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Secteur public : Il est urgent de mettre fin à certaines rémunérations indécentes

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La révélation impromptue de la rémunération brute à près de €15 000 (14 700 exactement) par mois de la Présidente de la Commission Nationale du Débat Public a fait l’effet d’une bombe sur l’opinion. Mais celle-ci ne sait sans doute pas qu’il existe plus de 1 200 agences, commissions, autorités et autres instances en tout genre contrôlant un périmètre économique annuel de plusieurs dizaines de milliards d’euros, avec à leur tête des dirigeants le plus souvent mieux que bien payés. Elle ne sait pas non plus que si certains jouent un rôle effectif, beaucoup trop de ces « satellites » ont été créés afin de desserrer l’étreinte des grilles de rémunération de la fonction publique et d’offrir des postes particulièrement avantageux à ceux qui ont su s’obliger d’une manière ou d’une autre le pouvoir en place (ou parfois son prédécesseur !).

Mais même en restant au cœur de la fonction publique, l’opinion publique n’a aucune idée de l’importance des primes accordées aux fonctionnaires qui peuvent parfois dépasser 140% de leur traitement indiciaire (au total = 100 + 140 = donc pas moins de 240% du traitement indiciaire correspondant !), ce qui bien évidemment relègue la grille des rémunérations de la fonction publique et même les échelles-lettres dans la catégorie des accessoires. D’ailleurs ces primes qui ne cessent d’augmenter d’année en année s’avèrent le moyen le plus commode pour contourner le blocage du point d’indice qu’on impose à la masse des fonctionnaires qui ne touchent pas ou presque de primes. Quant aux emplois supérieurs, ils peuvent atteindre, primes comprises, des sommets de rémunération tels :

-qu’à Bercy 150 hauts fonctionnaires gagnent bien davantage que leurs Ministres

-et que Vincent Jauvert (auteur des « Les intouchables d’État » dont nous avons largement rendu compte en ces colonnes) recense toutes administrations et tous corps confondus pas moins de 500 hauts fonctionnaires qui gagnent davantage que le Président de la République lui-même.

Or ces agents et quelques autres, qui figurent souvent sur des listes « furtives » (les Ministres eux-mêmes ont le plus grand mal à les obtenir de leurs propres services), comptent parmi les plus prompts à vouloir encadrer étroitement les rémunérations des plus brillants de leurs homologues privés. Ces derniers encourent pourtant constamment le risque de la révocation en répondant chaque année de leur gestion devant des actionnaires et, en plus, leurs rémunérations présentent pour le contribuable l’immense avantage de ne pas peser sur les prélèvements publics.

Nos lecteurs savent que si elle reconnaît volontiers le bien fondé de certaines de leurs revendications notamment contre le matraquage fiscal en vigueur depuis plusieurs années, l’IREF est très loin d’épouser l’ensemble des doléances des gilets jaunes. Mais puisque l’heure est aux propositions, que le sujet de l’organisation et le fonctionnement du secteur public est au cœur des débats et qu’il fait partie des thèmes présentement encore « autorisés », notre Institut est fier d’apporter aux débats sa contribution sous forme de six articles issus à la fois du bon sens, de la logique, du dévouement et du désintéressement qu’on peut légitimement attendre de quelqu’un qui par goût, par conviction et par dévouement au bien commun, a choisi l’exercice de fonctions publiques:

Article 1

Aucun fonctionnaire, ni autre salarié d’un Ministère ou d’une instance rattachée à ce Ministère ne peut prétendre à une rémunération effective supérieure à celle du Ministre ayant directement ou indirectement autorité sur lui.

Article 2

Aucun fonctionnaire, ni autre salarié d’un organisme public indépendant et non rattaché à un quelconque Ministère ne peut prétendre à une rémunération effective supérieure à celle du Président de la République.

Article 3

Aucun fonctionnaire, ni autre salarié d’une collectivité publique territoriale ou hospitalière ne peut prétendre à une rémunération effective supérieure au plafond national fixé chaque année par spécialité ou type d’emploi dans la loi de finances.

Article 4

Les primes attachés à un emploi public ne peuvent jamais excéder les deux tiers du traitement indiciaire de référence ou du traitement de base hors prime pour cet emploi.

Article 5

Les rémunérations visées s’entendent toutes primes, indemnités et autres accessoires compris, à l’exclusion des défraiements qui font l’objet de factures ou autres justificatifs produits en bonne et due forme.

