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Dirigeants européens : la fin ne justifie pas les moyens

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Les dirigeants des démocraties occidentales ont renoncé à promouvoir le bien commun et préfèrent courir après les électeurs en se contentant d’afficher du bout des lèvres des objectifs utopiques. Par conséquent, les électeurs se sentent de plus en plus exclus et méfiants, et se tournent vers les théories du complot. Pour regagner la confiance des citoyens, les élites devront abandonner les principes rigides du politiquement correct et permettre un débat public équitable et ouvert sur les problèmes auxquels nos sociétés sont actuellement confrontées.

En 1893, Anatole France a écrit dans Les Opinions de Jérôme Coignard sur la Révolution française et ses horreurs : « La folie de la Révolution a été de vouloir établir la vertu sur terre. Quand on veut faire des hommes bons, sages, libres, modérés et libéraux, on est conduit au désir fatal de les tuer tous ». La liberté, l’égalité et la fraternité sont devenues un prétexte pour le meurtre de masse. La « Vertu » non seulement légitimait mais exigeait des dénonciations et des massacres. C’est ce qui résulte de la conviction que toute fin, même si elle est totalement utopique, justifie les moyens.

Depuis toujours, le système français s’articule autour d’une petite élite qui contrôle les processus politiques, commerciaux et même culturels. Le régime de gouvernement français pré-révolutionnaire avait un problème supplémentaire : il était presque impossible pour les nouveaux venus de pénétrer dans ce cercle restreint. La classe dirigeante était autosuffisante et ne représentait pas les intérêts de la population.

Il en résultait un flot de fausses nouvelles et de théories du complot, ce qui créait de la méfiance, de la violence et des troubles. Le fossé entre les dirigeants et les citoyens était devenu disproportionné. Ce manque de compréhension a ouvert la voie à la révolution et a permis aux agitateurs de gagner des adeptes.

Une évolution pacifique

Sur le long terme, la bonne gouvernance est basée sur le pragmatisme. Les habitudes évoluent, mais la nature humaine ne change pas. Les bons dirigeants ne sont pas dogmatiques et tentent de promouvoir le bien commun tout en respectant les libertés et les droits individuels. Un système judiciaire qui fonctionne et qui ne peut être influencé par le sentiment public ou la pression politique est essentiel.

Ces aspects ont été importants dans le développement de la démocratie britannique, ainsi que dans la Constitution des États-Unis, mais aussi dans les actes de certains monarques absolus éclairés du XVIIIe siècle, comme l’impératrice autrichienne Marie-Thérèse et ses successeurs. C’est ce pragmatisme qui a bâti nos démocraties modernes fondées sur l’état de droit.

En conséquence, les systèmes peuvent désormais évoluer par le biais de procédures constitutionnelles, sans violence. C’est pourquoi la liberté d’expression est importante, même si une opinion contredit l’esprit de l’époque, le sentiment public ou des idées largement acceptées. Les actes violents et illégaux n’ont pas leur place dans les sociétés libres, même si certains groupes estiment que la « vertu » leur donne droit à un tel comportement.

Il ne s’agit pas de critiquer les groupes qui veulent améliorer la société. Au contraire, les initiatives des religions et de la société civile sont essentielles pour le bon fonctionnement des communautés. Mais elles doivent accepter les attitudes et les opinions dissidentes. À long terme, une société saine ne se construit pas sur le conformisme mais sur la pluralité.
Malheureusement, en raison de la bureaucratie ainsi que des structures rigides des partis politiques, le fossé entre l’élite politique et la population s’est creusé dans toutes les sociétés occidentales. La politique consiste désormais à gagner des électeurs plutôt qu’à servir les besoins à long terme de la res publica.

L’intolérance est en hausse. Nous n’avons pas atteint l’extrême violence de la Révolution française, mais on peut établir un parallèle. Nous voyons de plus en plus les politiciens présenter leurs choix comme la seule option possible. Les médias marginalisent fréquemment les opinions non conventionnelles même si elles sont logiques et fondées. Les voix, qu’elles soient bonnes ou mauvaises, qui doutent de l’efficacité des vaccins Covid ou des confinements successifs, sont surnommées « covidiots » par les fonctionnaires et les journalistes. Même les critiques les plus modérées des accords de Paris sont considérées comme des climatosceptiques. Les groupes politiques qui « osent » critiquer les décisions de l’Union européenne sont qualifiés d’anti-européens, même s’ils soutiennent pleinement une intégration européenne réaliste.

