ils étaient les premiers à quitter les lieux ! Cette année la CGT fait plus ridicule encore et ne viendra pas du tout ! Leurs représentants ont-ils peut-être décidé de prolonger leur week-end ? Se battre toute une vie pour devenir un représentant syndical d’envergure, mais être fier de claquer la porte quand une occasion de dialogue se présente, voilà une démarche qui défie quand même tout entendement ! Passons…

126 000 chômeurs de plus séparent les deux Conférence sociales

Quinze mois après, que reste t-il de la Conférence sociale de 2014 !? La France compte 126 000 chômeurs de plus… Certes, le CICE vient rendre la moitié de ce qu’ont coûté aux entreprises les augmentations de charges successives, mais c’est trop juste ! Le Contrat génération est un échec, le Code du travail compte deux cents pages de plus (il parait que je ne dois pas me plaindre, c’est de la jurisprudence), soixante mille entreprises meurent toujours chaque année ! Mais, surtout, les entrepreneurs continuent à passer la plus grande partie de leur- journée- à se préoccuper de matières très éloignées de la raison pour laquelle ils s’étaient lancés au départ… Croyez-moi : aucune des trois mille- personnes rencontrées n’a créé sa boîte parce qu’elle était trop forte en droit social ! Une totale réussite. Nous avions peur que l’édition 2014 ne serve à rien. Et je suis triste d’avoir eu raison !

Pourtant, je vous l’ai dit en préambule, je suis un optimiste, disposition sans doute encouragée par cinq années de (léger) bénéfice pour ma modeste société de quarante-huit salariés. Notons au passage que je ne suis pas franchement enclin à en avoir deux de plus ! Notons aussi que je ne sais pas comment vous faites pour garder le moral avec vos bilans financiers successifs. Chapeau ! Je veux y croire, car, pour la première fois, des mesures ont été inventées spécifiquement pour les TPE et PME. Comme si vous veniez de vous constater que ce sont elles, qui ont créé 80% de l’emploi salarié ces vingt dernières années ! Bon ! N’allons pas trop vite, vos initiatives restent sans aucun intérêt. Qui peut réellement croire qu’une aide de 2 000 euros par an pour créer un job ça sert à quelque chose !? Mais quand même…, il y a une prise de conscience…

Des mesures simples et fortes pour aider les TPE !

Vous voulez relancer l’emploi ? La cible à toucher, ce sont les petites entreprises. Vous voulez que l’on embauche ? Demandez à leurs dirigeants pourquoi ils ne le font pas. Contrairement à ce que peut affirmer un Gérard Filoche aux relents de naphtaline, ce n’est pas pour agrandir leur piscine… Bien sûr, la première condition c’est d’avoir un carnet de commandes qui se remplit… A votre tour, ne vous inquiétez pas, on ne vous attend pas pour ça, nous avons parfaitement compris que la visibilité, à laquelle nous avons désormais droit, est à peu près équivalente à celle d’un escargot, aveugle, pédalant dans la semoule. Cependant, si l’affaire nous regarde (en ce qui concerne notre chiffre d’affaires), vous pouvez faire quelque chose pour nos dépenses… Croyez-moi, le « petit patron », que je suis, adorerait savoir combien va lui coûter exactement un salarié dans trois mois. Une fois ce pré-requis établi, deux réponses vous seront faites par mes pairs : si l’on n’embauche pas, ce n’est pas parce que c’est trop cher, et/ou parce que l’on aurait peur des risques qui y sont associés. On peut dire que baisser les charges n’est pas une demande incongrue, qui serait réservée aux libéraux assoiffés de pouvoir et d’argent que l’on nous accuse d’être parfois. Mais il est vrai qu’aujourd’hui un salarié coûte de plus en plus cher et gagne de moins en moins bien sa vie ! À la difficulté d’assumer un emploi s’ajoute donc celle d’un climat social qui se dégrade… Et en ce qui concerne le second point, celui des risques, faut-il vraiment perdre du temps à recommencer à vous expliquer que 3 650 pages de réglementations c’est trop ? Je préfère vous poser cette question philosophique : trouvez-vous normal que, plus une entreprise crée d’emplois, plus elle a de contraintes ! Et donc d’emmerdes !?

Ne perdez pas votre temps… Et cessez de nous faire perdre le nôtre

La Conférence sociale ne doit pas représenter qu’un coup de « com » au service des différents syndicats présents (ou pas) autour de la table. Si elle n’est que ça, alors arrêtez de perdre votre temps ! Ne répondez pas qu’au moins vous prenez plaisir à vous rencontrer, personne ne vous croirait. Votre devoir est d’y trouver des idées neuves, courageuses ! Et, encore une fois, simples. Vous êtes attendus, ne l’oubliez jamais tout au long de cette journée, qui devrait être considérée comme importante.

Avant de vous inquiéter du dialogue social dans nos entreprises, inquiétez-vous plutôt de votre incapacité à dialoguer ensemble ! Laissez la lutte des classes au placard, car le pays est dans une situation alarmante. Et ce n’est certainement pas la faute des entrepreneurs et de leurs collaborateurs qui oeuvrent chaque jour avec courage et optimisme pour pérenniser leur aventure. Et continuer à vivre de belles histoires ! Les Français font leur part du boulot, à vous de faire le vôtre désormais !

Julien Leclercq,
Chef d’entreprise
Fondateur des Déplumés.
Auteur de Journal d’un salaud de patron (Ed. Fayard).
www.salauddepatron.fr

Abonnez-vous à la Lettre des libertés !

Vous pouvez aussi aimer

Laissez un commentaire