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Loi sur la transition énergétique : la France se tire une balle dans le pied

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La transition énergétique vise à modifier nos comportements pour les rendre plus respectueux de l’environnement. Outre la future interdiction des rejets de sacs plastiques et de vaisselles jetables, à l’horizon 2020, qui relève plus de la démagogie que d’une politique efficace améliorant les performances énergétiques du pays, le projet de loi relatif à « la transition énergétique pour la croissance verte » représente d’une manière générale un nouveau boulet pour l’économie française.

Des objectifs contradictoires

Tout d’abord, il est – inquiétant que le Parlement n’ait disposé que de 30 heures pour débattre de cette loi ambitieuse ; qui couvre elle-même des thèmes aussi divers que l’isolation des bâtiments, la pollution de l’air et la propreté des transports, le développement des énergies renouvelables, la gestion des déchets, ou la sûreté nucléaire. Considérant le volume du texte, il est difficile de passer en revue de manière exhaustive l’intégralité de la loi. Pourtant dès les premiers articles, on se rend compte que cette loi aura un impact majeur, dans la mesure où tous les décrets d’application sur le coût de l’énergie en France seront rapidement publiés.

Ainsi modifié, le code de l’énergie dispose désormais que la politique énergétique :

– favorise, grâce à la mobilisation de toutes les filières industrielles, notamment celles de la croissance verte, l’émergence d’une économie compétitive et riche en emplois, à la fois sobre et efficace en énergie et en consommation de ressources et de carbone ;
– assure la sécurité d’approvisionnement et réduit la dépendance aux importations ;
– maintient un prix de l’énergie compétitif et attractif sur le plan international, tandis qu’elle permet de maîtriser les dépenses en énergie des consommateurs ; garantit la cohésion sociale et territoriale, en assurant un droit d’accès de tous à l’énergie sans coût excessif pour les ressources des ménages ; lutte contre la précarité énergétique ».

A trop vouloir en faire, on aboutit à un texte dont les objectifs sont contradictoires. Comment, en effet, maintenir le prix de l’énergie attractif, en réduisant d’un quart, d’ici à 2025, la part du nucléaire dans l’offre énergétique (de 75 à 50 %), par la substitution des énergies renouvelables ?

L’Allemagne a choisi cette voie, et l’on en connaît les lourdes conséquences sur son économie et sur l’environnement, avec la réouverture des centrales thermiques au charbon depuis quelques années.

Aujourd’hui, le montant des subventions aux énergies renouvelables est égal aux coûts de production de l’électricité, soit environ 20 milliards d’euros (Md€) ! L’étude d’impact réalisée par le gouvernement prévoit la multiplication par 6,5 de la consommation énergétique provenant de l’éolien et de l’hydrolien (mot inconnu hydrologie, hydrolithe ?) et par près de 10 celle du photovoltaïque d’ici 2030.

Cela suffira-t-il à compenser la baisse du nucléaire ? Comme le rappelait le député Julien Aubert lors du débat à l’Assemblée nationale, « Il se trouve que le taux de disponibilité des centrales nucléaires est bien plus élevé que celui du photovoltaïque ou de l’éolien. L’Union française de l’électricité a calculé que pour remplacer 20 gigawatts d’énergie nucléaire, produisant 140 térawatts-heure d’électricité, il faut 35 gigawatts d’énergie éolienne ou 70 gigawatts de photovoltaïque. Soit 20 000 éoliennes ou encore 657 km2 de panneaux photovoltaïques, soit 70 % des toits disponibles ».

D’autant que l’on ne sait pas trop comment tout ça sera financé… Selon l’Ademe, il faudrait mobiliser 10 à 30 Md€ par an pour financer la transition énergétique selon les différents objectifs retenus. A cet effet, le projet de loi prévoit de « procéder à un élargissement progressif de la part carbone dans la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques et dans la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel, dans la perspective d’une division par quatre des gaz à effet de serre ».

Depuis 2001, le rendement de ces deux taxes (TICPE et TICGN) est stable : entre 23,5 et 25 Md€, dont les variations dépendraient davantage – de l’activité économique et des cours des matières premières, type pétrole, que d’une modulation des comportements économiques, due à la composante environnementale de cette taxe. Pour le moment, ses recettes sont redistribuées entre les départements, les régions et l’Etat et on voit mal comment la part carbone pourrait être élargie, à moins d’en envisager l’augmentation.

Impact sur l’emploi : l’illusion de la croissance verte

Si l’impact sur l’emploi et sur le PIB semble positif, il dépend en grande partie du modèle utilisé, dont les paramètres varient en fonction des hypothèses retenues. C’est donc à juste titre que Coe-Rexecode conclut que « cette étude s’avère insuffisamment étayée. Elle repose en effet sur l’utilisation d’un seul modèle macroéconomique, le modèle néo-keynésien ThreeMe, peu adapté à l’évaluation d’effets à long terme ».

