Ce livre est bouleversant de beauté, autant dans les descriptions que dans les sentiments. La montagne est idyllique, elle donne envie aux deux jeunes bergers Belej et Arno de grimper toujours plus haut avec leurs troupeaux, de jouer du fifre et de peindre comme le vieux Josip, d’ouvrir grand leurs bras comme la vielle Diana fabricante de fromage et d’eau-de-vie.
Malheureusement des ombres se dressent, celle de l’intuition du vieux Josip conscient que rien ne dure, celle du triomphe de la Belle Industrie, celle de « l’Immense Peine » qui n’évite personne que ce soit sur les hauteurs en fleurs ou dans la vallée industrielle. Certains s’y abandonnent et d’autres vont lutter.
Alors le lecteur ne peut se détacher d’un style envoûtant dédié à l’angoisse du modernisme, à l’inquiétude du progrès incessant, aux signes d’un amour malheureux ou d’une mort proche. Mais chacun des personnages tellement humains contribue, sans l’expliciter, à apporter sa pierre sur les lois de la nature et du cœur. La disparition des rites villageois transforme Arno en un personnage de Giono qui rend la liberté au cheptel enfermé avant de mettre à feu et à sang les « Cent-maisons » et la montagne environnante. Heureusement la volonté de Belej de sauvegarder les ciels étoilés et de Josip d’apprivoiser la mort tout en sublimant la vie vont redonner l’espérance grâce à une exaltation toute mystique. Très beau roman qui se laisse savourer grâce à une force invisible qui ne cesse de diviniser la nature. Un véritable Giono !
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