Il existe déjà un fonds de pension réservé aux fonctionnaires : le RAFP. Pourquoi ne pas l’ouvrir aussi à ceux qui travaillent dans le privé ? Ce serait un grand pas vers une réforme systémique des retraites et aussi une mesure d’équité entre le public et le privé. Tout le monde serait gagnant.
Fin janvier, le COR (Conseil d’orientation des retraites) anticipait, dans une Note, la dégradation du ratio actifs/inactifs ainsi que les besoins élevés de notre système de retraite. On passe une fraction de plus en plus importante de sa vie à la retraite, la durée de vie s’allongeant inexorablement. Il est évident qu’il faudra repousser l’âge de départ à la retraite mais – et c’est ce que ne dit pas le COR – cette seule mesure paramétrique ne sauvera pas notre retraite. Nous avons besoin d’une vraie réforme systémique comme l’ont fait d’autres pays. Pour cela, nul besoin de regarder ailleurs. Il existe déjà en France un modèle à suivre : il s’agit du RAFP (Retraite Additionnelle de la Fonction Publique). C’est le seul fonds de pension par capitalisation, qui bénéficie à une seule catégorie des Français, les fonctionnaires. Ouvert aux fonctionnaires des trois fonctions publiques (État, territoriale et hospitalière) et aux militaires, il s’agit d’un régime obligatoire et par point assis sur les primes et indemnités qui n’entrent pas dans la base de calcul de la pension de base. Institué par l’article 76 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, il est entré en vigueur le 1er janvier 2005. Aujourd’hui, ceux de la fonction publique d’Etat représentent 44 % du total des bénéficiaires, ceux des collectivités locales 32% et ceux des hôpitaux 29%.
Comment fonctionne-t-il ? Les montants cotisés par le fonctionnaire sont convertis en points, la valeur d’acquisition du point est fixée chaque année par le conseil d’administration et les droits acquis sont cumulés au fil des années. La prestation est versée en rente sauf si le nombre de points acquis est inférieur à 5125.
Le RAFP fonctionne donc comme un fonds de pension qui investit à long terme. Il reçoit 1.75 Mds d’euros de cotisations par an, dispose d’un cash-flow (net positif) de 2 Mds d’euros et d’un total d’actifs de 26 Mds répartis dans les obligations (65 %), actions (25 %) et immobilier (10 %). Le RAFP est en très bonne santé et deviendra, selon les prévisions, l’un des plus gros investisseurs de long terme en France avec 100 Mds d’euros à pleine charge. Pourquoi se priver d’un instrument qui fonctionne et dont devraient profiter aussi les Français du privé ? Rappelons que, malgré quelques comptes épargne qui peuvent compléter la retraite, ceux qui travaillent dans le privé n’ont pas le droit de déduire de leur revenu imposable leurs cotisation à des fonds de retraite par capitalisation. Les actifs des fonds de pension représentent 0.4 % du PIB en France contre 6 % en Allemagne, 70 % au Canada, 113 % en Suisse et 148 % aux Pays-Bas ! D’ailleurs, d’après l’OCDE (Pensions at a Glance, 2009), le système de retraite aux Pays-Bas est parmi les plus généreux d’Europe. Le retraité reçoit en moyenne 105,5 % de son salaire moyen (après impôts) et part à la retraite à 65 ans (allongé à 66 ans d’ici à 2019 et 67 ans d’ici à 2023).
L’IREF s’est prononcé plusieurs fois en faveur d’une réforme en profondeur de notre système de retraite et pour l’adoption d’un pilier par capitalisation. Dans une étude intitulée « Pour la création d’un Compte Personnel Retraite (CPR) », l’IREF a proposé de réformer l’assurance retraite en permettant à chacun de disposer d’un compte personnel qui pourrait être affecté à son choix en assurance par capitalisation ou en répartition selon le régime actuel. La transition se ferait graduellement : les tranches d’âge de 40 et 50 ans cotiseraient partiellement pour un CPR à hauteur respectivement de 50 % et 30 %. Les plus jeunes affecteraient l’ensemble des cotisations retraite à un CPR.
