Alors que la Cour des comptes propose un remboursement des médicaments au prorata des revenus, le président LFI de la Commission des finances propage lui des contre vérités absolues sur la fiscalité relative des riches et des pauvres.
Atlantico : Sur le plateau de BFMTV, le président de la Commission des Finances, Eric Coquerel, avançait ce mardi 15 avril que l’impôt sur le revenu aurait augmenté pour tout le monde sauf pour “les 10 % les plus riches” en 2024. Il s’appuie sur la note de la DGFIP pour tenir un tel propos. Dans quelle mesure peut-on parler a minima d’incompétence et, au pire, de malhonnêteté ?
Jean-Philippe Delsol : Monsieur Coquerel ne semble savoir lire les notes de la Direction générale des finances publiques. En effet, dans sa note d’avril 2025 Statistiques N°32 la DGFiP observe qu’au titre de la déclaration en 2024 des revenus générés en 2023, seuls 19 millions de foyers fiscaux (45 %) se sont acquittés d’un impôt net positif. Le nombre des non-imposés est resté stable. Le revenu total net déclaré a cru sensiblement plus que l’inflation (+ 5,4 %, contre + 4,8 % pour l’indice des prix hors tabac) mais le produit total de l’impôt sur le revenu au titre de l’année 2023 n’a progressé que de + 1,8 %, atteignant 83 Md€, principalement du fait d’une croissance plus faible du revenu dans les tranches d’imposition supérieures—les 10 % des foyers les plus aisés. Néanmoins ces derniers contribuent à 76 % de l’impôt net. « Le nombre de foyers appartenant à la dernière tranche du taux marginal d’imposition, observe la DGFiP a diminué de 8,6 %, amputant l’impôt au barème collecté au titre de cette tranche (- 5,3 %) […]. L’effectif de cette tranche se contracte depuis plusieurs années, avec 12,6 % de foyers de moins qu’en 2018. En clair, cette note explique que le nombre de contribuables ayant des revenus élevés se rétrécit et que leurs revenus sont moins importants qu’il ne l’étaient. Comme ce sont ces foyers fiscaux qui sont les plus contributifs à l’impôt, le produit de l’impôt augmente moins que l’inflation !
Bertrand Martinot : Commençons par préciser un premier point important : de toute évidence, il n’y a aucune pensée économique dans la réflexion de Monsieur Coquerel. De tels propos relèvent de la démagogie à l’état chimiquement pur. Le fond du propos consiste fondamentalement à dire qu’il faudrait massivement augmenter les impôts, tout en prétendant évidemment que l’on pourrait le faire en préservant les classes populaires et moyennes. C’est faux, évidemment. Notons également qu’Eric Coquerel dit l’exact inverse de la source sur laquelle il s’appuie, c’est-à -dire la dernière note de la DGFIP. Ne perdons pas de vue, à cet égard, qu’Eric Coquerel est président de la Commission des Finances à l’Assemblée nationale. Il est très inquiétant de constater le niveau économique et financier de certains de nos élus. Reste à savoir s’il s’agit d’une erreur que l’on peut attribuer à l’incompétence ou bien d’un réflexe purement démagogique ? Dans un cas comme dans l’autre, expliquer que l’on peut créer de l’argent magique à hauteur de plusieurs dizaines de milliards supplémentaires sans que personne n’en sorte pénalisé – sinon quelques familles riches qu’il suffirait de taxer plus qu’aujourd’hui,c’est une sorte de trumpisme de gauche. .
Du reste, il me semble important de rappeler que la question soulevée par Eric Coquerel n’est peut-être pas, en elle-même, la plus importante : savoir précisément quelle tranche a payé telle ou telle part d’impôt sur le revenu en 2024 par rapport à 2023 est quelque peu anecdotique. Les impôts sont ce qu’ils sont. Les tranches d’impôt sur le revenu les plus élevées sont de 45 %, c’est-à -dire qu’elles sont déjà très élevées. Si l’IR rapporte moins une année c’est potentiellement le fait d’effets de seuils. Le fait, plus important, que traduit cette situation, c’est le refus obstiné d’une partie de la gauche d’admettre ce que rappellent tous les statisticiens, notamment à l’INSEE, depuis maintenant des années : le fait que la France est l’un des pays du monde où les inégalités de revenus sont les plus faibles et que cela s’explique par l’étendue de notre système de prélèvement comme de redistribution.
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