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Le Rassemblement National ou les extrêmes contre les « valeurs républicaines » ?

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Il ne s’est pas passé une journée durant la campagne législative sans qu’un homme politique d’Ensemble, de la gauche ou de l’extrême gauche ne brandisse les « valeurs républicaines » pour combattre le Rassemblement National. L’incantation de ces valeurs n’a pas cessé après le second tour afin de tenter de trouver les bases d’une coalition viable de nature à gouverner le pays. Ainsi, Emmanuel Macron a appelé dans sa lettre aux Français du 10 juillet à la construction d’un nouveau rassemblement autour de « valeurs républicaines claires ». Entre les deux tours, le Premier ministre Gabriel Attal avait indiqué qu’un candidat d’Ensemble en troisième position dans une circonscription au premier tour se désisterait en faveur d’un candidat défendant « les valeurs de la République ». Marine Tondelier, la secrétaire nationale d’Europe Ecologie Les Verts, avait usé exactement de la même expression. On pourrait multiplier les exemples.

Mais qu’est-ce donc que ces « valeurs républicaines » ? Le sujet nous est venu à l’esprit à la lecture de l’article de notre maître en libéralisme, Jacques Garello dans La Nouvelle Lettre ( « Les valeurs de la République : une référence utile », 2 juillet 2024). Mais comme l’élève veut toujours surpasser le maître (horresco referens !), nous nous permettons avec force audace de livrer les présentes réflexions en nous fondant sur un rapport synthétique du Conseil des sages de la laïcité, un organe créé en 2018 (« Que sont les principes républicains ?, juin 2021).

Les valeurs de la République

Deux articles de notre Constitution au sein du titre sur la souveraineté traitent principalement de la république. Selon l’article 1er, la République française est « indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Selon l’article 2, sa devise est « liberté, égalité, fraternité » et son principe est « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Reprenons ces différents éléments :

  • Depuis 1792 se trouvent proclamées l’unité et l’indivisibilité de la République, ce qui signifie que la loi doit être la même pour tous sur l’ensemble du territoire et que tout fédéralisme est prohibé. En pratique, la Révolution, puis Napoléon ont parachevé la volonté centralisatrice de l’Ancien Régime.
  • La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 a consacré la laïcité en garantissant les libertés de conscience, de culte et d’expression.
  • La république et la démocratie sont indissolublement liées, et la souveraineté nationale s’affiche comme un principe essentiel que nul ne peut s’accaparer.
  • Depuis le milieu du XIXe siècle, la république est aussi sociale, ce qui permet de faire un lien avec la solidarité consacrée par le Préambule de la Constitution de 1946 et la fraternité révolutionnaire.
  • Mais les valeurs de la République se caractérisent surtout par la devise inscrite aux frontons des bâtiments publics depuis 1880 et entérinée constitutionnellement en

1946 : liberté, égalité et fraternité, là encore indissolubles.

Le Rassemblement National contre les « valeurs républicaines » ?

De prime abord, le RN ne semble pas respecter les « valeurs républicaines » : l’extrême droite s’oppose à la liberté dans de nombreux domaines ; elle porte atteinte à l’égalité en effectuant des distinctions arbitraires entre les personnes sur le même territoire ; et conséquemment elle mine la fraternité.

Mais, en y regardant de plus près, elle ne s’oppose pas aujourd’hui à toutes les valeurs républicaines :

  • Elle ne rejette pas l’ensemble des libertés, ainsi quand elle souhaite la suppression des éoliennes ou qu’elle prône la baisse des droits de succession.
  • Elle ne rejette pas par principe la laïcité et elle lutte même contre le fondamentalisme religieux, fût-il limité au plus dangereux : l’islamisme.
  • Elle partage une conception très centralisatrice de l’organisation de l’État.
  • Enfin, elle magnifie la République sociale, mais de manière parcellaire, en conservant, pour ne pas dire en amplifiant, l’État providence, mais en voulant le réserver aux « Français de souche » et éventuellement aux étrangers en situation régulière.

Il est à peine besoin de souligner que le RN respecte la souveraineté nationale en sa qualité de parti souverainiste.

