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Au-delà du racket fiscal

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À l’heure où l’exagération insensée des taxes sur le carburant dresse la France des périphéries et des campagnes désertées par nos services publics contre la France des métropoles abondamment pourvue en transports collectifs de toutes sortes, il est peut-être temps de rappeler quelques chiffres qui, au regard de l’importante question de la mobilité, justifient très largement la protestation qui gronde. Contrairement aux apparences, ces chiffres ne posent pas seulement des questions d’impôt (I) et de coûts (II), ils interrogent aussi sur la mise en friche de l’aménagement du territoire (III) et plus largement encore sur l’avenir même du pays (IV).

I – D’abord un problème fiscal

En effet le travailleur de la France périphérique ou rurale, contraint de prendre sa voiture pour se rendre à son travail et parfois même pour exercer sa profession, ne cesse de voir ses coûts kilométriques exploser sous une avalanche de taxes (pratiquement 60% du prix du carburant à la pompe), à laquelle la transition énergétique fournit aux gouvernants un prétexte commode, mais guère convaincant. Tout le monde sait en effet désormais que la presque totalité des taxes prélevées au nom de l’écologie ne sert effectivement pas à cette transition, mais à assurer vaille que vaille un déficit présentable à Bruxelles en dépit de l’incapacité de ce gouvernement à réduire la dépense publique. Pour avoir le front de ne pas emprunter des transports en commun qui n’existent pas, ou qui ne rendent pas le service de mobilité nécessaire à sa profession, l’automobiliste individuel se voit donc sommé d’acquitter en sus du coût économique de son transport de nombreux suppléments de taxes, malus et frais de toutes sortes qui majorent substantiellement sa facture au profit de l’État. Or ce dernier n’arrive même pas avec ce « bonus » à entretenir correctement les routes, d’où le foisonnement de ces panneaux qui montrent que chez nous les « trous en formation » sont sans conteste ceux qui suivent les formations les plus longues et les plus coûteuses.

II – Puis un problème de coûts

Inversement les usagers des transports en commun des grandes métropoles profitent de tarifs abusivement attractifs puisqu’ils n’acquittent – selon un article paru le 28 septembre 2018 sur le site gouvernemental « Vie publique » et consacré au financement des transports collectifs urbains dans les grandes métropoles dotées d’un réseau de métro ou de tramway – que 38% du coût réel du transport pour les Franciliens et seulement 20% si l’on prend pour référence la France entière des métropoles concernées. Pire, l’avantage consenti aux grands centres urbains s’est encore accru puisqu’entre 2000 et 2015, la part dérisoire réclamée à l’usager a encore chu de 3 points. Le comble de l’absurdité est évidemment atteint dans ces quelques villes moyennes qui poussent la démagogie jusqu’à proposer des transports collectifs soi-disant gratuits, ce terme trompeur voulant seulement dire que la charge entière du transport est transférée sur le contribuable. On a ainsi en face des automobilistes qu’on essore fiscalement et réglementairement des métropolitains et autres « centr’urbains » qu’on comble de faveurs, en reportant sur les autres l’essentiel du coût de leur déplacements quotidiens.

On aurait certes pu imaginer, dans ces périodes de vaches maigres pour les finances publiques tant nationales que locales, que le bon sens aurait conduit à réclamer progressivement à l’usager des transports publics une part croissante du coût réel du service dont il bénéficie et financer par exemple avec les ressources obtenues :

-en Île-de-France un métro moins pollué, des RER climatisés et ponctuels, ou encore un parc suffisant de bus « propres », pour ne pas réserver les « diesel » plus anciens et les plus polluants aux poumons des banlieusards qui, on le sait, sont physiologiquement infiniment plus résistants que ceux très fragiles des Parisiens.

-ailleurs des dessertes plus rapprochées, l’amélioration des conditions de confort ou encore l’aménagement de parcs de stationnement périphériques à tarif réduit.

En effet pourquoi ne pas associer les efforts de ceux qui profitent largement du système aux efforts de ceux qui polluent le plus souvent bien malgré eux et qui ont eu au surplus le tort de croire pendant deux ou trois décennies les âneries doctement proférées par les pouvoirs publics et leurs experts affidés quant aux avantages du diesel ?

Au terme de cette brève revue, on s’aperçoit qu’alors qu’on n’ose même pas demander à l’usager de transport en commun de régler en Île-de-France la moitié et ailleurs le quart du prix du service qu’il utilise, on n’a aucun scrupule à exiger de l’automobiliste de Mende ou de Guéret isolé dans un « désert de dessertes » qu’il acquitte en sus du coût réel de ses kilomètres une kyrielle d’impôts destinés entre autres à améliorer le confort fiscal des populations métropolitaines. On comprend du coup beaucoup mieux pourquoi ces populations privilégiées, logées dans des centres-villes fiscalement avantagées au surplus par une fiscalité locale obsolète, mettent la santé de leurs poumons en avant pour essayer de faire « casquer » encore un peu plus un maximum de petits copains que la modicité relative de leurs ressources éloigne chaque jour davantage du centre des grandes métropoles.