Article 6

Chaque année à l’occasion de la présentation du projet de loi de Finances pour l’année suivante, la Cour des comptes établit une liste nominative des 1 000 emplois non électifs les mieux payés de la République classés par ordre décroissant avec l’identification de leurs titulaires, de leurs fonctions et de leur employeur, l’indication des rémunérations en cause -à la fois pour l’année passée et la précédente- et du pourcentage d’évolution résultant. Cette liste annuelle et certifiée par la Cour sera annexée au « Rapport sur l’état de la fonction publique et les rémunérations ».

Il est certain que ces propositions feront grincer quelques dents à l’intérieur de la haute fonction publique, qui objecte usuellement qu’une rémunération élevée est nécessaire pour garantir la compétence et l’indépendance d’un fonctionnaire qui a le plus souvent pouvoir de décision à des niveaux élevés. On n’épiloguera pas sur cette approche finalement assez mercantile, mais on sait que l’histoire abonde d’exemples qui démontrent que les gens les mieux payés ne sont pas forcément les plus intègres, ni les plus occupés, alors que des tas d’incorruptibles privilégient pour la plupart la vertu par rapport au niveau de leurs appointements et parfois même -pour les lanceurs d’alertes- à leur carrière (cf. le prix élevé de la vérité tout particulièrement chez les militaires, tant sous l’actuelle Présidence pour le Général d’Armée De Villiers que sous la précédente pour le Général de Corps d’Armée Soubelet). En sens inverse, on signalera que la réitération des observations de la Cour des comptes quant à des indemnités substantielles illicitement perçues pendant plusieurs années par de très hauts fonctionnaires de Bercy fait douter pour certains hiérarques bien en poste de leur désintéressement, de leur parfaite intégrité, comme de leur dévouement à la chose publique. On objectera également qu’on trouve dans le privé des gens ayant des rémunérations très inférieures et qui, en ne percevant que leur dû, parviennent à remplir parfaitement des missions comparables en toute compétence, en toute indépendance, avec une parfaite intégrité et en plus à la satisfaction générale. Mieux encore, il se trouve que ces salariés sont soumis pour la conservation de leur emploi et sur toute leur carrière à un challenge quotidien, auquel échappent la plupart des hauts fonctionnaires bénéficiant des plus hautes rémunérations (cf. par exemple la scandaleuse et récente nomination de l’ancienne directrice de l’INA après sa condamnation pour frais de taxis abusifs, alors qu’elle disposait d’un véhicule de fonction) ou occupant des fonctions éminentes (cf. la récente accession aux fonctions d’avocat général référendaire à la Cour de Cassation du juge personnellement impliqué et « blâmé » dans l’épouvantable scandale judiciaire d’Outreau!).

En réalité, on comprend très bien pourquoi la haute fonction publique est arc-boutée contre toute politique de maîtrise et de réduction de la dépense publique : elle en vit et elle en vit le plus souvent très bien, la discrétion de chacun assurant la sécurité de tous. Dés lors toute recherche d’économie véritable par le pouvoir politique est immédiatement ressentie comme un crime de lèse-majesté par une classe de privilégiés qui, depuis des décennies, tire de la dépense l’essentiel de sa puissance et de ses privilèges. Force est de constater en outre que cette caste a une fâcheuse tendance à considérer l’intérêt de ses propres finances et de ses propres parcours avant celui du bien commun et des finances publiques dont elle a pourtant directement ou indirectement la charge. Raison de plus :

– pour remettre de l’ordre dans les rémunérations publiques où priment l’incohérence, les passe-droits et les privilèges d’un autre âge (cf. aussi parmi les abus les plus criants que l’IREF a déjà dénoncés, les salaires et indemnités affolants de certains personnels des Assemblées parlementaires),

– pour réviser de fond en comble une grille et des échelles de salaires qui ne veulent plus dire grand chose,

– et enfin de manière plus générale pour porter dans la dépense publique le fer là où se trouve le mal,

Plutôt que de passer et repasser systématiquement le rabot de l’injustice sur les endroits de moindre résistance ou supposés tels (les retraités, les familles, les automobilistes par exemple). Surtout quand on découvre un beau jour dans les rues de France, comble de la surprise, que malgré leur grande patience, de nombreux citoyens ne sont pas du tout prêts à accepter indéfiniment n’importe quoi d’une oligarchie vorace, plus attentive à ses avantages qu’aux réalités et aux intérêts du pays.