Qu’en est-il de l’extrême gauche ?

La gauche et l’extrême gauche, toujours moralisatrices, se drapent dans les « valeurs républicaines », dont elles tentent de s’octroyer le monopole, pour combattre l’extrême droite, voire la droite nationale. Mais l’extrême gauche tout particulièrement est-elle bien placée pour donner de telles leçons ?

Même s’il paraît moribond, le Parti communiste français ferait partie de ce que certains (peut-être pas tous des flèches…) nomment « l’arc républicain ». Il est étrange qu’un mouvement qui a justifié tous les totalitarismes au XXe siècle échappe à la vindicte contre les partis extrémistes et qu’il soit considéré encore comme fréquentable. Mais c’est le cas de La France Insoumise qui monopolise l’attention.

LFI respecte-t-il la devise de la République ? A l’évidence, nullement :

  • LFI détruit la liberté du fait de son autoritarisme, de son interventionnisme tous azimuts et de l’arbitraire qu’il décline dans tous les domaines.
  • Elle détruit l’égalité en droit au profit de l’égalitarisme.
  • Elle détruit la solidarité en attachant son nom à une solidarité uniquement légale et spoliatrice.

LFI ne respecte pas plus le principe de la souveraineté nationale puisqu’il tente, au mépris de la Constitution, de s’en attribuer le monopole par sa prétention à représenter seule le « peuple ».

Sa volonté d’instaurer en France une démocratie populaire s’oppose aussi à la notion de république sociale. Si celle-ci n’est pas la république libérale, elle n’est pas plus une république socialiste et encore moins une république communiste.

Ajoutons que les déclarations renouvelées de ses cadres appelant à faire pression sur le Président pour désigner un Premier ministre issu de ses rangs, l’idée de « marcher sur Matignon » afin de faire plier le pouvoir, la violence verbale quotidienne sont totalement incompatibles avec les « valeurs républicaines ».

Il est donc surprenant que les médias et les intellectuels, sauf exceptions, ne relèvent pas cette incompatibilité. Il est également stupéfiant que certains syndicats, à commencer par la CGT, épousent les thèses de LFI, alors même qu’ils violent chaque jour l’obligation de neutralité qui s’impose aux organismes publics et à leurs agents en vertu des mêmes principes républicains…

Les « valeurs de la République » sont-elles indiscutables ?

Le Conseil des sages de la laïcité, dans le document cité en liminaire, souligne que la République combat l’inégalité des chances et « vise la justice sociale », et qu’elle a successivement inscrit au plus haut niveau normatif les divers droits économiques et sociaux, puis environnementaux. Or, les libéraux ne comprennent la devise républicaine que de la manière suivante :

  • La liberté en tout
  • L’égalité en droit
  • La fraternité spontanée

Ils rejettent les droits économiques et sociaux comme des « faux droits » et la notion de « république sociale ». Ils considèrent la « justice sociale » comme un non-sens. Ils ne partagent pas l’idée d’une unité et d’une indivisibilité de la République car ils défendent la subsidiarité et la concurrence entre les collectivités locales. Enfin, ils ne sont pas des démocrates purs, mais ils défendent le concept de démocratie libérale qui permet d’enserrer la démocratie et de limiter le domaine du politique.

Il n’y a donc pas lieu de faire des « valeurs républicaines » un totem ou, à tout le moins, il convient de les comprendre d’une certaine manière.

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5 commentaires

Essentielliste 15 juillet 2024 - 4:22 pm

J’ai bien lu la copie de l’élève J.P Feldman sur le sujet des » valeurs républicaines » et je
pense que notre maître Jacques Garello ne lui accorderait qu’à peine la moyenne… et
encore ce n’est pas sur.
Notamment lorsqu’il affirme que les « libéraux » ne partagent pas l’idée d’une « indivisibilité de la République »
car » ils défendent la subsidiarité et la concurrence entre les collectivités locales »
.
Il faudrait nous donner des explications crédibles à cette assertion.

Enfin et pour être bref, les libéraux ne seraient pas des « purs démocrates » puisqu’ils défendent le concept de « démocratie libérale »qui « insère la démocratie et limite le domaine du politique » (sic).

