Au terme du premier tour de la primaire d’EELV, la candidature de Sandrine Rousseau a remporté la deuxième place. Son score inespéré est manifeste de la culture d’une époque de tous les excès.
« Ce que je peux vous dire c’est que de la colère, j’en suis remplie. Ce que je peux vous dire, c’est que de la radicalité, j’en suis pétrie ». Cette déclaration de Sandrine Rousseau le 21 août 2021 à l’occasion de l’Université d’été des Verts illustre assez bien le sentiment de démesure qui anime la finaliste de la primaire d’Europe Ecologie Les Verts. Une démesure qui étonne et détonne dans la culture politique qui est la nôtre. La vie politique française est en effet animée de plusieurs courants philosophiques qui se croisent, s’enrichissent, s’affrontent, pour construire le fil de la longue histoire qui est la nôtre. En bonne place parmi ces courants figure l’aristotélisme, qui valorise la tempérance. Il peut dès lors s’avérer amusant et instructif d’imaginer Sandrine Rousseau à la place d’Alexandre Le Grand, recevant l’enseignement du philosophe grec.
Aristote commencerait probablement son discours en valorisant les sciences politiques comme les plus grandes des sciences pratiques, à la fois « science suprême et architectonique ». Dès lors, seule une humanité modèle est digne d’exercer un tel pouvoir. Le philosophe dresserait alors la liste des qualités dont doit faire preuve le politique :
Ceux qui se destinent à occuper les magistratures suprêmes doivent posséder trois qualités : d’abord, un réel attachement à la constitution établie, ensuite une très grande capacité à régler les affaires de leur charge et, en troisième lieu, une valeur morale et un sens de la justice adapté, dans chaque constitution, à la forme du régime en vigueur.
Si l’on examine ces premières qualités, on trouve l’attachement à la constitution établie, ce qui renvoie par la même occasion à l’attachement pour sa Cité mais également à ses lois : une bonne société politique est une société ordonnée. Le politique devra également allier la vertu aux compétences afin que ses actions soient dirigées selon la « droite raison ».
Le grand homme serait bien en peine face au sens de la justice de Sandrine Rousseau, qui l’incite par exemple à inverser la charge de la preuve lorsque c’est une femme qui est victime d’agression. Concernant l’attachement à la constitution établie, on est également bien loin du compte, puisque la candidate écologiste veut opérer une répartition des richesses à la soviet en instaurant « un taux d’imposition marginal important », inspiré de Mitterrand qui l’avait mis à 80%. Cela revient tout bonnement à éradiquer les riches, ce qui est en fait assez logique puisque pour elle « le danger ce sont les riches » ; tout cela, pense-t-elle, pour le plus grand Bien de la démocratie.
Or que lui révèlerait Aristote à ce sujet ? Que la démocratie « ne peut exister et subsister sans une classe riche et une classe populaire. Du jour où l’égalité des fortunes se trouve réalisée, c’est nécessairement un autre type de constitution qui s’instaure, si bien qu’en détruisant l’une de ces classes avec la loi qui exagère la tendance du régime, on détruit en même temps la constitution ». Et de préciser que la grande erreur de la démocratie serait de tomber aux mains des démagogues, qui par leurs attaques contre les riches, diviseraient la société en deux camps au lieu d’œuvrer à son unité. A bon entendeur.
A ces trois premières qualités, Aristote en ajouterait une autre : « la culture générale ». En effet, il apparait qu’on ne peut exercer un bon jugement qu’en ayant une certaine hauteur de vue alliée à la connaissance du sujet en question ; dès lors, la politique recouvrant de très nombreux aspects, l’homme politique devra être doté d’une solide culture générale pour répondre au mieux aux nombreuses situations qu’il aura à rencontrer. Là encore, ce n’est pas exactement la sensibilité de Sandrine Rousseau, qui ne voit le lieu de formation qu’est l’école qu’à travers « ses fonction d’inclusivité et d’émancipation ».
