Comme nous l’avons déjà souligné, l’Exécutif ne dispose pas de la majorité absolue des sièges à l’Assemblée nationale, ce qui l’empêche d’agir à sa guise. Précisément, il lui manque 44 députés pour atteindre le seuil fatidique des 289 voix.
La majorité cible une cinquantaine de parlementaires siégeant dans des groupes modérés – LR, PS ou l’ex-groupe Libertés et territoires – pour venir, à force de négociations, grossir de manière ponctuelle ses rangs. L’autre solution serait de miser sur l’abstention d’une part substantielle des groupes d’opposition pour arriver péniblement à faire voter le budget dont l’examen commence à la rentrée.
Au titre de l’article 47 de la Constitution, l’Assemblée dispose de 40 jours pour voter le budget, faute de quoi le texte est transmis au Sénat qui a 15 jours pour statuer. S’ensuit une navette parlementaire classique avec la désignation d’une commission mixte paritaire.
Si au bout de 70 jours au total, le Parlement n’a pas adopté le PLF, le Gouvernement peut utiliser la voie des ordonnances, ce qui constituerait une première sous la Ve République. Cette technique avait été souhaitée par le constituant pour éviter le retour de la pratique des douzièmes provisoires, en vigueur sous la IVe République, sortes de crédits additionnels provisoires mensuels demandés en cas de blocage du budget.
Si le président de la République choisissait de dissoudre l’Assemblée à l’automne, pendant l’examen du PLF donc, les délais classiques seraient suspendus et la loi de finances pourrait être adoptée en début d’année 2023. Un tel scénario s’était produit à l’automne 1962, lorsque le général de Gaulle avait dissous l’Assemblée après le renversement du gouvernement Pompidou par une motion de censure.
Il faut également noter la possibilité, en l’espèce, de recourir au 49-3, ce qui constituerait également un risque de faire tomber le Gouvernement en cas de vote d’une motion de censure par l’ensemble des oppositions.
Un vote négatif du PLF, ce qui ne s’est jamais produit à ce jour, serait un évènement tellement grave qu’il reviendrait à délégitimer le Gouvernement et à entraîner une nécessaire dissolution de l’Assemblée. Il s’agirait d’ailleurs d’une excellente stratégie du chaos que le président de la République pourrait être tenté d’utiliser : provoquer une espèce de shutdown (comme aux Etats-Unis quand le Congrès ne parvient pas à voter le budget et que le gouvernement est alors en incapacité de payer son administration), dissoudre et remporter les élections en arguant du blocage de l’Assemblée.
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De toute façon, nous sommes au bord du gouffre et le seul choix que nous avons est de faire un pas en avant. Alors savoir si c’est du pied droit ou du pied gauche ou un saut avec ou sans élan, ça nous fait une belle jambe !!!