Il existe déjà un fonds de pension, le RAFP. Pourquoi ne pas l’ouvrir aussi à ceux qui travaillent dans le privé ? Ce serait un grand pas vers une réforme systémique des retraites et aussi une mesure d’équité entre le public et le privé. Tout le monde serait gagnant.
Une version de cet article a été publiée dans le quotidien Les Echos du 20 février.
7 commentaires
incroyable !
Bravo !
Re : incroyable !
Merci à vous !
Equité Public Privé en matière de retraite
La création du CPR est certainement une bonne idée. Mais uniquement si on a au PREALABLE rassemblé TOUS les salariés français dans le même systême de retraite. J’aimerais avoir quelques précisions sur les chiffres cités. Le 1.75 Mds d’euros de cotisations qu’il reçoit par an : s’agit-il de la seule « part salariale » , ou d’un ensemble « parts salariale+ patronale » ? La part salariale vient-elle réellement en déduction des primes qui en constituent l’assiette ? Comment est-on arrivés à un « total d’actifs de 26 Mds ? (évolution de ce chiffre depuis le 1er janvier 2005 ? Que signifie le « cash-flow de 2 Mds » ? Comment peut-on disposer d’un cash-flow de 2Mds avec 1.75 Mds de cotisations ? Connait-on le montant des pensions versées année par année , par la RAFP , depuis 2005 ? Avec les réponses à ces questions, on pourrait ouvrir un peu plus les connaissances du nouveau-tiers-etat sur sa situation dans la République des Fonctionnaires
Universalité
On nous rabâche à longueur de journée la solidarité entre les français !! Mais que de paroles et rien dans les actes. Que ce soit pour la maladie ou la retraite, certains sont mieux logés que d'autres. Il faut que ca cesse…..
Qu'est-ce qui empêche le privé d'en faire autant ?
Si ce fond de pension des fonctionnaires fonctionne aussi bien, pourquoi ne pas l'imiter en constituant un FdP similaire pour les employés et cadres du secteur privé ? Pourquoi vouloir se raccrocher à celui des fonctionnaires ?
DEUX UTILES MISES AU POINT!
Cet article bienvenu sur la RAFP fait justice de l'argument-clef de tous les fonctionnaires et de tous les syndicats publics qui, dans toutes les émissions , dans tous les débats, dans tous les articles pour justifier le taux de remplacement insensé de 75% sur les six derniers mois de salaires, prétextent du fait que dans la fonction publique, les retraites ne cotisent pas sur les primes. On voit en réalité qu'il n'en est rien, même si le taux de prise en compte desdites primes est plafonné . Combien il est étonnant par ailleurs que des fonctionnaires qui rappellent à longueur de journée au citoyen que nul n'est censé ignorer la loi, ne se souviennent pas du tout de cette réforme vieille de dix ans et dont la traduction pécuniaire se manifeste mensuellement sur chacun de leur bulletin de paye!
L'existence du RAFP géré par la Caisse des Dépôts est également intéressante, dans la mesure où elle démontre que l'Etat, quand c'est l'intérêt de ses fonctionnaires, sait parfaitement conserver ses éléments de paye plus de cinq ans (le régime existe depuis 2005!), alors qu'il oppose régulièrement et non sans quelque mauvaise foi à l'alignement du régime public sur le régime privé, le fait qu'il ne conserve pas plus de cinq ans les données de la paye publique.
Décidément, en matière de retraites, l'alignement du régime public sur le régime privé va être tout sauf un long fleuve tranquille.
Equité avec le privé
J'ai travaillé dans les deux régimes, et je n'ai pas eu droit à cette fameuse RAFP, heureusement que j'ai eu ma complémentaire du privé 300€ pour atteindre laborieusement les 1500€ de retraites, l'essentiel de mon salaire étant payé en primes dans la fonction territoriale. Alors si je suis un nanti !!!!!!! Et tant mieux si une complémentaire a été créée pour les fonctionnaires !!! Et si elle est si géniale, le privé n'a qu'à suivre !!!!