III – La mise en friche de l’aménagement du territoire

Pourtant cela fait déjà longtemps qu’un certain Christophe Guilluy, géographe de son état, attire l’attention des pouvoirs publics sur l’intolérable discrimination dont sont victimes tous ceux qui n’ont pas la chance ou la possibilité d’habiter au cœur des cités les plus riches et les mieux équipées. Or les élites au pouvoir qui choisissent pour la plupart ces zones favorisées, n’ont rien voulu entendre de ces alertes, dont la suite n’a pourtant cessé de confirmer la justesse et la gravité croissantes. Plus préoccupant encore : en se saisissant du prétexte écologique, elles en profitent pour aggraver à leur profit les inégalités qu’une majorité de Français supportent et financent de plus en plus mal. Le dos au mur, le pouvoir ne cesse de répéter dans tous les médias à sa dévotion qu’il « entend » cette France d’en bas, or cela fait des décennies qu’il refuse tout simplement de l’écouter, l’accablant de normes, de taxes, de privations, d’exclusions et d’avanies de toutes sortes et poursuivant implicitement une sorte de dés-aménagement du territoire avec le déclassement continu des populations qui y habitent.

IV – Et enfin le problème de l’avenir du pays

Car, très au delà des seules questions de fiscalité et de coûts, le plan de montée en puissance des taxes énergétiques n’est que le dernier avatar d’une politique insensée qui, avec l’exode massif des services publics, organise systématiquement la désertification de la majeure partie de notre territoire. Le tout en considérant ceux qui s’obstinent à rester dans ces zones « ingrates » – la plupart du temps parce qu’ils ne peuvent faire autrement – comme une réserve d’indiens taxables et corvéables à merci et parfaitement indignes du moindre intérêt autre qu’électoral. Pourtant quoi qu’en pensent tous les financiers et beaucoup d’économistes à la solde du pouvoir, Bodin avait raison lorsqu’il affirmait qu’il n’y a de richesse, ni de forces, que d’hommes« . Et sur ce plan, l’invite présidentielle faite à des ouvriers menacés de licenciement d’engager des trajets quotidiens de plus de trente lieues pour trouver du travail, témoigne suffisamment de la manière méprisante et arrogante dont nos dirigeants traitent nos compatriotes dans la détresse, ravalés au rang de matériel humain immédiatement transférable d’un point à l’autre du territoire. N’en déplaise à ceux qui nous gouvernent, la France ne se réduit pas à la quarantaine de ses plus grandes agglomérations créées autour des villes de 100 000 habitants et plus et on ne peut, sans rien faire, laisser périr tous les territoires qui les entourent. Le vieil apologue des membres et de l’estomac conserve aujourd’hui toute sa pertinence. Pourquoi donc les élites enfermées dans leurs privilèges n’ont-elles de cesse d’aggraver inconsidérément la fracture qui se creuse, en traitant au surplus de « populistes » tous ceux qui s’en inquiètent ? Ne comprennent-elles pas que cette rupture peut être mortelle autant pour elles-mêmes (c’est la seule chose qui les intéresse !) que pour un pays que, tous partis de gouvernement confondus, elles conduisent méthodiquement à sa perte depuis plusieurs décennies ?

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5 commentaires

Laurent46 27 novembre 2018 - 8:44

Gavage administratif et politique !
On ne peut pas gaver éternellement Politiques, administrations, syndicats, associations, fondations, commissions diverses et réunions internationales qui deviennent mensuelles voir hebdomadaires et faire des investissements par ailleurs !

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Virginie BM 27 novembre 2018 - 11:29

Parce que justement les élites ne voient que leur nombril, elles ne voient même pas que la colère gronde et que le peuple est à bout… A force de trop pratiquer la monarchie absolue il ne faut pas s'étonner qu'on ressorte la guillotine…

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Alain de Lille 27 novembre 2018 - 7:10

issue fatale
Ne pouvant nous en sortir ,incompétence des élus et des politiques ,nos gouvernants espèrent secrètement une révolte et une dictature qui les écarteraient et soulageraient de ces responsabilités qu'ils ne peuvent assurer.

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Thierry BENNE 28 novembre 2018 - 9:48

@ ALAIN DE LILLE

Sans rire, vous y croyez vraiment à ce départ espéré?

Une expérience professionnelle de plus de quarante ans m'a au contraire montré – et tout spécialement dans le secteur public dans lequel j'ai passé une petite dizaine d'années – que les compétences auxquelles les gens tenaient le plus étaient le plus souvent celles qu'ils étaient rigoureusement incapables d'exercer.

Trop de gens s'accrochent au pouvoir, à leurs fonctions et à leurs privilèges, comme les huîtres aux rochers. Et notre démocratie, qui ne représente plus guère le peuple, se meurt chaque jour de ces abus, qu'aggrave encore le fouet de l'impôt. Simplement, comme le souligne le géographe Guilluy, les élites mondialisées commencent à s'inquiéter des réactions de plus en plus nombreuses et de plus en plus vives des peuples meurtris et méprisés à leurs politiques où l'argent et le communautarisme règnent en maître.

Mais cette fois, ce n'est plus en traitant leurs adversaires de "populistes" ou de "nationalistes" qu'elles règleront le problème, car elles commencent à s'apercevoir que la recette du déni et de l'insulte, longtemps souveraine, marche désormais de moins en moins auprès d'une opinion dont le regard commence sérieusement à se dessiller.

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rémi 29 novembre 2018 - 6:22

Ne plus tourner autour du pot
Nos élites doivent avoir le courage de tout remettre à plat. Les Français ont assez attendus.
Les chantiers sont nombreux :Constitution à revoir ,Droits de Femmes , Ecologie, Décentralisation à revoir , référendum ect… Bonne chance la France !

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