Les protagonistes de ce livre d’Italo Calvini sont teintés de tant de réalisme que leurs attitudes ingénues font passer au lecteur un moment de divertissement sans pareil. Treize nouvelles, regroupées sous le titre « Les amours difficiles », offrent un comique de situation où une série d’aventuriers inénarrables entremêle maladresse à force d’inquiétude et d’insatisfaction, incompréhension à force de vouloir paraître, excès d’audace pour cause de timidité, en un mot souffre d’une incapacité de communication. Alors les amours sont bien impossibles, un sentiment de grotesque gâche  le bonheur éphémère sauf quand on retrouve un vieil ami ou un employé dans le même embarras que soi. Puis deux novellas, entre nouvelle et roman, où la difficulté ne vient pas du protagoniste mais de « la vie difficile ». Comment ne pas devenir fou devant une invasion cauchemardesque de fourmis alimentée par une organisation sensée les faire disparaître ? Comment ne pas être désespéré devant la lâcheté d’une majorité qui se camoufle derrière ses volets, devant les obsessions climatiques des uns et le déni des autres ? S’il est dur d’aimer, il est dur d’être heureux pour Italo Calvini. Il n ’est plus le jeune italien qui se battait contre le fascisme et s’alliait aux communistes. Il est l’écrivain même qu’il décrit dans « L’aventure d’un poète », cerné par un besoin d’aligner des mots sans fin , jusqu’à ce que sa feuille devienne noire d’écriture, noire comme le monde où il vaut mieux rire que pleurer.
Brigitte Clavel
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