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9 commentaires

AVG 5 février 2019 - 10:08

salaires indécents dans le secteur public
Deux poids deux mesures : sous prétexte de faire entrer de l'argent dans ses caisses, l'état taxe au delà du raisonnable "des riches" qui fuient sous des cieux plus accueillants, privant notre pays d'une consommation dont nous aurions bien besoin.
D'un autre côté il distribue "en douce" des primes et avantages royaux financés par nos impôts et taxes, à une poignée de fonctionnaires INAMOVIBLES même si leur utilité est contestable. Tout cela dans l'opacité la plus totale. Vous avez raison, il y a là de quoi réaliser de substantielles économies. d'argent.

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impertinent 5 février 2019 - 11:44

et les barèmes des conventions collectives ????
vous avez raison de critiquer les barèmes de la fonction publique qui n'ont plus aucun sens. Mais, n'oubliez pas que ceux qui figurent dans les conventions collectives n'en ont pas plus !

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Atlante 13 5 février 2019 - 7:50

Fonction publique et "petits" avantages
Une proposition supplémentaire a ajouter à votre liste :
Article 7,
Aucun fonctionnaire, ni autre salarié d’un Ministère ou d’une instance rattachée à ce Ministère ne peut prétendre se présenter à une fonction élective sans avoir auparavant démissionné de son statut de façon irrévocable.

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valhoven 6 février 2019 - 8:00 Répondre
Thierry BENNE 7 février 2019 - 7:13

RÉPONSE@VALHOVEN

Il est agréable d'avoir des lecteurs qui enrichissent un article de leur propre expérience et de leur propre savoir. Un grand merci à vous.

La référence obligeamment fournie nous renvoie à La Tribune du 19 septembre 2012. Elle nous apprend qu' à partir d'une norme Bolkenende un ménage courageux a été entrepris aux Pays-Bas vis-à-vis des excès de certaines rémunérations publiques dont 2 615 furent ramenées à un plafond ne pouvant excéder de plus de 30% la rémunération du Premier Ministre.
Mieux encore, la diète fut étendue aux médias publics et même aux banquiers dont les bonus ont été sagement limités à un maximum de 20% de leur salaire annuel fixe, cependant que les parachutes dorés ne s'ouvriront plus au delà de 75 000 euros.

De quoi donner bien des idées à notre Président qui, 20 mois après son élection ne sait toujours visiblement pas comment réduire la dépense publique, autrement qu'en tapant à coups redoublés sur les retraites pour épargner soigneusement la Caste toute puissante de la haute fonction publique, qui évite soigneusement la lumière.

Merci encore et bien à vous

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Thierry BENNE 8 février 2019 - 6:47

RÉPONSE @ VALHOVEN

Il est toujours agréable de voir un lecteur enrichir un article de sa propre expérience et de son savoir. Merci donc pour cette référence pertinente qui nous apprend qu'aux Pays-Bas une norme Balkenende a permis de mettre au pas certaines rémunérations publiques excessives(plus de 2000 quand même!) en les plafonnant à 130% du salaire du Premier ministre. Et cette démarche vertueuse a été étendue à la plupart des dirigeants et présentateurs des médias publics. Les banquiers qui s'arrangent d'habitude pour échapper à toute contrainte ont vu leur bonus plafonné à 20% de leur salaire annuel fixe. Quant aux parachutes dorés, ils ne s'ouvrent plus au delà de 75 000 euros dans le public comme dans le privé.

Cet exemple néerlandais a le mérite de montrer qu'on peut parfaitement, même dans un pays riche, imposer dans le secteur public une modération de bon aloi, car ce qui doit inspirer ceux qui font le choix du service public , ce n'est pas comme chez nous la course aux primes ou aux planques les mieux payées, c'est un sens très élevé de l'intérêt général qui interdit de rançonner indûment le contribuable. Bref une volonté claire de servir l'intérêt général plutôt que de s'en servir.

Une culture qui malheureusement depuis des décennies n'est plus la nôtre dans trop de secteurs dont les plus élevés, maintenant que les grilles de salaires valent plus par leurs exceptions que par leur application.Pourtant il y a encore chez nous des gens qui , dans le privé, comme dans le public, sont capables d'exercer avec succès de très hautes fonctions sans considérer qu'ils doivent en profiter pour exiger des rémunérations exorbitantes. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'actuellement, fors leur conscience, rien ou presque ne les y encourage et c'est bien dommage.

