Lorsqu’il s’agit de parler d’inégalités, l’unanimité règne. Elles ne cesseraient de se creuser et pour les diminuer, il n’y a que deux solutions : augmenter l’impôt des riches et redistribuer encore plus. L’Etat est là pour compenser les écarts de revenus et répondre aux chiffres alarmistes lancés par les politiques, les médias ou les organisations non-gouvernementales comme Oxfam. L’étude attentive des donnés peut néanmoins fournir des informations différentes. C’est ce qu’a fait l’IREF plusieurs fois en attirant l’attention sur le caractère pernicieux des statistiques publiées par Thomas Piketty, pourtant reprises telles quelles par les journalistes. Et c’est ce que font ces jours-ci deux économistes, Phil Gramm et John Early qui, eux, décortiquent en détail les données officielles du Census Bureau, l’institut de statistiques américain. Leurs conclusions vont complètement à l’encontre du discours à la mode sur l’augmentation des inégalités.
Aux Etats-Unis, 1900 milliards de dollars redistribués sous forme d’aides n’entrent pas dans le calcul des revenus
Ils montrent que les données du Census Bureau ne comptabilisent pas toutes les aides gouvernementales dans les revenus des bénéficiaires. En 2017, le gouvernement fédéral, les Etats et les villes ont redistribué 2800 milliards de dollars, soit 22% des revenus de l’ensemble des ménages du pays. Plus des deux tiers de ces transferts sociaux sont allés à ceux des deux quintiles de revenus inférieurs. Mais le Census Bureau choisit de n’inclure que 900 milliards de dollars dans le calcul des revenus des bénéficiaires. Les quelque 1900 milliards de dollars restants de transferts gouvernementaux ne sont pas pris en compte. Or il s’agit d’aides importantes, notamment Medicare, Medicaid, crédit d’impôt sur le revenu du travail (les bénéficiaires reçoivent un chèque du Trésor) bons d’alimentation (qui permettent d’acheter de la nourriture avec des cartes de débit délivrées par le gouvernement), et nombre d’autres programmes incluant des prestations payées directement par le gouvernement.
Les deux quintiles supérieurs paient 82 % du total des impôts
De plus, les impôts devraient être déduits du montant des revenus, ce que ne fait pas le Census Bureau. Les Américains paient 4400 milliards de dollars par an en impôts fédéraux et locaux. Les ménages des deux quintiles supérieurs y contribuent à hauteur de 82%. Il semblerait logique d’en tenir compte dans les données censées mesurer les inégalités. Si tel était le cas, ces inégalités, n’auraient augmenté, de 1967 à 2017, que de 2,3% au lieu des 21,4% qui figurent dans les statistiques officielles : une différence de près de 90% !
Lorsque toutes ces données sont corrigées et prises en compte, les inégalités se réduisent considérablement. Comme on peut le voir sur le graphique ci-joint qui reflète la fameuse courbe de Gini : la courbe en bleu, officielle, mesure les inégalités sans les transferts (les aides) et sans les impôts et taxes payés par les deux quintiles les plus riches. La courbe en noir les traduit en tenant compte des transferts sociaux et des impôts payés. En réalité, les inégalités n’ont jamais aussi faibles depuis… 50 ans (en 2017 par rapport à 1967).
Les disparités entre les revenus s’accentuent, c’est un fait. Mais selon les deux chercheurs, le revenu réel du quintile inférieur (ajusté en fonction de l’inflation, et compte tenu de la valeur de tous les paiements de transfert, déduction faite des impôts payés) a augmenté, depuis 50 ans, de 300 % ; contre 213% pour celui du quintile supérieur, également après impôt. Ce sont des chiffres comptables, pas idéologiques. D’ailleurs, à mesure que les transferts gouvernementaux aux ménages à faible revenu ont explosé, le taux de participation au marché du travail de ces ménages a baissé. Désormais, les aides d’Etat peuvent atteindre 90% du revenu du quintile inférieur. Ce n’est pas forcément une très bonne chose mais il faut le savoir. Et fausser les chiffres sur les inégalités n’est certainement pas une manière responsable d’aborder le sujet.
8 commentaires
Contrairement aux idées reçues, les inégalités n’ont jamais été aussi réduites depuis 50 ans !
