Le Premier ministre consulte à partir du 28 avril pour imposer la représentation proportionnelle aux prochaines élections législatives.
François Bayrou a peu d’idées, mais quand il en a une, il y tient. Voilà des décennies qu’il rêve d’instaurer la représentation proportionnelle (RP) aux élections législatives. Il y avait fait référence dans son laborieux discours de politique générale ; il y revient à partir du 28 avril par le truchement d’une consultation des partis et des groupes parlementaires.
Le ministre des Relations avec le Parlement, le fidèle Patrick Mignola du Modem, avait prétendu il y a quelques jours dans un entretien : « Tout le monde ou presque est d’accord avec le principe : il faut plus de proportionnelle » (Le Journal du Dimanche, 20 avril 2025). Une affirmation peu compréhensible, d’abord parce que la RP n’existe pas pour l’élection des députés, ensuite parce que « tout le monde » est loin d’être d’accord.
En effet, certains sont favorables au scrutin actuel, le scrutin majoritaire uninominal à deux tours, traditionnellement la droite et en dernier lieu Laurent Wauquiez, très offensif sur le sujet (BFMTV, 27 avril 2025), mais aussi Olivier Faure, le premier secrétaire du Parti socialiste (PS). D’autres sont certes favorable à l’instauration de la RP (Le Journal du Dimanche, 27 avril 2025), mais en ordre dispersé : Aurore Bergé, la ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, a fait part d’un soutien particulièrement tiède en parlant d’une simple « dose de proportionnelle » souhaitable et en confirmant son attachement au scrutin majoritaire . Il est vrai qu’elle appartient à l’aile droite du gouvernement. Gabriel Attal n’est, paraît-il, pas convaincu, tandis que François Hollande est favorable à la RP, même s’il n’a pas profité de son passage à l’Élysée pour l’imposer (La Tribune Dimanche, 27 avril 2025)…
Toujours prompts à avancer de mauvaises idées, les extrêmes souhaitent eux aussi l’instauration de la proportionnelle. Les Insoumis, suivis par la plupart des Écologistes, veulent même une proportionnelle intégrale, tandis que Marine Le Pen change d’avis, désirant maintenant assortir la RP d’une prime majoritaire.
François Bayrou, lui, est favorable à une proportionnelle dans le cadre départemental, comme en 1986, et à l’allemande, autrement dit un scrutin mixte sans prime majoritaire. Une brillante idée quand on voit ce qu’il se passe en Allemagne après la déroute des sociaux-démocrates (SPD) lors des dernières élections législatives ! En effet, à la faveur de tractations de couloir à l’issue des élections, donc dans le dos des électeurs, une « grande coalition » a été formée à direction démocrate-chrétienne mais avec la participation du SPD. Le ministre de la Défense a même déclaré : « Si quelqu’un m’avait dit au soir des élections que nous arriverions à imposer autant de points sur autant de sujets, je ne l’aurais pas cru » (La Tribune Dimanche, 27 avril 2025) !
En fait, les hommes politiques français sont favorables à la RP, certes parfois avec sincérité, mais souvent pour des raisons politiciennes qui ne les honorent pas : le PS croit pouvoir se détacher des Insoumis, certains membres des Républicains pensent retrouver des sièges dans des départements perdus… alors que François Bayrou aurait tenté d’amadouer quelques indécis en assurant que la RP permettrait d’empêcher le RN d’obtenir la majorité à l’Assemblée Nationale si, par malheur, son candidat l’emportait à l’élection présidentielle !
Nous ne sommes pas tendre habituellement avec Laurent Wauquiez, mais lorsqu’il a déclaré sur BFMTV que la RP institutionnaliserait le « chaos politique », qu’elle consacrerait « les petits accords d’arrière-boutique » et que « les Français ne (choisiraient) plus leurs candidats », nous n’aurions pu le contredire.
4 commentaires
Pas de proprtionelle et, surtout, des scrutins à 1 tour!
La proportionnelle est une idée tentante en termes de fidélité de la représentation.
Hors la difficulté de constituer une majorité gouvernable dans un pays peu accoutumé aux coalitions, un des problèmes électoraux, peu abordé parce que discret, reste les redéfinitions opportunistes des circonscriptions électorales. Une proportionnelle pure devrait alors s’exercer au niveau national, non par circonscriptions.
F. Bayrou est favorable depuis toujours à la proportionnelle car elle favorise les partis centristes.
Qui peuvent ainsi devenir “faiseurs de rois” en négociant leur soutien à telle ou telle alliance.
Ce n’est franchement pas glorieux. C’est le règne de la combinazione.
Et quand on voit ce qui se passe en Allemagne ou en Italie, on ne peut qu’être réticents.
Le seul correctif qu’il faudrait apporter au mode de scrutin actuel, c’est que seuls les deux candidats ayant le plus de voix puissent accéder au second tour (comme pour la présidentielle)- ça nous éviterait tous les “fronts républicains” grotesques et anti-démocratiques.
Bayrou était fermement contre la proportionnelle dans les années 80 me semble-t-il.