Une cinquième qualité nécessaire à la politique serait la tempérance. En effet, en proie aux passions, l’homme ne se maitrise pas et est incapable de raisonnement. Il ressort de tout ceci que le bon jugement politique sera l’apanage des hommes « dont les désirs et les actes sont conformes à la raison ». Les propos de Sandrine Rousseau aux journalistes de Charlie Hebdo laisseraient donc l’auteur des grandes Ethiques songeur : « Le monde crève de trop de rationalité (…). Je préfère des femmes qui jettent des sorts plutôt que des hommes qui construisent des EPR ».
La colère et la radicalité que Sandrine Rousseau place en moteur de son engagement politique démontrent non seulement une absence totale d’équilibre, mais manifestent une crispation face à la moindre contrariété (et je n’écris pas cela parce qu’elle est écoféministe…). Cette disposition n’est certainement pas celle qui a permis à notre civilisation de rayonner au cours des siècles. Depuis la Grèce antique, l’attitude qu’il convient d’adopter pour assurer la prospérité d’une Cité est conforme à celle décrite par Périclès dans son Oraison funèbre de 431 avant Jésus-Christ : « Notre cité dans son ensemble est l’école de la Grèce et, à considérer les individus, le même homme sait plier son corps à toutes les circonstances avec une grâce et une souplesse extraordinaire. (…) Athènes est la seule cité qui, à l’expérience, se montre supérieure à sa réputation ». Peut-être que la lecture d’Aristote apportera à Sandrine Rousseau la grâce et la souplesse intellectuelles et morales qui lui manquent pour avoir une ambition nationale sérieuse.
Dès lors, même si la fonction présidentielle perd sa respectabilité et sa superbe au fur et à mesure des quinquennats, il est impensable qu’une femme politique si éloignée de tout ce qui a fait la réussite de notre pays puisse endosser un rôle de premier ordre en France.
6 commentaires
Sandrine Rousseau, ou l’hubris politique
Tous les fanatismes qu’ils soient islamique ,féministe, écologique , de droite ,de gauche ou autre ont pour résultat le provoquer des guerres et d’exacerber les oppositions. Ils sont néfastes au bonheur des peuples .
Tous les extrémistes devraient soigner leur esprit et essayer d’atteindre la sérénité avant de mêler leurs contemporains à leurs problèmes personnels.
Il est bien connu en psychiatrie que « tous les fous ne sont pas enfermés «Â
Carpe diem
Sandrine Rousseau, ou l’hubris politique
Maintenant que les suffrages se sont pratiquement tous exprimés dans le camp écolo, il est temps de donner au succès inespéré de Sandrine Rousseau une explication qui semble rationnelle : en effet, le nombre surprenant des inscrits (120 000= est peut-être bien constitué en grande majorité de personnes anti-écolos qui ont voulu barrer la route au candidat « dangereux » Jadot, en votant pour la candidate repoussoir Sandrine Rousseau qui n’avait aucune chance de remporter quoi que ce soit (y compris la notoriété du parti vert) aux élections présidentielles, et donc aux législatives qui suivent.
Si ça marche, c’était plutôt bien vu.
Sandrine Rousseau, ou l’hubris politique
C’est un malheur du temps que les fous guident les aveugles.William Shakespeare. King Lear… 1606.
Sandrine Rousseau, ou l’hubris politique
Effectivement , il faut espérer que Sandrine Rousseau soit élue à la primaire car comme cela les verts seront éliminés au 1 er tour des présidentielles
Sandrine Rousseau, ou l’hubris politique
A l’heure où j’écris ces mots, Jadot a été adoubé candidat à l’élection présidentielle. J’ai pu voir aux infos toute la déception de S. Rousseau dont je me suis égoîstement réjoui. Comment imaginer qu’une personne tellement sectaire ait pu recueillir près de 49 % des suffrages verts ? Il est vrai que le nombre de votants n’est pas vraiment représentatif.
Sandrine Rousseau, ou l’hubris politique
Bel article; et remise en mémoire fort judicieuse (et plaisante). Sur le fond.
Quant à l’excitée Rousseau, dommage que votre article contribue à la tirer du néant qui lui va si bien.
Sa stratégie marche : existerait elle, sans ses déclarations jacassantes ? ! C’est du « parlez de moi en bien, marlez de moi en mal, mais parlez de moi ». Point, barre…
Mais bon, heureusement, MEME LES ECOLOS se sont rendus compte de la… viditude abyssale de cette personne.
Rideau !