Le cofondateur de place publique, Raphaël Glucksmann, s’est récemment illustré en demandant publiquement le retour de la statue de la Liberté en France. « Les Américains semblent la mépriser, a-t-il déclaré, elle sera très bien chez nous ». À cela, la porte-parole de l’administration Trump a répondu que sans l’aide des États-Unis durant la Deuxième Guerre mondiale, la France parlerait peut-être aujourd’hui allemand, et que la France devrait donc se montrer reconnaissante. Elle aurait pu ajouter que notre pays aurait très bien pu passer aussi sous le joug soviétique durant la guerre froide, puisqu’on sait que Staline avait également des vues sur l’Europe occidentale. Elle aurait pu se rappeler que Louis XVI fit envoyer un corps expéditionnaire de 6 000 hommes pour apporter un soutien militaire aux insurgés américains durant la guerre d’Indépendance, appui sans lequel les États-Unis seraient peut-être morts dans l’œuf. Certes le rouleau compresseur Donald Trump, qui tend à agir par instinct et esprit transactionnel bien plus que par adhésion à une véritable philosophie politique mûrement réfléchie, offre, depuis sa prise de fonction en tant que 47e président des États-Unis, l’édifiant spectacle d’un libéral-populisme aussi tapageur qu’inconséquent. Il va parfois dans un sens qui nous convient plutôt – ainsi la baisse de la fiscalité et des réglementations de même que la débureaucratisation initiée par le Department of Government Efficiency (DOGE) – mais prend parfois aussi le contrepied de nos idées – par exemple lorsque Trump s’immisce indûment dans le commerce international en faisant ériger des barrières douanières qui sont une atteinte inadmissible autant que contreproductive à la liberté des échanges.
Cela dit, il faudrait tout de même rappeler que Glucksmann est un adepte de la social-démocratie, forme d’organisation que Pascal Salin décrivait comme étant « la combinaison de l’omnipotence d’une minorité élue et de l’économie mixte (définie non pas seulement par l’existence de nombreuses activités étatiques, mais aussi par une fiscalité forte et discriminatoire ou des réglementations tentaculaires » (Libéralisme, 2000, p. 16). Souvenons-nous aussi que Glucksmann, tête de liste des socialistes au moment des élections européennes de 2024, voulait taxer les 0,1% les plus riches d’Europe ainsi que les « superprofits » des multinationales, afin que fût financée la « transition écologique ». Or un pays véritablement libre serait déjà un pays où la fiscalité cesserait d’être confiscatoire et spoliatrice, où l’État n’aurait plus la possibilité de s’en prendre, sous couvert de « justice sociale », à une minorité – tantôt baptisée « riches » tantôt « ultra riches » – qu’elle ponctionne allègrement pour en redistribuer avec une infinie largesse les ressources que ces mêmes « riches » ont pourtant eux-mêmes créées par leurs propres efforts de travail, d’épargne et bien souvent d’inventivité. Comment plaider ainsi avec sérieux pour le retour de ce cadeau offert par la France à l’Amérique qu’est la statue de la Liberté quand on sait que les prélèvements obligatoires comptent pour près de 50% du PIB dans notre pays, qu’un ménage sur deux ne paye pas l’impôt sur le revenu et que 10% des ménages payent trois quarts de ce même impôt ?