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Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !

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Selon une étude réalisée par l’Insee en Occitanie, environ 390 000 salariés (chiffre portant sur l’année 2017), sur 1,8 million, se trouvaient en situation de déclassement professionnel, soit un salarié sur cinq. Pour l’ensemble de la France métropolitaine, plus de quatre millions de salariés pourraient ainsi se trouver dans cette situation.

Avant de nous plonger dans les chiffres, précisons ce qu’est le déclassement professionnel. L’Insee l’apprécie à partir du lien entre le niveau de diplôme d’un salarié et sa profession. Ainsi, il y a adéquation lorsque le niveau de diplôme du salarié correspond à celui qui est le plus fréquent au niveau national pour la profession exercée. Si sa qualification est inférieure, il est en situation de surclassement. Si elle est supérieure, le salarié est alors en situation de déclassement.

Les plus diplômés sont aussi les plus touchés

Avec 22 % de salariés déclassés, l’Occitanie se classe à la troisième place des régions métropolitaines derrière la Bretagne (24 %) et la Corse (23 %). Mais, précise l’Insee, l’écart entre les régions est faible, et la moyenne métropolitaine s’établit à 21 %.

Avec la définition du déclassement adoptée par l’Insee, les salariés sans diplôme ne peuvent pas être déclassés. De même, la plupart des ouvriers et des employés du secteur des services aux particuliers (aides à domicile, assistantes maternelles, serveurs…), même s’ils sont titulaires d’un CAP ou d’un BEP, sont rarement déclassés. Le déclassement commence en fait quand le salarié est bachelier et touche alors environ 3 salariés sur 10.

Mais ce sont surtout les détenteurs d’un diplôme de niveau Bac +3 ou Bac +4 qui sont plus souvent en situation de déclassement : 4 sur 10 occupent un poste moins qualifié que ce à quoi ils pourraient prétendre (voir graphique ci-dessous). Le phénomène concerne aussi, quoique dans une moindre mesure, les diplômés de BAC +5 et les titulaires d’un doctorat.

Le déclassement touche également les moins de 30 ans, concernés dans 6 cas sur 10. En Occitanie, comme dans le reste du pays, le déclassement est, en général, maximal en début de carrière. Les jeunes d’aujourd’hui sont plus diplômés que leurs aînés et présentent un risque de déclassement plus élevé.

L’Insee n’a pas noté, chez les moins de 30 ans, de discriminations liées à la nationalité ou au sexe. Précisons également que là où l’offre d’emplois est la plus vaste et la plus variée – en l’occurrence ici les métropoles de Montpellier et Toulouse – le déclassement est moindre.

Enfin, les métiers ne sont pas concernés de la même manière. Dans les professions réglementées, pour lesquelles un diplôme est exigé, le déclassement est peu présent. C’est le cas, par exemple, dans la santé. En revanche, dans les métiers administratifs de la fonction publique, plus de la moitié des agents sont déclassés. Car, si le baccalauréat reste le niveau statutairement requis pour passer les concours d’entrée de catégorie B, 28 % des agents de cette catégorie ont au moins un Bac +3.

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Les explications fournies par l’Insee ne sont pas complètes

Pour l’Insee, le déclassement professionnel résulte de la rude concurrence pour l’emploi sur le marché du travail, qui elle-même trouve son origine dans l’élévation globale du niveau de diplôme. « Face à un poste auquel est associé un statut social et une rémunération prédéterminée, une file d’attente se crée, en tête de laquelle se trouvent souvent les candidats les plus diplômés. En fonction de la longueur de cette file, les individus sont parfois amenés à arbitrer : soit prolonger l’attente et rester au chômage, soit changer de file d’attente et postuler pour un emploi moins qualifié, donc être déclassés ».

Selon l’organisme public, la mise en place du système LMD (Licence-Master-Doctorat), qui a réformé le cursus universitaire français pour l’adapter aux standards européens, a également sa part de responsabilité puisque, désormais, les niveaux Bac +3 et Bac +4 apparaissent davantage comme les étapes d’un parcours complet menant jusqu’à l’obtention d’un diplôme d’ingénieur, d’un master voire d’un doctorat, et se trouvent ainsi dévalorisés aux yeux des recruteurs.

Ces explications sont un peu courtes, et on subodore que les fonctionnaires de l’Insee n’ont pas voulu fâcher leurs collègues de l’Éducation nationale, ni les politiques qui se sont succédés à sa tête depuis des décennies.

On pourrait, en effet, commencer par critiquer la réforme Haby de 1975 (collège unique) qui s’est poursuivie par l’objectif fixé par Chevènement en 1985 de conduire 80 % des jeunes Français au bac et qui a abouti, en 2020, Covid oblige, à l’effacement des épreuves sous la houlette de Blanquer. Ce n’est pas le grand oral et l’épreuve de philosophie, maintenues en 2021, qui ont vraiment changé la donne : désormais, on donne le bachot à tout le monde !

