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Les Privilégiés de la République

Olivier Calon

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Olivier Caron

Nombre de Français plébiscitent (en théorie du moins) l’ « égalité », plus encore que la liberté. La France n’est-elle pas en effet le pays qui, dans la nuit du 4 août 1789, décida l’abolition des privilèges et des droits seigneuriaux? Force est pourtant de constater qu’en pratique, c’est bien l’inégalité qui règne en maître dans l’Hexagone, non pas l’inégalité – légitime et même souhaitable – découlant du libre jeu des talents et des compétences propres aux individus, mais l’inégalité corporatiste ou institutionnelle, consistant à extorquer certaines ressources aux uns pour les transférer à d’autres. Olivier Calon, journaliste, dresse ainsi dans un récent livre, Les Privilégiés de la République, l’édifiante comptabilité des innombrables privilèges dont bénéficient certaines catégories professionnelles bien précises : agents des « services publics » (SNCF, RATP…), parlementaires, intermittents du spectacle, aiguilleurs du ciel…

Le secteur privé comporte lui aussi pléthore de « privilégiés », rétorqueront bien des Français à la lecture de ces dernières lignes. Ce à quoi Olivier Calon répond avec justesse que ces « privilèges » propres au privé « n’engagent que l’argent privé ». « A contrario, ajoute-t-il, ceux qui existent, nombreux, dans le secteur public ou parapublic pèsent sur l’ensemble de la communauté nationale » (p. 9). Et de même qu’il existe dans notre pays un millefeuille administratif, on peut également parler d’un millefeuille des privilèges et avantages en tous genres, puisqu’un privilège ne se satisfait jamais de lui-même et en appelle toujours un autre (p. 10)… À l’heure où l’on cherche à faire des économies budgétaires et où la maîtrise de la dépense publique apparaît plus que jamais nécessaire, il conviendrait donc d’enrayer cette inflation des privilèges, dont le coût supporté par les contribuables est estimé à 23 milliards d’euros (ibid.).

Parmi les bénéficiaires de privilèges d’autant plus exorbitants lorsqu’ils sont mis bout à bout, Oliver Calon cite déjà certaines fonctions au cÅ“ur même de l’État : anciens présidents et Premiers ministres, députés de l’Assemblée, sénateurs… Le président ayant ainsi coûté le plus au contribuable français fut Valéry Giscard d’Estaing, avec plus de 3 millions d’euros en 36 ans… Quant à François Hollande, ce sont quelque 15 000 euros qu’il aurait touchés mensuellement en 2023, du fait du caractère cumulatif des privilèges – retraite d’ancien président de la République, d’ancien député de Corrèze, d’ancien conseiller de la Cour des comptes, d’ancien président du Conseil général de Corrèze (p. 16). On lira également avec profit (et une certaine stupeur) le chapitre intitulé « Du côté de l’Assemblée nationale et du Sénat », dans lequel Olivier Calon déroule la longue liste d’avantages dont bénéficient les parlementaires dans notre pays (indemnités, dotation annuelle, avance de frais de mandat, etc.).

Autre catégorie professionnelle faisant l’objet d’un chapitre à part entière dans le livre : les agents d’EDF. Au « tarif agent » – qui leur permet notamment de payer l’électricité à 10% du tarif de base -, il faut aussi ajouter les généreuses « primes pour événements familiaux » – un mois de salaire versé en cas de mariage ou de PACS, un mois et demi pour la naissance d’un premier enfant, puis un mois pour les suivants (p. 128-129) – de même que les retraites, vacances et soins de santé particulièrement avantageux.

En ce qui concerne les agents de la RATP, qui méritent amplement eux aussi de figurer dans un chapitre entier, Olivier Calon écrit : « (ceux-ci) cumulent des privilèges (…), fruits de l’histoire de l’entreprise, de la forte pression syndicale, d’un laxisme certain et, comme à la SNCF, du chantage permanent à la grève, très coûteuse et impactant des millions d’usagers » (p. 195).

