La députée européenne LFI Manon Aubry a une nouvelle fois déformé les chiffres pour réclamer une hausse des dépenses sociales.
Nos lecteurs nous reprochent parfois d’accorder trop d’importance aux élucubrations répétées des Insoumis. Il est cependant difficile de laisser passer les contre-vérités grossières et les approximations volontaires que les parlementaires LFI multiplient.
A cet égard, la députée européenne Manon Aubry a dépassé les bornes lors du Grand entretien mené par Sonia Mabrouk sur Europe 1-CNews le 6 mars. Interrogée plusieurs fois sur la hausse nécessaire des dépenses militaires, questionnée également sur le vote des Insoumis contre la loi de programmation militaire 2024-2030, elle a, selon les procédés coutumiers de la gauche extrême, répondu à côté.
Alors que la journaliste lui faisait remarquer que « notre pays dépense chaque année quatre fois plus pour la dépense sociale que pour la défense nationale » (proportion d’ailleurs inexacte), Manon Aubry a osé déclarer : « Le budget des militaires a déjà été doublé ces dix dernières années. (…) dans le même temps, les dépenses sociales ont baissé ».
Reprenons dons les chiffres pour en avoir le cœur net.
S’agissant des dépenses militaires, la loi de finances initiale pour 2015, sous François Hollande, prévoyait un peu plus de 36 milliards d’euros pour la défense (direction du Budget, 2015). La loi de finances pour 2025 consacre un peu plus de 51 milliards d’euros aux équipements des forces armées (ministère de l’Economie et des Finances, Budget de l’État, dépenses par missions, 2025).
S’agissant des dépenses sociales, la France est systématiquement championne d’Europe. Elle était également en tête des pays de l’OCDE en 2022 avec un total supérieur à 31 % du produit intérieur brut et la bagatelle de 850 milliards d’euros de prestations sociales.
On peut également se référer à quelques tableaux explicatifs concoctés par le ministère de l’Economie et des Finances sous l’intitulé « A quoi servent nos impôts ? », dont l’Iref avait parlé en son temps. Il en ressortait qu’en 2022, à la question « Que financent 1.000 € d’impôts ? », il était répondu : 31 € pour la défense, donc seulement 3,1 % ! En additionnant défense, justice et sécurité pour retrouver la quasi-intégralité des missions régaliennes de l’État, le total s’élevait à 60 €, donc 6 %. En contrepoint, la protection sociale, à savoir les aides au logement, le chômage, la famille, les retraites et la santé, ainsi que les « autres solidarités », correspondait à 562 € de dépenses, donc largement plus de la moitié des dépenses totales. En y ajoutant les 90 € d’éducation, on aboutissait à presque deux tiers des dépenses publiques.
En substance, la comparaison effectuée par Manon Aubry entre
- des dépenses militaires à la hausse, sous-entendu : qui ne devraient pas forcément augmenter en dépit du contexte international, alors même qu’elles ont été très réduites de la chute du mur de Berlin à la présidence Hollande et qu’elles représentent une toute petite partie des dépenses de l’Etat,
- et des dépenses sociales à la baisse, sous-entendu : qui devraient absolument être haussées alors même qu’elles sont déjà au firmament des pays civilisés et qu’elles représentent une grande partie des dépenses de l’Etat,
est tout simplement inadmissible.