En réalité, l’impact serait différent selon le modèle utilisé et les paramétrages économétriques. Par exemple, le comité Trajectoire du Conseil d’analyse économique utilise un autre modèle, dans lequel, selon les hypothèses retenues, l’impact sur le PIB varie entre -7 % et +13,4 %. C’est aussi la remarque de la DG Trésor, qui prévoit des effets négatifs sur l’emploi si l’on porte la part des énergies renouvelables à 23 % d’ici 2020, comme c’est le cas du projet de loi.

Autrement dit, il aurait fallu que l’étude d’impact comparât plusieurs modèles, afin de mieux cerner les effets à long terme et à court terme, comme ceux du progrès technique, de la demande, ou autres, dans la mesure où ceux-ci varient en fonction des hypothèses retenues.

Par ailleurs, les hypothèses d’inflation, de croissance du PIB, de taux de chômage, ou encore de déficit public, ne sont pas précisées ; ce qui rend approximatifs les chiffres avancés par cette étude d’impact. Même en supposant que le modèle utilisé soit celui qui prévoit le mieux les effets de la transition énergétique sur le PIB et l’emploi, l’impact sur cette dernière variable reste très limitée.

En effet, le modèle retient une hypothèse de croissance de la population de 0,36 % par an. Cette croissance de la population, quand elle se retrouvera sur le marché de l’emploi, devra être intégrée à celui-ci. En retenant cette hypothèse de croissance, et en la comparant avec l’augmentation moyenne de la population active depuis 1976, la population active devrait croître entre 1,8 et 3,7 millions. Les 220 000 emplois, potentiellement créés d’ici à 2030 par ce projet de loi, ne représenteraient que 6 à 11 % (cf. graphique) des nouveaux demandeurs d’emploi.

La croissance verte n’est pas pour demain !

Comparaison croissance de la population active et impact emploi

Comparaison croissance de la population active et impact emploi

Par ailleurs, cette prédiction semble particulièrement optimiste, car outre le fait d’avoir un effet positif sur l’emploi, la loi compenserait la perte des emplois dans la filière nucléaire, qui contribue à 400 000 emplois en France. Des emplois qui sont souvent à haute valeur ajoutée. Une étude de l’Insee sur les sites du Tricastin et de Marcoule montre que le revenu net imposable moyen dans la zone d’impact est supérieur à la moyenne des quatre départements alentour et que le salaire horaire y est également plus élevé. Autrement dit, il ne faudrait pas que la loi sur la transition énergétique ne vienne détruire de l’emploi qualifié pour le remplacer par des postes qui le sont beaucoup moins. Car outre le fait d’être un projet contradictoire dans ses objectifs, il viendrait détruire du pouvoir d’achat !

Comparaison croissance de la population active et impact emploi

Comparaison croissance de la population active et impact emploi

 

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8 commentaires

Montin 20 octobre 2014 - 8:56

Regardez aussi à long terme!
Cher "IREF",

La vision à court terme que vous dénoncez est vraie mais il faut aussi voir à long terme. Et le bon sens indique qu'on ne peut plus durablement asseoir l'économie sur les énergies fossiles dont la quantité est finie. Prôner une croissance (même verte) infinie avec des ressources finies est indéfendable. Cependant l'écologie "collectiviste" défendue par certains ne fonctionnera pas mieux que l'économie collectiviste n'a fonctionné. Il nous faut trouver un système alliant écologie et intérêt individuel et au début cela passe par quelques incitations et malheureusement quelques taxes. Il faut admettre que notre mode de consommation actuel conduira rapidement à un conflit mondial pour l'accès aux ressources. Je ne pense pas que c'est cela que vous voulez alors il faut accepter les efforts liés à la mise en place de la transition énergétique même si à court terme cela semble un poids supplémentaires sur notre économie qui de toute façon est sans avenir à long terme. OUI il faudra consommer moins même si vous ne voulez pas l'admettre.

Cordialement
Montin

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Lucas Léger 20 octobre 2014 - 11:45

Pas de vision de long-terme !
Cher Montin,

C'est précisément ce que nous regrettons, le manque de vision à long terme de cette loi. La fiscalité n'a pas qu'une incidence sur notre pouvoir d'achat, comme vous le rappelez très bien, mais aussi sur nos comportements. Or, la loi sur la transition énergétique se contredit dans ses objectifs. Il y a un consensus parmi les économistes pour la réussite d’une fiscalité verte. Cependant quatre conditions de réalisation au moins doivent être réunies :

> la taxe doit se faire à prélèvements obligatoires constants ;

> il doit y avoir une forte élasticité de la demande. Autrement dit, la demande sur un produit doit être inversement proportionnelle au taux de prélèvement qui lui est affecté. Si vous taxez l'essence, vous devez pouvoir être en mesure de proposer une alternative viable, par exemple avec un réseau de transports publics très développé ;

> il doit y avoir un effet de substitution possible afin de réorienter les consommations. Par exemple, le fret par voie ferroviaire ou fluviale doit pouvoir remplacer l’utilisation de camions, si l’activité de ces derniers est plus taxée que les précédents ;

> Enfin, il faut calculer les assiettes en fonction des externalités négatives liées aux dégradations de l’environnement.

