Cette année, le Rassemblement national (RN) s’est fait particulièrement discret sur les élections américaines. Pas de soutien au candidat républicain comme en 2016 ou 2020. Il faut dire que les excès de Donald Trump ne collent plus vraiment avec la stratégie de dédiabolisation du RN mise en place par Marine Le Pen.
Si la présidente des députés RN a félicité Trump pour son élection, ce fut très sobrement. Elle a, sur X (ex-Twitter), souhaité que « Cette nouvelle ère politique qui s’ouvre [contribue] au renforcement des relations bilatérales » entre la France et les Etats-Unis.
Des propos qu’on pourrait qualifier de « diplomatiques ». En réalité, ils ont totalement hypocrites tant l’action du RN à l’Assemblée nationale montre que celui-ci ne tient pas vraiment au « renforcement des relations bilatérales ».
En effet, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, les députés RN ont visé, par leurs amendement, les entreprises américaines. Ainsi, Aurélien Lopez-Liguori, député de l’Hérault, a-t-il proposé de modifier l’article L. 453-70 du code des impositions sur les biens et services afin d’augmenter le taux de la taxe Gafam de 3% à 5% du chiffre d’affaires généré dans notre pays. Le député considère que cette taxe, instaurée en 2019, « a constitué une avancée significative dans la juste imposition de ces entreprises au regard de la valeur qu’elles créent dans notre pays ». Un moyen de réduire le déficit public ? Au contraire, comme l’écrit Lopez-Liguori, dans son argumentation, il s’agit « de mobiliser des ressources fiscales supplémentaires pour le financement des politiques publiques ». Autrement dit, pour dépenser davantage.
Autre exemple avec Jean-Philippe Tanguy, président délégué du groupe RN à l’Assemblée nationale, qui a proposé l’instauration d’une contribution annuelle forfaitaire pour les fournisseurs de contenu et d’applications. Le député RN reprend ainsi l’idée de « fair share » défendue par la Commission européenne et les opérateurs de télécoms. Il vise même, dans son amendement, cinq entreprises en particulier : Netflix, Google, Akamai, Meta et Amazon.
Alors que les Européens, et les Français, s’inquiètent des barrières douanières promises par Donald Trump, en particulier la taxation des importations de vins, spiritueux et autres produits de luxe aux Etats-Unis, le RN ne trouve rien de mieux que de s’attaquer frontalement aux géants américains du numérique. De quoi exciter le futur président américain et l’inciter à vraiment faire ce qu’il a promis.
Avec ses amendements, le RN risque aussi d’appauvrir les Français. Selon les deux députés, les taxes qu’ils proposent d’instaurer ou d’aggraver rapporteraient 1,8 milliard d’euros (550 M€ pour l’amendement de Lopez-Liguori, et 1,3 Md€ pour celui de Tanguy). Une somme qui serait, comme l’Iref l’a montré, en réalité, payée par les Français puisque les Gafam augmenteraient le prix de leurs services. Par ailleurs, si les droits de douane américains sont alourdis en représailles, les entreprises exportatrices françaises en feraient les frais… ainsi que leurs salariés qui pourraient se retrouver au chômage.