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Avec la crise en Ukraine, l’Union européenne prend un virage interventionniste en matière énergétique

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La guerre en Ukraine a placé brutalement l’Union européenne face à sa faiblesse et sa dépendance au gaz russe. Elle a mis les 27 dans des positions plus ou moins difficiles. Lorsque la France n’importe que 20% de son gaz de Russie, les Allemands en sont dépendants à 55% et les pays de l’Est, à 100%. Ce qui remet en question la sécurité d’approvisionnement de ces pays à court, moyen et long terme. Surtout, les prix du gaz ont augmenté de manière exponentielle sur les marchés de gros. Les pays européens subissent cette hausse du gaz autant que celle des prix de l’électricité car sur les marchés européen de l’énergie, les prix de l’électricité sont imbriqués avec ceux du gaz. Face à la crise, les fonctionnaires de la Commission européenne et les pays membres, dirigés par des gouvernements d’obédience socialiste ont ouvert la boîte de Pandore de l’interventionnisme forcené.

L’idée d’un plafonnement des prix du marché de gros

On connaissait  le blocage des prix du gaz et de l’électricité pour les consommateurs instauré par le gouvernement français depuis octobre. L’UE envisage désormais d’agir directement sur les marchés de gros pour plafonner les prix. La France est à l’instigation de cette proposition. Elle table sur un prix de gros de 180 euros/ MWh et tente de convaincre les pays fournisseurs de gaz d’accepter la proposition. En effet, si le blocage des prix à la consommation intervient par décision unilatérale de l’Europe, la Commission ne peut pas contraindre le Qatar, le Nigeria, l’Algérie ou la Norvège à vendre leur gaz au prix de 180 euros. Surtout, une telle action serait inédite et ferait date en marquant la fin du libre marché en Europe. Les conséquences pour le consommateur pourraient être dramatiques car les pays fournisseurs mécontents de ne pouvoir vendre leur gaz au prix du marché se détourneraient du marché européen. Dans le contexte d’une demande exacerbée et d’un marché sous tension, l’UE risque de se saborder. D’autant que pour pallier d’éventuelles ruptures d’approvisionnement en gaz russe, les pays européens ont multiplié les commandes de GNL (gaz naturel liquéfié) venant des Etats-Unis, du Qatar et d’Algérie. Il apparaît difficile de convaincre ces pays de vendre à un tarif inférieur aux prix du marché, qui ont atteint les 300 euros/ MWh au lendemain de  l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Ils se sont depuis stabilisés autour de 250-280 euros/ MWh.

Le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, a proposé que l’UE paye aux fournisseurs la différence entre le prix plafond et le prix du marché, pour un coût estimé à plus de 6 milliards d’euros. Il est vrai que la situation est inédite. Cependant, depuis la libéralisation du marché de l’énergie au début des années 2000, les marchés de gros ont relativement bien fonctionné. Personne ne pensait à un plafonnement des prix ni à une quelconque réforme lorsque les prix de gros du gaz dépassaient timidement 40 euros/ MWh. Pendant de nombreuses années, les gouvernements et les consommateurs en ont profité pour se chauffer à des prix très bas. Les politiques sont souvent ingrats car lorsque la crise vient et que le marché n’est pas en mesure d’absorber la volatilité des comportements des acteurs économiques, ils en font un bouc-émissaire idoine. Les étatistes de France, d’Espagne ou de Belgique revendiquent l’implantation de mécanismes régulatoires très complexes et inefficients.

L’opposition des pays libéraux bloque le projet

Fort heureusement, il demeure en Europe des pays libéraux et favorables aux marchés. L’Allemagne et les Pays-Bas ont pris la tête des opposants au projet de la France et de la Commission. Les Néerlandais prévoient de relancer la production du champ gazier de Groningen situé dans le nord du pays. Inutile de dire que la condition sine qua non à une augmentation de la production est de pouvoir vendre au meilleur prix sur les marchés de gros. En outre, les Allemands et les Néerlandais font le constat suivant : bien que les marchés soient au plus haut aujourd’hui, ils devraient finir par se stabiliser à moyen terme. Les mesures de régulation enverraient de mauvais signaux aux investisseurs. Elles permettraient de limiter le coût pour les acteurs économiques à court terme, mais à moyen-long terme les pays gaziers pourraient se détourner du marché européen et trouver de nouveaux débouchés pour vendre leur gaz. L’Asie, où la demande ne cesse d’augmenter, pourrait devenir un partenaire prioritaire pour les pays exportateurs.  En Europe, ce plafonnement limiterait la recherche et le développement de nouveaux sites et moyens de production.

Sans tomber dans un excès d’interventionnisme, plusieurs solutions existent actuellement. Thierry Bros, spécialiste des questions énergétiques, préconise de suspendre le marché européen du carbone sur les 18 prochains mois. En effet, une partie de l’augmentation des prix de l’énergie est nourrie par l’augmentation de la tonne de carbone dont les prix se sont stabilisés à 80 euros contre 30 euros début 2021. Depuis 2019, l’UE réduit progressivement les quotas d’émissions de 4,4% par an, en conséquence les prix se sont envolés. En période de crise de l’offre, le prix du carbone pèse très fortement sur les marges des acteurs économiques. Polluer coûte donc plus cher, et donc acheter et consommer  du gaz coûte plus cher.. La solution de la suspension du marché du carbone apparaît comme une solution adaptée temporairement. La crise révèle les pires aspects de l’étatisme, l’UE n’y échappe pas .Malgré cela, la Commission a fait quelques propositions opportunes pour l’avenir, comme d’instaurer des stockages de gaz représentant autour d’un tiers de la consommation annuelle des pays membres. Ces stockages permettent de faire face à des situations inédites comme celles que nous connaissons avec la Russie.

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1 commenter

Obeguyx 12 avril 2022 - 9:33

Eh oui, c’est toute la « joie » de la gestion socialiste.

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