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Quatre vérités sur les travailleurs détachés

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Loin d’être une victoire, la récente décision concernant la directive de 1996 sur le travail détaché n’a pas essentiellement changé le système comme le souhaitait la France. Les transformations ont été minimes et ne vont pas affecter, au moins à court terme, le travail détaché. Ce qu’il faudrait c’est une réforme en profondeur du marché du travail français et de l’Etat.

Beaucoup de bruit pour rien

Ce qui a été surtout modifié par les ministres du Travail européens concerne la durée du détachement car un salarié ne pourra être détaché que pendant 12 mois au maximum sur une mission (24 mois auparavant). Sachant que la durée moyenne d’une mission est de 4 mois et que ce plafond de 12 mois pourra être relevé de 6 mois à la demande du pays d’accueil, les conséquences seront insignifiantes. Par ailleurs, malgré les demandes de la France, les transporteurs routiers ne sont pas concernés par le compromis européen.

La réalité des statistiques sur les travailleurs détachés

Les travailleurs détachés ne représentent que 0.7 % de la main d’œuvre européenne, voire 0.2 % en termes d’emplois à plein temps (source Eurostat). En 2015, on en comptait 2,05 millions en Europe, dont 35.9 % dans le secteur de la construction. Environ 50 % (même 80 % dans certains cas) de ces travailleurs proviennent des pays voisins. L’Allemagne accueille (officiellement) 460.000 travailleurs détachés et la France environ 180.000, trois fois moins. En France, les pays d’origine sont : la Pologne (17 %), le Portugal (16 %), l’Espagne (15 %), la Belgique (13.2%) et l’Allemagne (12%), ce qui montre une certaine diversité, loin des données caricaturales véhiculées par les politiques. Les secteurs concernés sont surtout le BTP (39.6 %) et l’Industrie et les services (16.5 %). Mais notre pays envoie aussi 140 000 travailleurs dans hors des frontières, ce qui en fait le troisième pays européen en nombre de ressortissants travaillant à l’étranger.

Une hypocrisie politique

Lors des dernières élections présidentielles, tous les politiques se sont prononcés contre cette directive, accusant les autres pays européens de « dumping social ». Il s’agit là d’une véritable astuce de leur part afin de ne pas véritablement réformer le marché du travail français. Paradoxalement, la plupart des politiques parlent d’Europe à longueur de journée et en réalité ne cessent de la critiquer en la prenant pour bouc émissaire. Ils oublient qu’à la base du traité de Rome de 1957 se trouvait la libre circulation des capitaux, des biens et des personnes. Un principe inaliénable. Le cirque autour des travailleurs détachés en rappelle un autre concernant les footballeurs et le fameux arrêté Bosman de 1995. A l’époque on a voulu interdire – ou limiter drastiquement cette pratique – aux clubs européens d’acheter des joueurs étrangers. Résultat ? Après de nombreuses rencontres « au sommet », les footballeurs sont aujourd’hui considérés comme libres de jouer dans le club de leur choix.

Réformer le marché du travail et le « dumping de l’Etat »

Si un chef d’entreprise français doit payer pratiquement 100 % de charges sur un salaire net, son équivalent slovaque ou roumain en paye 50 % de moins. Déjà, les différences des cotisations patronales sur les salaires entre la France et l’Allemagne dépassent 20 points ! Le SMIC français – qui s’applique d’ailleurs aux travailleurs détachés – représente 63 % du salaire médian contre 50 % en Allemagne. Il faudrait donc baisser les charges et les cotisations en France, réformer en profondeur le Code du travail pour devenir compétitifs au niveau européen. Vanter notre modèle social qui repose sur le chômage de masse relève du mépris. Comment peut-on vouloir imposer aux autres un système qui affiche un taux de chômage à 9.8 % (plus de deux fois plus élevé qu’en Allemagne) et même 24 % pour ce qui est des jeunes (4 fois plus élevé qu’en Allemagne !) ?

Ce « combat » contre les autres pays européens est donc un véritable « cache-sexe » pour ne pas réformer. Il serait sans doute préférable de supprimer d’abord ces 40 000 fonctionnaires détachés que sont les fonctionnaires-syndicalistes payés avec l’argent des contribuables par leur administration d’origine sans qu’ils y travaillent. Et de remédier à la situation des 200 000 enseignants environ qui, selon la Cour des comptes, seraient sans affectation tout en continuant à être payés ! Et de vérifer les charges de la SNCF qui emploie 570 personnes dans son département communication alors qu’elle reçoit 12 Mds d’euros de subventions publiques par an ! C’est ce qu’on pourrait appeler le « dumping étatiste ».

Attention : les pays de l’Est s’enrichissent !

Le Brexit, les dernières élections en Allemagne, en Autriche ou en République tchèque, les événements en Catalogne, dévoilent des peuples mécontents envers une Europe bureaucratique, réglementaire et immigrationniste. Ce sont des signaux très forts à l’adresse de Bruxelles qui devrait comprendre les mutations idéologiques d’aujourd’hui. Ce n’est pas en entravant le travail détaché que les technocrates régleront les situations mais en créant les conditions d’une concurrence saine. Dans les années 1990, on parlait surtout du « dumping social des Chinois ». Aujourd’hui, les touristes chinois envahissent l’Europe et l’on estime que plus de 300 millions d’entre eux ont le niveau de vie de la classe moyenne européenne. La croissance économique dans les pays de l’Est de l’Europe est inévitable et il faut l’encourager, non pas en réglementant, mais en libéralisant. Le tableau ci-dessous montre l’évolution du salaire moyen entre 2014 et 2017 dans quelques pays fournisseurs de travailleurs détachés. La hausse est impressionnante et apporte la preuve d’un enrichissement inexorable de ces pays.

Evolution du salaire moyen (2014-2017)
POLOGNE 752 euros + 9 %
ROUMANIE 515 euros + 22%
BULGARIE 406 euros + 17 %
Eurostat (2017)

Enfin, réglementer encore plus le système des travailleurs détachés ne fera que renforcer le travail au noir et poussera des entreprises à délocaliser. Vouloir s’attaquer au « dumping social » c’est fausser encore plus le marché. Les politiques le comprendront-ils un jour ?

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1 commenter

terrancle 12 novembre 2017 - 10:13

charges sociales
Il faut absolument supprimer les charges sur salaires et remplacer par la TVA sociale ainsi les entreprises emploieraient moins de travailleurs détachés et il y aurait moins de chômage en France

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