Une prise de position qui vaudrait bien faire l’objet d’une thèse et son argumentaire documenté
On va demandé à Monsieur Jacques Garello son point de vue.

Enfin je constate, au passage, sous la plume de MR. J.P. Feldman que le RN qu’il qualifie systématiquement « d’extrême droite » est un parti dont la politique est conforme à la « démocratie libérale ». ouf !
Alors même que ce ne sont que des « extremistes » puisque probablement ce ne sont pas des « démocrates purs »

Alors, sont-ce des démocrates impurs ? nous aimerions recevoir une clarification .
Il faudrait que l’auteur nous disent ce que sont les « démocrates purs » par rapport aux « impurs »
Les socialistes de monsieur Faure sont-ils des « démocrates purs », quant aux communistes sont-ils purs
ou impurs ? et les « Renaissance » et autres « ensemble » sont-ils bien purs ?

Je remercie J.P. Feldman de nous éclairer sur ces points fondamentaux
Remerciements.

Essentielliste

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Mathieu Réau 15 juillet 2024 - 5:23 pm

C’est intéressant de vous voir reconnaître que vous n’êtes pas des « démocrates purs » : j’avais encore clairement ce sentiment en lisant l’un de vos anciens articles…
Inutile de préciser que je suis en parfait désaccord avec la conception que vous vous faites de la République, naturellement, Française en particulier.

Répondre
Mathieu Réau 15 juillet 2024 - 5:25 pm

« Il est donc surprenant que les médias et les intellectuels, sauf exceptions, ne relèvent pas cette incompatibilité. »
Il est plutôt surprenant que cela vous surprenne puisque presque tous les intellectuels et médias, publics ET privés, sont de gauche, dans ce pays, vous l’aurez remarqué…

Répondre
Esssentielliste 16 juillet 2024 - 11:25 pm

Je constate que mon commentaire parfaitement civique et courtois, en réaction à l’article de Mr. Feldman
laissant entendre que « le RN ne respecte pas toutes les valeurs républicaines n’a pas été repris et donc a été censuré par l’IREF.

En effet j’ai mis en quelque sorte un doute sur l’affirmation de l’auteur nous expliquant que ce parti s’oppose à la liberté dans de nombreux domaines, qu »il porte atteinte à l’égalité entre les personnes en faisant des distinctions entre les personnes sur le même territoire, et conséquemment il mine la fraternité »(sic).

Cette position pose problème car cela signifierait que toute personne entrant sur le territoire de façon illégale devrait avoir les mêmes droits que les citoyens qui paient leurs impôts et se conduisent en respectant les lois de la République.

Enfin prétendre que les « libéraux ne sont pas des démocrates purs »,car, notamment,t ils ne partagent pas le principe de « lINDIVISIBILITE » de la République au motif « qu’ils défendent le principe de la subsidiarité et de la concurrence entre les collectivités locales » (sic)
Ceci constitue une pétition de principe qui, pour le moins est contestable.

Une raison de plus de ne pas censurer ma réponse

J’entends faire entendre ma voix en application de la liberté de parole qui me semble constituer un des
objectifs fondamentaux de l’IREF que par ailleurs je soutiens, et demande que ma précédent commentaire
soit publié dans votre rubrique « commentaires ».

Merci de votre attention
Essentielliste

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Jean-Aymar de Sékonla 21 juillet 2024 - 9:14 am

On peut discuter longtemps sur nos valeurs républicaines mais il faudrait d’abord admettre qu »elles ne s’appliquent qu’à la République française et non au monde entier.
Mais plus urgent, il faut s’attaquer à la malhonnêteté intellectuelle du monde politique. Exemple:
On entend à loisir: « 2/3 des français n’ont pas voulu du RN »
Mais on n’entend pas:
« 2/3 des français n’ont pas voulu de NFP »
« 2/3 de français n’ont pas voulu de « Ensemble »
Probablement pour masquer l’immonde magouille des désistements, ou le seul programme qui unissait était de faire perdre le vainqueur… c’est cela être « républicain »?
Écœurant!

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