Deux raisons a ce sentiment d’inégalités croissantes :
– d’une part, tout est devenu visible
– d’autre part les politiques en usent et en abusent pour obtenir des voix en suscitant la jalousie
le meilleur exemple en étant l’IRPP : dans un premier temps la suppression de l’IRPP pour une partie des contribuables était porteuse du message « nous réduisons les impôts »; au delà de la moitié des personnes concernées c’est devenu « un cadeau fait aux riches »
Contrairement aux idées reçues, les inégalités n’ont jamais été aussi réduites depuis 50 ans !
Très intéressant mais il faudrait faire la même étude avec les chiffres français.
Le résultat est sans doute au moins identique, mais aiderait à mieux critiquer les conséquences des aides sociales qui représenteraient autour de 12% du montant des aides sociales du monde pour une population d’à peine 1% !
Oh stupeur !
Bravo pour cet article qui enfin remet quelque peu les pendules à l’heure. Comme le commentateur précédent : à quand un indice de GINI « net » au lieu de « brut », pour la France et les autres pays !
Contrairement aux idées reçues, les inégalités n’ont jamais été aussi réduites depuis 50 ans !
Francois Ecalle sur fipeco.fr a ecrit un billet recemment sur la France et les inegalites, qui couvent ces points
Oui & Non: Contrairement aux idées reçues, les inégalités n’ont jamais été aussi réduites depuis 50 ans !
C’est plus subtil que ça
Si on compte comme revenus, toutes les allocations diverses et variées, c’est effectivement le cas.
Le fond du problème vient du fait que contrairement à il y encore 70 ans quand dans les campagnes les gens vivaient relativement bien sans électricité, ce n’est plus possible aujourd’hui.
La période des trente glorieuse a provoqué un Boum Economique et placé les gens dans une situation où actuellement, il est difficile de vivre des minimas sociaux.
Moi-même faisant partie (je me répète mais le redis encore) des 5% de la frange supérieure de la société française, je suis un « bon contributeur » à l’impôt. La crise a favorisé notre classe sociale au détriment du gros de « la masse » située de l’autre côté. L’Etat Providence, à coup de subventions massives à éviter le pire. Mais pour certaines entreprises la conjoncture à fait qu’elles n’ont pas eu besoin de ces aides (je viens d’écouter le PDG de Total) ou plus simplement: mon chauffagiste, par contre certains commerçants ont simplement « crevé ». Il faut savoir ce que l’on veut, une amélioration ou au moins une stabilisation du niveau de vie (ce n’est pas que les revenus mais la situation globale dans laquelle sont les individus) ou un retour au Moyen Âge. Si les campagnes se sont dépeuplées c’est bien suite à l’appel des industriels qui avaient besoin de main d’œuvre en masse. Situation devenue obsolète avec l’automatisation de nombreuses tâches.
Pourquoi des cadres quittent Paris pour s’installer à la campagne et changent carrément de travail.
Parce qu’une petite minorité possédant les moyens, a voulu absolument faire un maximum de profit au détriment du bien être de la majorité des gens. Au départ quand s’est déployé la TSF puis la Télévision, ça partait d’un bon principe: donner accès à la « populace » à l’information en temps réel.
Mais l’homme étant un loup pour l’homme, a toujours dévoyé ces principes pour faire du profit.
L’argent n’est pas une fin en soi, mais juste un moyen.
Contrairement aux idées reçues, les inégalités n’ont jamais été aussi réduites depuis 50 ans !
les egalitariste devrait venir vivre en Inde pour realisé que tous pauvres est le seul system egalitariste stable a long terme et c’est presque aussi horrible que la version staline; pol pot… de l’egalite tous mort.
staline = 30 millions de mort pol pot=30% de mort. il parait que les os sont les meme!
avoir reduit les francais, les allemand au niveau des pauvres de l’europe de l’est ou des grecs est la source du probleme pas la solution
CURIEUSE ANALYSE
Votre analyse me laisse perplexe. Pour quelle raison les statisticiens américains laisseraient-ils de côté 1900 milliards de dollars de transferts gouvernementaux aux ménages modestes ? Toutes les études, y compris celles e l’OCDE, sont basées sur la comparaison des revenus après impôts et des transferts sociaux. Et montrent que les inégalités ont fortement progressé aux Etats-Unis. J’ai l’impression qu’il s’agit là d’une analyse très idéologique. La simple observation de la réalité montre qu’une petite fraction de la population voit ses revenus et son patrimoine augmenter énormément.
CURIEUSE ANALYSE
Oui, les calculs ne tiennent pas compte du totale des aides, ni de tous les impôts et taxes. Il faut dire que le système fiscal américain est extrêmement complexe, ainsi que celui des aides, qui sont d’ailleurs extrêmement nombreuses.
Cordialement,
NL