Cette absence d’alternatives devient un dogme. Les gens commencent à croire que la fin justifie les moyens. Au nom de la protection du climat, les manifestants détruisent des magasins et des voitures et vandalisent les biens publics. Pendant les émeutes de Portland et plusieurs autres, les partisans de Black Lives Matter ont oublié la sage insistance de Martin Luther King pour que la protestation soit pacifique. Ces réactions ont nui aux manifestations légitimes après l’assassinat de George Floyd.

Certaines universités estiment désormais que leur vocation est de transmettre une éthique et des convictions plutôt que des connaissances, et excluent les opinions considérées comme déplacées. Mais il n’y a aucune raison d’exclure du débat public des idées bien fondées. La discussion ouverte est l’un des piliers du monde universitaire.

Pour faire face au Covid-19, il faut agir, mais la discussion est censurée. Même dans ces circonstances difficiles, un débat clair et ouvert serait préférable à l’attitude autoritaire des gouvernements et à la panique de la plupart des médias.

Des prétextes peu convaincants

En juillet 2020, les principes fondamentaux de l’Union européenne ont été brisés afin de créer une « union de transfert » entre les Etats membres. Cela limite fortement le principe de subsidiarité et porte atteinte à la souveraineté nationale. L’Union disposera désormais de son propre budget, qui ne respecte pas les règles originelles de l’Europe. Tous les États membres, et donc leurs citoyens, en seront responsables, et la Banque centrale européenne créera de l’argent. La véritable raison de cette initiative est que la plupart des États membres sont en grande difficulté financière et que Bruxelles voulait sauver l’Union en tant qu’institution. Le prétexte était de financer la relance post-Covid, le progrès économique, et de créer une économie plus verte. Ces réformes créeront plus de préjudices à long terme que de bénéfices. Une économie durable, qu’elle soit verte ou non, ne peut être créée par une planification gouvernementale. Ce plan détruira les systèmes d’épargne et de retraite. Le problème de la dette publique sera reporté, et non pas résolu, par la dévaluation du pouvoir d’achat des ménages.

La distance croissante entre l’élite politique et l’ensemble de la population entraînera une plus grande agitation.

Tout cela donne du pouvoir aux groupes politiques qui abusent de l’opinion publique et favorise des intérêts particuliers. . Par exemple, les gouvernements et l’Organisation mondiale de la santé ne fournissent pas toujours des explications convaincantes pour les mesures du Covid-19. L’impression a surgi, de manière compréhensible, qu’il y aurait un programme politique derrière la lutte contre Covid. Un niveau si élevé de méfiance n’est malheureusement pas une bonne chose. A l’origine du politiquement correct et de la « cancel culture » qui revendique de supprimer le passé critiquable, il y avait peut-être quelques bonnes intentions. Mais ces notions ont été kidnappées par des fanatiques qui mettent en danger la liberté individuelle et sont utilisées pour imposer conformité et censure. La distance croissante entre l’élite politique et l’ensemble de la population entraînera une agitation grandissante, mettant en péril la démocratie et l’État de droit.

Lien de l’article sur le site du GIS.

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1 commenter

ioumie 19 janvier 2021 - 6:06

conviction et responsabilité
Le problème c'est que depuis bien longtemps l ethique de conviction règne sans partage ,il faut que justice soit faite le monde dut-il en périr.On défend des principes en se moquant du reel!On s indigne,on est dans le camp du bien et on réfute l ethique de responsabilité qui tient compte du reel ,est pragmatique necessite des compromis (et non de la compromission)Le choix n est jamais entre le bien et le mal(contairement à ce que croient de façon tres confortable les bien_pensants de l ethique de conviction)mais entre le préferable et le detestable.La plupart du temps on a le choix uniquement entre plusieurs maux et il faut choisir avec intelligence et lucidité le moindre mal;impensable pour nos idealistes ,utopistes qui ont leur bonne conscience avec eux alors qu il s agit d une forme particulièrement évoluée de cynisme confortable .Comme disait Pascal"la vraie morale se moque de la morale"

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