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A quoi servent les dividendes

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Les dividendes, par ces temps de crise, passent un mauvais quart d’heure. Or, ils sont liés à la bonne santé des entreprises, à l’innovation et à l’investissement. Pour faire les investissements il faut de l’argent et pour cela il faut rémunérer ceux qui apportent et versent cet argent. C’est ce qui s’appelle un dividende.

Le groupe Total a annoncé que malgré la crise sanitaire et la forte chute du prix du pétrole qu’elle a engendrée puisque les gens utilisent beaucoup moins les moyens de transport, il règlera néanmoins à ses 400.000 actionnaires le dividende qu’il leur a promis. Pourtant des pressions sont venues du gouvernement et du mouvement anti-dividendes pour ne pas les verser ou pour en différer le versement. Heureusement Total ne s’est pas laissée impressionner. Son indépendance à l’égard de l’Etat (contrairement à Renault par exemple) fait que l’entreprise n’a pas besoin de lui demander des aides et ainsi ne ponctionnera rien sur les finances publiques. Payer le dividende, c’est tenir ses engagements et conforter les actionnaires dans leur confiance.

Les dividendes sont les futurs investissements

Face à la baisse du prix du baril, Total a réduit ses dépenses de plus de 300%. Le pétrolier a également refusé la résolution « climat » proposée par certains investisseurs (Climate Action 100 +) et qui visait à rendre le groupe responsable des émissions de CO2 de ses clients. Les raisons du refus de cette aberration juridique ont été expliquées par Mr Pouyanné, le PDG, dans un entretien avec le journal Le Revenu. Ainsi Total n’a pas cédé à la doxa. Grâce à ses sages comportements, l’action en bourse, qui avait évidemment chuté, commence à remonter. Certains se demandent peut-être si cet enrichissement des actionnaires est vraiment opportun à l’heure actuelle alors que tout le monde souffre. N’y aurait-il pas de meilleures priorités ?

Que font les entreprises qui versent des dividendes ? Autrefois on a critiqué Michelin pour avoir fait des licenciements alors que ses bénéfices étaient au plus haut. Certaines mauvaises langues disaient même que les actions Michelin montaient à cause de ces licenciements « boursiers », signe d’une gestion prudente visant à réduire les dépenses. C’est que la logique des entreprises n’est pas celle de l’Etat souvent démagogique (maintenir des emplois ou des sites à perte et aller tout droit à la faillite, là c’est tous les salariés qui perdent leur emploi et non pas seulement quelques-uns). La logique de Michelin reposait sur l’innovation et supposait de réduire les frais pour se concentrer sur l’essentiel : rester le numéro un du pneu dans le monde grâce à ses procédés de fabrication. Actuellement on doit porter des masques que l’on jette au bout de 4 heures d’utilisation.

Les ingénieurs de Michelin en un temps très rapide ont mis au point un masque réutilisable plus de 100 fois grâce à 5 filtres lavables et interchangeables. D’autres comme une filiale de l’Air liquide, vont fabriquer des respirateurs artificiels pour les hôpitaux publics. D’autres encore, spécialistes de parfums comme l’Oréal, Guerlain, Givenchy ou du luxe comme Louis Vuitton, vont mettre au point un gel hydroalcoolique à distribuer en masse. Les exemples sont multiples de ce que l’on peut faire grâce aux investissements. La formule d’Helmut Schmidt est célèbre : « Les investissements d’aujourd’hui sont les profits de demain et les salaires d’après-demain. » Or pour faire ces investissements il faut de l’argent et pour cela il faut rémunérer ceux qui apportent et versent cet argent. C’est ce qui s’appelle un dividende.

Pour les produits, il faut un marché pour les vendre

Donnons une illustration encore plus caractéristique de la lourdeur des investissements nécessaires. La CMA CGM est aujourd’hui un des premiers transporteurs maritimes du monde. A quoi cette entreprise doit-elle son succès après la privatisation de la CGM dans les années 90 ? A une chose toute simple : tisser un réseau mondial de lignes maritimes avec d’énormes porte-conteneurs faisant presque le tour du monde et de plus petits navires appelés feeders sur lesquels les gros transbordaient et qui desservaient des zones régionales comme le golfe persique ou le sud-est asiatique. Ce fut l’idée de Jacques Saadé. Il suffisait d’y penser mais il fut le seul à l’organiser de façon visionnaire et systématique. Cette idée supposait de faire construire d’énormes navires dans des chantiers navals et à cet effet d’injecter de substantielles sommes dans cette construction. Si les investisseurs n’avaient pas perçu de dividendes sur les fonds qu’ils apportaient, auraient-ils investi ? Et la CMA CGM aurait-elle connu le succès qu’elle a connu ?

Les Chinois ont découvert, plusieurs siècles avant Gutenberg, l’imprimerie et la poudre mais ils n’en ont rien fait. Pourquoi ? Parce qu’ils n’avaient pas de marché sur lequel vendre des livres (ou de la poudre) et d’exploitants susceptibles de commercialiser ces inventions après avoir trouvé ou levé comme on dit, des fonds. Si l’inventeur est aussi un exploitant c’est merveilleux. Mais si, comme souvent, l’inventeur est un professeur Tournesol qui n’a pas le sens des affaires ou du commerce, il lui en faut un. Ce personnage s’appelle le capitaliste dont la mission est de trouver et d’investir des fonds dans l’entreprise. Pour les trouver, il faut entre-autres des dividendes. C’est à cela qu’ils servent. Tel est le trio indispensable : un inventeur, plus un exploitant, plus des investisseurs.

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