On critique souvent les enseignants : peu motivés, souvent absents, etc. Mais le vrai problème ne vient-il pas aussi de la façon dont ils sont managés (si on ose employer ce terme) ? Témoignage dans une école primaire de la région parisienne, rapporté par Guillaume Blondin, correspondant de l’IREF.
En juin 2008, la directrice de cette école part pour de nouvelles fonctions. Il s’agit donc de la remplacer. Un des professeurs, pressenti, refuse le poste : le complément de rémunération (à peine plus de 100 € par mois) est dérisoire par rapport au surcroît de travail que cela représente. Une décharge horaire est prévue (la moitié de ses cours est prise en charge par un autre professeur) mais la fonction de Directrice implique une présence de 8h à 18h30 dans l’école, des réunions régulières le soir à la mairie, la présence certains week-end… Sans même parler des responsabilités supplémentaires (notamment pénales). De plus, aucune formation de quelque sorte que ce soit n’est envisagée.
Un autre professeur, qu’on appellera Valérie, accepte avec beaucoup de courage d’assurer l’intérim, de « faire fonction de directrice », soit en attendant un directeur très prochainement, soit en espérant une régularisation rapide.
Il est important de souligner qu’elle accepte ce poste avec une décharge horaire certes (elle n’enseigne plus qu’à mi-temps) mais ne bénéficie d’aucun complément de rémunération. Elle accepte cette charge par bonne volonté, par son côté valorisant et dans l’espoir d’être un jour directrice à part entière. Perspective que lui fait bien sûr miroiter l’inspection académique.
Ce qui devait être un intérim dure depuis deux ans. Et Valérie s’est révélée une excellente directrice. L’équipe éducative est enthousiaste, les relations avec les parents d’élèves sont globalement bonnes et les résultats en matière d’enseignement ne se font pas attendre : l’école est considérée comme la meilleure des communes environnantes.
Valérie s’attend légitimement à être récompensée de ses efforts et de ses bons résultats, c’est-à-dire être nommée officiellement Directrice. Mais ce modèle de dévouement et de réussite doit déranger les schémas pré-établis des hauts fonctionnaires et/ou d’un syndicaliste soucieux de défendre la procédure régulière. Pas question de prendre en compte les résultats du terrain : Valérie vient d’apprendre qu’un « vrai » directeur serait nommé à la rentrée de septembre !!
Comment s’étonner de l’écœurement de Valérie, qui, elle, a véritablement montré qu’elle avait le fameux « sens du service public » ? Comment ne pas imaginer que ses collègues se sentent méprisés et déconsidérés ? Comment espérer motiver des enseignants avec aussi peu de considération ? Et, au passage, je vous laisse imaginer l’accueil que va recevoir le directeur (qui n’est sans doute aucunement responsable de cette situation) !
Une fois de plus le cocktail magique bureaucratie-méconnaissance-du-terrain, corsé en plus de mensonge caractérisé, a donné ses fruits.
Rappelons qu’un fonctionnaire de l’Education Nationale sur trois est un administratif et non pas un enseignant. Un tel taux pour de tels résultats, voilà bien ce à quoi il faut s’attaquer si on espère un jour réformer vraiment le « Mammouth ».
2 commentaires
technocratie
Fin de l’article: « Rappelons qu’un fonctionnaire de l’Education Nationale sur trois est un administratif et non pas un enseignant. Un tel taux pour de tels résultats, voilà bien ce à quoi il faut s’attaquer si on espère un jour réformer vraiment le « Mammouth ».
C’est la même chose dans les hôpitaux ! Les administratifs sont de plus en plus nombreux et les soignants « mangés » par les conséquenses de leurs élucubrations!
Technocratie
N’est-ce pas de la désinformation que de prétendre « qu’un fonctionnaire de l’Education Nationale sur trois est un administratif et non pas un enseignant » ?