Dans La Grande Parade (Plon, 2000), l’essayiste Jean-François Revel démontre l’incapacité des socialistes à tirer les leçons de la faillite du marxisme et leur entêtement à continuer sur la même voie : celle des méthodes économiques qui n’ont jamais marché. Aujourd’hui encore, le gouvernement en place nous ressort les vieilles antiennes de la lutte des classes et de l’importance du rôle de l’Etat dans l’économie et aussi dans la société en proposant aux Français une sorte de mixture idéologique indigeste qui, en réalité, ne fait qu’enfoncer le pays dans la crise.
On voit donc le gouvernement proposer ces jours-ci une soi-disant réforme de l’impôt. Il s’agit là d’une autre grande parade de la part des socialistes. On veut nous faire croire que c’est une réforme fiscale, alors qu’il ne s’agit que d’un ornement politique derrière lequel se cache un système fiscal désastreux qui devrait être réformé en profondeur. La France détient pratiquement le plus haut taux de prélèvements obligatoires (46 % du PIB). Les taux supérieurs d’impôt sur le revenu (64,5% avec la CSG), l’impôt sur les Sociétés (36 %, voire 38% avec la surtaxe Fillon revisitée façon Hollande), les droits de succession (45%) sont parmi les taux les plus élevés du monde. Les employés supportent également les charges sociales qui sont les plus élevées de tous les pays développés, représentant de 80 à 100% du salaire net médian. Les classes moyennes sont particulièrement frappées à ce titre en payant des cotisations sociales proportionnelles alors qu’elles ne profitent pas davantage de ces assurances sociales qui n’ont plus d’assurance que le nom et qui sont en fait de nouveaux impôts progressifs. Au moins aussi grave c’est le fait que plus de la moitié des Français ne paye pas l’impôt sur le revenu et qu’il existe environ 500 niches fiscales. En réalité, en France, les 10 % les plus riches payent 72 % du total de l’IR.
A cette terrible pression fiscale s’ajoute une instabilité fiscale chronique. Le pays est devenu un véritable casino fiscal dans lequel les ménages et les entreprises dépendent des changements permanents et hasardeux du code des impôts et des réglementations. Dans ce contexte, introduire le prélèvement de l’impôt à la source n’est qu’une vaste fumisterie. Il peut d’ailleurs se révéler inutile, inefficace et dangereux.
Inutile, car le prélèvement mensuel existe déjà pour 66 % des Français et plus de 80 % d’entre eux préfèrent régler leurs impôts directement en ligne. Inefficace, car les économies que devraient générée l’introduction du prélèvement sont très floues. Les syndicats de Bercy ont même réclamé des effectifs supplémentaires… D’ailleurs, pour faire des économies, pourquoi le gouvernement ne s’inspire-t-il pas du modèle suédois où la collecte de l’impôt est sous-traitée au privé et où seulement 800 fonctionnaires travaillent au ministère de l’Economie et des Finances contre 150 000 en France ?
Par ailleurs, le prélèvement à la source sera une charge en plus pour les entreprises qui devront assumer le coût de la collecte de l’impôt. Enfin, la mesure est dangereuse car elle cache peut-être la fusion de l’IR avec la CSG (qui est prélevée à la source) en la rendant progressive. Ce changement pourrait constituer aussi le point de départ pour une hausse importante de l’IR à des taux allant jusqu’à 80 % comme le demande avec insistance le gourou-économiste de la gauche, Thomas Piketty.
Le ministre des Finances cite en exemple d’autres pays qui ont adopté le prélèvement à la source. Parmi eux, l’Allemagne. C’est vrai, mais ce pays n’a pas la même fiscalité que la France et les baisses d’impôts ont été nombreuses ces dernières années (en 2013, l’IR a baissé de 15 à 50 euros par mois pour tout le monde). La part de l’IR dans le PIB est trois fois plus importante en Allemagne qu’en France et son assiette est plus large outre-Rhin : seuls sont exonérés les revenus inférieurs ou égaux à 8 300 euros/an. Le taux maximum (42 %) ne s’applique qu’à 5 % des contribuables et il n’y a pas d’impôt sur la fortune (ISF)…
Le prélèvement à la source pourrait être une très bonne idée mais après une vraie réforme fiscale. En introduisant un taux unique d’imposition (flat tax) à 15 % (pour les revenus supérieurs à 8 000 euros/an) et un IS à 25 % (pour être dans la moyenne de l’OCDE), le pays deviendrait enfin compétitif et pourrait faire face à la concurrence internationale. La CSG est déjà une « flat tax » et elle rapporte beaucoup plus que l’impôt sur le revenu : 90 Mds d’euros contre 65 milliards d’euros pour l’IR. L’IREF a même calculé qu’un IR à 15 % pour tous serait même plus productif que l’impôt progressif actuel car beaucoup plus de Français participerait à cet impôt (ce serait un impôt plus juste) et les rentrées fiscales augmenteraient : 40 Mds d’euros de plus que le montant prévu dans le PLF 2015. Dans ces conditions, prélever l’impôt à la source n’est pas une simple parade politique…
(Une version de cet article a été publiée dans Le Figaro du 20 juin).
2 commentaires
Pas seulement la gauche !!!
Il faut lire que la situation actuelle de sur-effectifs dans la fonction publique n'est pas uniquement le fait de la "gauche" : cela dure, dure depuis 1945; par exemple le coût de collecte de l'impôt est trois fois supérieur à celui de l'Allemagne et ce n'est pas récent.
La vérité est simple : la France est gouvernée, via l'E.N.A. par les fonctionnaires, pour les fonctionnaires : 75 % du personnel politique est issu de la fonction publique nationale ou territoriale; SARKOZY représentant de la droite étatiste n'a rien entrepris de sérieux sur ce sujet – comme tant d'autres, hélas !-car le solde net des ses années a été un accroissement annuel de 15.000 fonctionnaires environ.
Oui à la 'flat tax'
Entièrement d'accord avec vous! Une 'flat tax' prélevée sur TOUS les revenus, sans aucune exonération. Avec ce système, tout le monde participerait à l'effort, y compris ceux qui profitent sans aucune contrepartie. SY (Paris)