Il est impossible de rendre compte ici de la masse d’avantages de toutes sortes octroyés aux « privilégiés de la République » que dénonce l’auteur par le menu et chiffres à l’appui, et l’on avisera le lecteur de se plonger dans la lecture directe du texte, qui sera loin de le laisser indifférent…

À partir de là, et vu la pléthore accablante de privilèges qui existent dans notre pays, financés redisons-le grâce à l’argent du contribuable, on peut s’interroger sur la capacité (et la volonté réelle) de nos dirigeants de rebrousser chemin et de s’acheminer vers un état de disparition des avantages dits « acquis ». Ne sommes-nous pas allés trop loin le long de cette funeste pente, qui conduit l’État à être de plus en plus encerclé par toutes sortes de catégories professionnelles publiques ou parapubliques jalouses de leurs prérogatives et qui disposent de moyens de pression d’autant plus redoutables qu’elles sont en situation de monopole ou quasi-monopole – tels que la grève ? C’est en réalité tout le contraire que nous aurions dû faire car, comme l’écrivait Voltaire dans son Traité sur la tolérance – que cite l’auteur du livre (p. 14) : « Il ne s’agit pas de donner des privilèges immenses, des postes de sûreté à une faction mais de laisser vivre un peuple paisible ». Tant qu’une majorité de Français ne comprendra pas que le « laissez faire » est toujours préférable sur le plan économique et social à l’action étatique, tant qu’elle ne saisira pas que les privilèges des uns sont toujours le fruit de la spoliation des autres, le pays continuera à coup sûr de s’enfoncer dans l’inégalité, l’injustice et le clientélisme.

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6 commentaires

BOIN 17 mai 2025 - 12:45 pm

A mon avis deux grandes causes à la situation que vous décrivez : la lâcheté de nos “dirigeants” qui depuis 40 ans cèdent systématiquement aux revendications des groupes de pressions particuliers et ne savent plus depuis longtemps dire NON à ces revendications, MACRON étant plus emblématique de cette “politique”, traumatisé qu’il est depuis la crise des Gilets Juanes, crise qu’il a lui-même provoqué. MACRON a peur de son peuple et ne peut donc plus gouverner depuis 2018. Cette situation produit une bureaucratie proliférante qui finit par nous étouffer, générer de nouvelles revendications auxquelles nos “dirigeants” répondent par de nouvelles “aides” financées par nos impôts… La seconde raison est à mon sens culturelle et met en évidence des caractéristiques de nos “élites” politiques, administratives mais aussi médiatiques, totalement déconnectées des exigences d’une économie de marché ; déconnectées car elles méprisent le monde de l’entreprise privée, les exigences de compétitivité (mot jamais prononcé lors de la dernière campagne présidentielle), la nécessité de faire des profits ; le riche est en France conspué par le microcosme médiatique, surtout du “Service Public” alors qu’il est admiré aux Etats-Unis !
Plus ponctuellement et à propos des privilèges vous pourriez évoquer l’audiovisuel de “Service Public” qui coute je crois au contribuable 4 mrds € /an et où on admet sans problèmes, de voir des “stars” du Service produire eux-mêmes leurs propres émissions, se remplir les poches en total conflit d’intérêt et…donner des leçons de “vertu” en critiquant les riches… du secteur privé bien sûr !

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Y'enamarre 17 mai 2025 - 4:12 pm

Voilà de quoi bien énerver le petit ouvrier qui trime comme un malade (sans aucuns avantages lui) pour gagner sa vie afin de survivre et payer ses factures pour au final se faire ponctionner la moitié de sa paye afin de rémunérer grassement tout ces parasites !!

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Denis Huneau 18 mai 2025 - 1:58 pm

Appeler privilège l’obligation d’être accompagné d’un service de sécurité est un contre-sens !

Manifestement l’auteur confond tout : accorder un statut convenable aux parlementaires peut se comprendre , accorder deux fois plus de retraite à un éboueur fonctionnaire qu’à son homologue du privé beaucoup moins !

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Dom' 18 mai 2025 - 6:14 pm

A ma connaissance, EDF est une SA

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Dom' 18 mai 2025 - 6:14 pm

A ma connaissance, EDF est une Société Anonyme dont l’Etat est actionnaire majoritaire

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Rob 21 mai 2025 - 10:24 am

Cet article tout à fait intéressant n’a pas vocation à faire la liste des privilèges de la fonction publique. Je souhaite cependant rappeler un fait resté pour moi édifiant bien que très ancien. Mon père haut fonctionnaire avait été détaché 2 mois à NYC à L’ONU au moment de la décolonisation. 2 mois avec suite grand hôtel avec voiture chauffeur. Quelle ne fut pas sa surprise quelques mois après son retour à son ministère à Paris de constater que ces 2 mois passés à NYC lui avaient été payés double et qu’ils n’étaient pas imposables…

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