Le ministère de l’Éducation nationale indique, sur son site, qu’en 2020, le pourcentage de bacheliers dans une classe d’âge était de 87 %. En 1980, il était de 26 %. A peine 64 % des candidats obtenaient leur diplôme en 1980. Ils étaient presque 96 % en 2020 (90,5 % en 2021). Tous ces bacheliers se retrouvent ensuite dans l’enseignement supérieur (98 % des bacheliers généraux, 90 % des bacheliers technologiques).

Cette fuite en avant a comme première conséquence la baisse de niveau, reconnue par tous les classements internationaux. Le niveau du bac baisse et cela a bien évidemment des répercussions dans l’enseignement supérieur. Par conséquent, si aujourd’hui, les BAC +3 sont dévalorisés, ce n’est peut-être pas seulement à cause de la réforme LMD, mais peut-être parce qu’il faut déformais recruter un Bac +5 pour avoir l’équivalent d’un licencié diplômé en 2000.

On pourrait également interroger le contenu des enseignements. Les centaines de milliers de diplômés de l’enseignement supérieur qui arrivent chaque année sur le marché du travail ont-ils une formation en adéquation avec le besoin des entreprises ? L’Insee note, au détour d’une phrase, que « la licence professionnelle qui vise une insertion immédiate sur le marché du travail » ne subit pas l’opprobre de la licence classique. L’enseignement professionnel est, en effet, plus proche du monde de l’entreprise et les enseignements davantage ancrés dans la réalité du monde du travail. A cet égard, l’augmentation des contrats d’apprentissage est une bonne nouvelle : confrontés à la réalité du monde du travail, les jeunes vont y gagner une meilleure insertion professionnelle et un moindre déclassement à l’embauche.

Enfin, on pourrait se demander s’il est bien raisonnable de laisser, chaque année, des bataillons de jeunes s’engager dans des voies comme la sociologie, la psychologie ou l’histoire de l’art. Quels débouchés espèrent-ils vraiment ? Ce sont probablement en partie eux qui, ensuite, se présentent aux concours de la fonction publique, intègrent des emplois aidés ou viennent grossir les rangs des demandeurs d’emploi. Pendant ce temps-là, 260 000 emplois ne sont pas pourvus et le taux de chômage « officiel » est de 8 %.

L’exemple suisse

La Suisse – mais aussi l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, etc. – privilégie l’enseignement professionnel. A peine 40 % des jeunes Helvètes s’engagent dans une filière menant au baccalauréat (maturité) et ouvrant la porte des études supérieures. Les autres s’engagent dans une formation professionnelle en apprentissage (formation duale).

Ce système fait que 90 % des jeunes obtiennent un diplôme de fin d’études secondaires en Suisse. Et c’est une des raisons qui expliquent la bonne santé de l’économie helvète, la puissance de son industrie et son faible taux de chômage (2,8 %).

Il est peu probable que la France fasse machine arrière et s’inspire de l’exemple suisse. Par conséquent, la seule solution reste de libérer l’école et l’université de l’État.

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10 commentaires

Dominique 15 septembre 2021 - 3:51

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
Il fut un temps où les diplômes n’étaient réservés qu’à un petit nombre et pourtant, la France s’est toujours redressée après les désastres des 1ère et 2ème guerres mondiales. Et que dire du patrimoine extraordinaire depuis le moyen âge ! Non les diplômes ne font pas la compétence et ne justifient pas la plupart du temps un salaire ou un traitement pour un jeune bac+3 sans expérience équivalent à celui d’un salarié ou d’un fonctionnaire peu diplômé mais expérimenté et efficace !
Cela se vérifie tous les jours partout où nous avons recours aux services de l’administration !

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Laurent 15 septembre 2021 - 3:55

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
Faute à l’éducation nationale ou à la politique initiée par Chevènement qui veulent le bac pour tous et de plus en plus de diplômes quitte à les dévaloriser. Faute à cette politique ignoble et prétentieuse qui veut de la France le pays le plus diplômé au monde, et quels diplômes ? des diplômes qui n’ont pas de débouchés ? des diplômes juste pour entrer dans une administration ou au RSA ? alors que les entreprises ne trouvent plus de main d’oeuvre pour des travaux que les soit disant diplômés ne veulent plus faire !
Les centres de formation des grandes entreprises fort réputés il y a une cinquantaine d’année détruites par la politique et les élites gauchistes Français sans oublier la fameuse égalité à la Française qui est sans nul doute aussi responsable de la situation actuelle. Faire de la France un pays d’élites était leur objectif et le seul objectif des gauchistes qui ont toujours eu la haine envers l’ouvrier et le patronat jusqu’au plus petit artisan toujours mis au même niveau que le patronat des grosses entreprises et lesquels il faut taper, taxer et humilier au moindre écart pour le bonheur des fainéants gauchistes caviar. Ce n’est que la résultante de la main mise des cultureux gauchistes de France sur la gouvernance Française à l’image ancestrale des pays communistes. Et ce n’et pas fini l’égalité pour tous et pour tous ceux venus du monde entier pour profiter des seuls bienfaits de cette politique fera le reste du travail pour enterrer la France et la diriger vers des périodes plus noires encore.

