La Commission européenne a publié, le 15 décembre, les projets de deux règlements, le Digital Services Act (DSA) et le Digital Markets Act (DMA), qui doivent permettre la mise en œuvre d’un nouveau cadre de régulation des grandes entreprises numériques, les GAFA notamment. L’objectif est de parvenir à l’adoption de ces projets début 2022.
Il faut prendre conscience que ce foisonnement réglementaire que nous inventons sans compter pour nous protéger risque aussi de nous pénaliser.
Le DSA précise les responsabilités des grands acteurs du numérique dans la diffusion de contenus et produits illicites, dangereux ou contrefaits. La haine ou la diffamation en ligne pourront être poursuivies dans des conditions de droit commun et avec une efficacité optimum. Le projet écarte à juste titre la responsabilité primaire des plateformes numériques mais leur demande de dénoncer les propos délictuels et de les refuser ou supprimer. Elles sont ainsi susceptibles de limiter outre mesure la liberté d’expression par mesure de précaution.
On peut aussi s’inquiéter que des entreprises soient ainsi requises de faire justice sans qu’intervienne la Justice. Ne vaudrait-il pas mieux prévoir que des juges de référé immédiat soient disponibles dans chaque pays pour se prononcer sans délai sur les crimes et délits en ligne. C’est le rôle régalien des Etats. Il serait souhaitable de faire évoluer le projet en ce sens.
Mais le DMA est sans doute plus sujet à débat. Il se propose de réguler d’une part les plateformes de marché qu’utilisent les professionnels pour vendre leurs produits et services et d’autre part l’ensemble des services offerts aux consommateurs finaux, notamment les services d’intermédiation en ligne, les moteurs de recherche, les services de vidéeo partagée ou de stockage, y compris dans les nuages, et plus généralement les réseaux sociaux… Il a vocation à garantir que les marchés numériques restent innovants et ouverts à la concurrence, à y faire baisser les prix et à assurer entre les grands acteurs du numérique et leurs partenaires des relations commerciales équilibrées et loyales.. L’étude d’impact de la commission estime que ce règlement pourrait induire une augmenttation de 0,44 à 0,82% du PIB européen d’ici 2030 et que le gain pour les consommateurs pourrait être de 13 Md€. Mais est-ce si sûr?
Au-delà de quelques règles souhaitables inscrites dans le DMA pour favoriser la liberté des clients de migrer hors de la plateforme ou de travailler sans exclusivité, de désinstaller des applications et d’accéder à leurs données, la règlementation entravera l’activité des entreprise numériques. Celles-ci seront empêchées de concurrencer ou permettre que soient concurrencés à partir de leur plateforme les professionnels qui y vendent des produits ou services. Elles ne pourront plus combiner les données personnelles récupérées par elles au travers de leurs services de base avec celles obtenues dans le cadre de tous autres services rendus à des tiers ou au titre des connections des consommateurs finaux.
La concurrence pervertie
La règlementation envisagée va, au risque de très lourdes sanctions, obliger les GAFA à multiplier les procédures de contrôles et les charges de régulation. Ce qui pourrait conduire à augmenter les barrrières à l’entrée de nouveaux concurrents, à l’encontre de l’objectif recherché. Par ailleurs, l’harmonisation des conditions de vente que veut imposer la Commission pourrait réduire la concurrence à une compétition par les prix qui est loin d’être toujours la meilleure.
Certes, seules seront assujetties aux obligations du DMA les entreprises numériques les plus importantes. Mais les critères d’application seront laissés en partie à la discrétion subjective de la Commission pour préserver le niveau d’innovation, assurer la qualité des services et produits digitaux, des prix justes et compétitifs, un haut niveau qualitatif de choix. Les éléments essentiels du marché – prix, concurrence, qualité, innovation, diversité- seraient donc soumis à l’appréciation de la technostructure européenne! L’Europe qui devait préserver la concurrence pourrait ainsi la juguler par un nouvel instrument de planification au prétexte de la favoriser.
Car la concurrence ne se définit pas d’en haut, mais elle a besoin de la confrontation de l’offre et de la demande. Le juste prix ne peut pas être fixé par détermination administrative. Il est celui qui est arrêté par un commun et libre accord entre les producteurs et les consommateurs. Pour ce faire, il faut que les acteurs soient plusieurs, ce que les GAFA sont déjà, souvent en compétition entre eux. Pour accroître les vertus de la concurrence, il vaudrait mieux favoriser la naissance d’autres entreprise numériques européennes plutôt que d’encadrer exagérément les entreprises numériques existantes.
La remise en cause du modèle de développement numérique
En administrant la concurrence, le risque est que le modèle des services numériques soit détruit. Les grandes entreprises du numériques ne peuvent développer leurs prestations qu’en ayant accès à d’innombrables données personnelles qu’elles croisent et sans lesquelles elle ne pourraient pas fournir les informations ou organiser les échanges selon le modèle qui a fait leur succès. En même temps, elles ne peuvent offrir leurs services gratuitement aux utilisateurs que parce qu’elles réussissent à valoriser les données des utilisateurs. En régulant toujours plus l’accès à ces données et leur utilisation, les règlements européens et autres législations peuvent anéantir le modèle lui-même ou pour le moins, en rendre de plus en plus difficile la gratuité. Mais les utilisateurs seraient-ils prêts à payer les services qui leur sont proposés ? Et s’ils ne sont pas suffisamment nombreux à accepter de payer pour obtenir le service, celui-ci sera-t-il encore performant alors qu’il repose dans son principe même sur l’obtention des données d’un nombre très important d’utilisateurs ?
Ces règlementations pourraient ainsi faire évoluer de nombreux services numériques de la gratuité vers un marché payant, à des coûts encore indéterminés. Pour le moins il convient de prendre conscience que ce foisonnement réglementaire que nous inventons sans compter pour nous protéger risque aussi de nous pénaliser.
2 commentaires
Ils travaillent pour qui ?
Les GAFA ! Il faut faire comme en Chine ils ont bien réussi à les maîtriser.
Mais l'Europe est comme la France comment réaliser un avenir et conserver sa culture avec une gouvernance de fonctionnaires gauchistes caviar. Vous savez ce ramassis d'escrocs qui se disent de gauche pour mieux se moquer de la population et pour s'en mettre plein les poches. J'ai quelques souvenirs de ces escrocs de l'Europe qui se sont acheté des appartements en bord de mer sur les fonds Européens, les ont entretenus sur les mêmes fonds pour les revendre à titre personnel une fois en retraite à 50 ans …. qui peut faire mieux que le public avec de l'argent sans contrôle ? Un chef d'entreprise irait en prison là ce ne sont que des fonctionnaires qui de plus est ne payent pas d'impôts.
Certes un peu hors sujet mais pour démontrer que ces voyous ne travaillent pas pour la société mais pour leur poire et des GAFA ils n'en ont que faire tant que cela ne touche pas leurs intérêts.
concurrence et EUROPE
La profusion de règlements déjà concoctés par l'Europe et la façon dont notre pays les a toujours assortis de complications supplémentaires devrait nous inciter à la prudence et à une vigilance accrue quant à ce qui se trame actuellement.