Merci encore pour votre participation. Cordialement: Th.B

Répondre
Thierry BENNE 8 février 2019 - 6:49

RÉPONSE @ VALHOVEN

Il est toujours agréable de voir un lecteur enrichir un article de sa propre expérience et de son savoir. Merci donc pour cette référence pertinente qui nous apprend qu'aux Pays-Bas une norme Balkenende a permis de mettre au pas certaines rémunérations publiques excessives(plus de 2000 quand même!) en les plafonnant à 130% du salaire du Premier ministre. Et cette démarche vertueuse a été étendue à la plupart des dirigeants et présentateurs des médias publics. Les banquiers qui s'arrangent d'habitude pour échapper à toute contrainte ont vu leur bonus plafonné à 20% de leur salaire annuel fixe. Quant aux parachutes dorés, ils ne s'ouvrent plus au delà de 75 000 euros dans le public comme dans le privé.

Cet exemple néerlandais a le mérite de montrer qu'on peut parfaitement, même dans un pays riche, imposer dans le secteur public une modération de bon aloi, car ce qui doit inspirer ceux qui font le choix du service public , ce n'est pas comme chez nous la course aux primes ou aux planques les mieux payées, c'est un sens très élevé de l'intérêt général qui interdit de rançonner indûment le contribuable. Bref une volonté claire de servir l'intérêt général plutôt que de s'en servir.

Une culture qui malheureusement depuis des décennies n'est plus la nôtre dans trop de secteurs dont les plus élevés, maintenant que les grilles de salaires valent plus par leurs exceptions que par leur application.Pourtant il y a encore chez nous des gens qui , dans le privé, comme dans le public, sont capables d'exercer avec succès de très hautes fonctions sans considérer qu'ils doivent en profiter pour exiger des rémunérations exorbitantes. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'actuellement, fors leur conscience, rien ou presque ne les y encourage et c'est bien dommage.

Merci encore pour votre participation. Cordialement: Th.B

Répondre
Thierry BENNE 8 février 2019 - 6:50

RÉPONSE @ VALHOVEN

Il est toujours agréable de voir un lecteur enrichir un article de sa propre expérience et de son savoir. Merci donc pour cette référence pertinente qui nous apprend qu'aux Pays-Bas une norme Balkenende a permis de mettre au pas certaines rémunérations publiques excessives(plus de 2000 quand même!) en les plafonnant à 130% du salaire du Premier ministre. Et cette démarche vertueuse a été étendue à la plupart des dirigeants et présentateurs des médias publics. Les banquiers qui s'arrangent d'habitude pour échapper à toute contrainte ont vu leur bonus plafonné à 20% de leur salaire annuel fixe. Quant aux parachutes dorés, ils ne s'ouvrent plus au delà de 75 000 euros dans le public comme dans le privé.

Cet exemple néerlandais a le mérite de montrer qu'on peut parfaitement, même dans un pays riche, imposer dans le secteur public une modération de bon aloi, car ce qui doit inspirer ceux qui font le choix du service public , ce n'est pas comme chez nous la course aux primes ou aux planques les mieux payées, c'est un sens très élevé de l'intérêt général qui interdit de rançonner indûment le contribuable. Bref une volonté claire de servir l'intérêt général plutôt que de s'en servir.

Une culture qui malheureusement depuis des décennies n'est plus la nôtre dans trop de secteurs dont les plus élevés, maintenant que les grilles de salaires valent plus par leurs exceptions que par leur application.Pourtant il y a encore chez nous des gens qui , dans le privé, comme dans le public, sont capables d'exercer avec succès de très hautes fonctions sans considérer qu'ils doivent en profiter pour exiger des rémunérations exorbitantes. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'actuellement, fors leur conscience, rien ou presque ne les y encourage et c'est bien dommage.

Merci encore pour votre participation. Cordialement: Th.B

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la Mouchette 6 février 2019 - 2:57

les pilleurs de la République
Non seulement ces hauts fonctionnaires de Bercy se prennent des salaires indécents superieur à leur ministre de tutelle ,décide en plus des primes de fin d'années fabuleuses ,mais la cerise sur le gâteaux profite de leur poste pour détourner des fonds de certains contribuables à leurs profits qui ont fait l'objet de contrôles fiscales via paradis fiscaux .certains dossiers sont revenus dans le droit chemin pour ceux qui ne se sont pas laissé faire !la moitié de ces gens la sont à virés sans indemnitées ils se sont largement payé sur le dos des contribuables avant .

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