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ERIC JEANMONNOT 15 septembre 2021 - 4:13

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
Cette analyse est totalement juste

L ‘Université francaise delivre annuellement 100 000 doctorats , et elle ne cree que 10 000 postes de Maitre de Conferences des Universités , qui est le debouche naturel des doctorants , donc par soustraction , 90 000 doctorants ne trouveront pas de postes . Ces gens vont donc occuper des emplois qui ne correspondent pas a leur niveau .

L ‘administration francaise propose des concours pour lesquels il y a maintenant en moyenne 15 candidats pour un poste auxquels se presentent des gens qui sont surdiplomés et d ‘un rang tres superieurs au niveau requis . Par soustraction , que feront ceux qui echouent a ces concours ?

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Nicolas Carras 15 septembre 2021 - 4:21

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
« …la seule solution reste de libérer l’école et l’université de l’État. »

Bon courage… Face au sectarisme et dogmatisme d’essence socialiste et à l’étatisme franco-français qui sclérose ce pays.

« Il est peu probable que la France fasse machine arrière et s’inspire de l’exemple suisse. »

C’est certain, car la médiocrité a pris le pouvoir en France, et la médiocrité a pour ennemi ce qui lui fait réaliser qu’elle est médiocre : l’excellence.

La France, ce pays où l’on confond individualisme et destruction de l’individualisme, capitalisme et destruction du capitalisme.

Avec Onfray et compagnie qui vont tenter de nous faire croire que la France souffre d’une dictature du libéralisme et du capitalisme et que l’individualisme est ce qui ruine les relations sociales dans ce pays.

On est bien mal barré.

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ambelouis 15 septembre 2021 - 7:06

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
juste une observation et un simple constat :
LE CORPS DU MAMMOUTH GROSSIT CHAQUE JOUR UN PEU PLUS DEPUIS PLUS DE 50 ANS… IL EST DEVENU ÉNORME ET SANS PERSPECTIVE DE CURE D’AMAIGRISSEMENT !
IL Y AURA BIENTÔT PLUS DE FONCTIONNAIRES A L’ÉDUCATION NATIONALE (ministère de l’Instruction Publique) que d’habitants en France…
Ainsi, dans les faits, la performance et les résultats sont inversement proportionnels aux nombres de fonctionnaires « présents » dans l’Éducation Nationale .( Instruction Publique) A suivre !

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Geoffroy 15 septembre 2021 - 9:28

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
Ce très intéressant article n’envisage à aucun moment l’effet, dans le déclassement observé, d’une sortie de la « méritocratie » : des gens diplômés étant de plus en plus souvent mis en concurrence avec des non diplômés moins exigeants en matière de rémunération…

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Philbert Carbon 15 septembre 2021 - 2:33

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
Merci à tous pour vos commentaires.
En réponse à Geoffroy : peut-être avez-vous raison, mais je ne sais pas comment mesurer le phénomène que vous indiquez.

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Alex 15 septembre 2021 - 4:22

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
M. Aschiéri, fondateur et dirigeant de la FSU (premier syndicat de l’Éducation Nationale) l’a dit clairement dès les années 90 :

« L’Éducation Nationale n’est pas là pour fournir des esclaves au patronat ».

Ne cherchez pas plus loin.

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Philbert Carbon 16 septembre 2021 - 10:25

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
Merci à Alex de nous rappeler les propos ahurissants de Gérard Aschieri !

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AlainD 16 septembre 2021 - 9:45

Un salarié français sur cinq en situation de déclassement professionnel. La faute à l’Éducation nationale !
Le bac ! Que ne fait on pas pour que les potaches l’obtiennent ? Les correcteurs leur donnent avec 8/20 de moyenne et encore font ils parfois un petit effort quand les élèves n’y arrivent pas pour « forcer » un peu un mauvais résultat. Mais quelle valeur réelle doit on accorder à des diplômes galvaudés ? D’aucuns me qualifieront peut être de cynique mais je ne puis m’empêcher de penser qu’il y a une volonté délibérée de la part de nos gouvernants (depuis longtemps) de maintenir la plèbe dans une sorte d’ignorance pourvu qu’on lui accorde du pain et les jeux du cirque, c’est à dire en rajeunissant un peu la formule : des aides sociales et du foot…
Je suis tout à fait d’accord avec l’idée de redonner à l’apprentissage ses lettres de noblesse sous conditions que l’enseignement soit fait par des professionnels auxquels on aura inculqué un minimum de pédagogie – ce qui n’est pas toujours le cas – et par ailleurs que les employeurs n’utilisent pas les apprentis dont ils ont accepté la charge comme des manoeuvres destinés au nettoyage ou à des besognes fort peu en rapport avec la branche choisie.
L’enseignement professionnel mérite également un gros effort pour former des techniciens de haut niveau ce qui ne doit pas les empêcher d’avoir un tant soit peu de culture générale. La même culture générale devrait d’ailleurs ne pas manquer aux personnels enseignants : j’ai entendu un jour une « professeure des écoles » avouer qu’elle ignorait dans quelle mer se trouve l’île d’Elbe !!

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