En 2019, sous la présidence Trump, Kamala Harris a voulu « restructurer » la Cour suprême en augmentant le nombre de juges (au nombre de neuf, rappelons-le, nommés à vie par le président des Etats-Unis) : il y en avait trop dans le camp des conservateurs, il s’agissait, on s’en doute, d’« équilibrer idéologiquement » la composition. Son idée n’a pas eu beaucoup de succès, elle a été oubliée. Elle a ressurgi le 29 juillet, Joe Biden ayant annoncé un plan de « réforme » de ladite Cour. « J’ai supervisé plus de nominations à la Cour suprême en tant que sénateur, vice-président et président que quiconque vivant aujourd’hui, a-t-il écrit dans une tribune publiée par le Washington Post. J’ai un grand respect pour nos institutions et la séparation des pouvoirs. Mais ce qui se passe actuellement n’est pas normal, et cela sape la confiance du public dans les décisions de la Cour, y compris celles qui ont un impact sur les libertés individuelles. Nous nous trouvons maintenant dans une impasse. »
Biden veut soumettre la Cour à un code éthique contrôlé par un organisme extérieur. Or, comme l’explique le Wall Street Journal,  il existe déjà un code de conduite interne, appliqué depuis 1789, année de création de la Cour. Cependant, les juges ne peuvent être destitués que par le Congrès (ce qui n’est jamais arrivé). Biden soutient donc que sa réforme « rétablira la confiance et la responsabilité envers la Cour et notre démocratie ». L’éditorialiste du WSJ explique, lui, qu’elle aurait dans la pratique l’effet inverse. On peut prévoir qu’elle déclencherait un déluge de plaintes pour manquement à l’éthique, qui ne manquerait pas d’être amplifié par la presse et les politiques. Le respect des décisions de la Cour ne pourrait que s’en trouver amoindri, d’autant que les plaideurs pourraient déposer des requêtes en récusation des juges. Et bien entendu, seraient ciblés en priorité les juges émettant des opinions impopulaires, même parfaitement justes. Cela ferait donc de la Cour une caisse de résonance de l’atmosphère politique du moment alors que son rôle, faire respecter la Constitution, doit être totalement neutre.
Quel que soit le bien-fondé éthique et juridique de ces intentions, on peut supposer qu’elles n’ont en l’occurrence pas grand-chose à voir avec la démocratie et plus avec le désir de reprendre la Cour suprême en main. La question de l’équité se poserait-elle avec autant d’insistance à un gouvernement démocrate qui pourrait s’appuyer sur une majorité de juges « progressistes » à la Cour ?
3 commentaires
un peu comme macron qui a le conseil d’etat et constitutionnel et qui lui permet d’éradiquer toute proposition de l’opposition , robinet a du trouver cette formule « intéressante «Â
La question ne s’est jamais posée, vous le savez très bien, tant que la composition idéologique de la Cour Suprême allait dans le sens des obsessions de la gauche américaine. Le fameux arrêt Roe vs. Wade étant un parfait exemple de satisfecit accordé par les démocrates à la Cour Suprême malgré une décision tout à fait discutable sur le plan juridique… Ce qui a d’ailleurs mené à sa cassation sitôt qu’il n’a plus été protégé par une majorité de juges de tendance démocrate : cela dit tout de la validité des décisions de cette Cour.
À mes yeux, la Cour Suprême est tout sauf un instrument de démocratie. Qu’une poignée de juges, NOMMÉS et non élus, aient entre les mains le pouvoir de trancher des litiges juridiques et politiques d’une importance aussi capitale est au contraire une atteinte à la démocratie, quel que soit le bord pour lequel penche la décision. En la matière, il ne peut y avoir qu’un seul et unique juge compétent, et c’est le peuple : ce genre de litiges devrait se trancher par référendum et non par le truchement d’une institution totalement déconnectée de la volonté populaire et, de plus, redevable aux pouvoirs qui les nomment, comme l’est la Cour Suprême.
Nous avons exactement la même chienlit, j’emploie le mot à dessein, en France avec le Conseil Constitutionnel qui s’est arrogé, depuis 1971, des pouvoirs que la Constitution de la Cinquième République ne lui a jamais donnés, avec pour résultat qu’il se permet d’interdire ou de défaire des décisions prises en toute légitimité par le pouvoir législatif démocratiquement élu. Au point que son président se présente volontiers comme le gardien ultime d’une certaine idée (la sienne) de la morale publique : en France comme aux États-Unis, ces entraves à la démocratie doivent disparaître et la seule réforme qui vaille de la Cour Suprême serait, donc, de la supprimer.
Ca n’a absolument rien à voir avec le CC qui est formé d’anciens politiques…