Sur les modes de financement, cette loi est vide, c'est inquiétant.

Bien cordialement,
Lucas Léger

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guy raynal 20 octobre 2014 - 1:37

transition hydrogène
Bonjour,
Je suis épouvanté de constater que personne, ou presque, ne parle de l'hydrogène lorsqu'il s'agit de transition énergétique, alors que tous les scientifiques s'accordent pour dire que c'est l'énergie du futur et inépuisable.
Pourquoi ?
Parce que l'hydrogène est une énergie individuelle et quasi gratuite.
J'en ai plus qu'assez de tous ces savants spécialistes qui ne parlent que d'énergie collective soumise à toujours plus de taxes ou d'investissements coûteux, toujours à la charge des particuliers, afin de garnir les caisses des Etats.
La mise en oeuvre de l'hydrogène est simple, à la portée de tout le monde avec un minimum de précaution. Autrefois on apprenait ça en classe de troisième. C'est une énergie gratuite une fois acquis les moyens simples de le produire, propre et inépuisable.
Aujourd'hui, toutes les voitures devraient rouler à l'hydrogène, toutes les maisons devraient être éclairées et chauffées grâce à l'hydrogène et grâce à des piles individuelles.
Qu'on prenne exemple sur le Japon qui est le seul pays à miser sur cette énergie depuis Fukushima. En France, notre Etat obèse et budgétivore n'est pas près de nous en parler.
Développer une filière hydrogène en France nous permettrait de créer des centaines de milliers d'emplois efficaces et rentables, d'exporter notre production de piles et accessoires et d'améliorer l'état de la France.
Bien à vous

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Richard C. 24 octobre 2014 - 2:51

la guerre verte nous est déclarée
L'idéologie verte faschiste prône le renouvelable comme si tout était éternel. En fait, la transition énergétique consiste à lâcher la proie pour l'ombre, ignorant que le réchauffement climatique a commencé il y a dix mille ans, que la seine n'est plus un glacier et que tout le carbone se situait dans l'atmosphère avant de constituer les énergies fossiles"non renouvelables" qui se renouvellent encore maintenant.
En fait, il faut utiliser les ressources utiles à notre développement quand notre niveau technique le demande. Quand une société est riche, ses connaissances progressent, et sa culture aussi.
Si les hommes des cavernes avaient voté socialiste-vert, et ne plus extraire les silex au motif que nous en aurions plus en 2014, ils auraient été éliminés. Mais peut être est ce la raison pour laquelle Néanderthal a été supplante? 🙂
De même, nous avons, si nous ne le gaspillons pas, le temps et les moyens pour évoluer techniquement vers une civilation interplanétaire qui se moquera s'il reste de la houille ou du silex dans 200 ans.
Au lieu de se lamenter avec les incultes que le pays vert verdisse, (groëland qui redevient vert et fertile) sachons nous battre contre la superstition nuisible et refusons toute idéologie qui ne serait pas guidée par la raison. Quitte à expulser les mauvais éléments qui nous polluent: un bon capitaine fout par dessus bord ceux qui font des trous dans la coque, mille sabords!

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Astérix 26 octobre 2014 - 9:21

Toujours la même chose !
A chaque fois que l'état s'occupe de gérer, vous pouvez être certain que le contribuable paiera deux fois ce qu'il devrait payer. L'incapacité à gérer et les magouilles (subventions, corruptions),
c'est toujours nos compatriotes qui en font les frais par leurs impôts.

La croissance verte est une parfaite stupidité imaginée par nos technocrato-verdo-socialos avec ou sans jupon… (la perle rare étant, entre autres, cette pauvre Duflot qui a réussi le tour de force de plier le secteur immobilier).

Au lieu de favoriser la recherche privée pour développer les énergies de demain, l'on préfère créer des structures (comités de réflexion, haut commissariat à la verdure…etc ) et bien sur des taxes nouvelles…!

En un mot l'intelligence !!!!!?????

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BMD 7 novembre 2014 - 2:46

l'hydrogène, tarte à la crème écologique
L'hydrogène revient régulièrement dans les commentaires comme la solution à nos problèmes énergétiques. Aucun scientifique correctement informé ne peut prétendre cela. L'hydrogène n'existe à l'état libre qu'en quantités trop faibles pour être exploitables sur terre, et doit donc être fabriqué, à partir de gaz naturel actuellement, à partir d'eau par électrolyse un jour peut-être. Ce n'est donc pas une source possible d'énergie, mais peut être un vecteur d'énergie, à l'image de l'électricité. Sa fabrication et son utilisation entraînent donc des pertes d'énergie, et si on veut l'utiliser comme stockage, par exemple pour l'adaptation de la production d'électricités intermittentes à la consommation d'électricité, ces pertes sont énormes. Ce qui veut dire qu'il faut augmenter considérablement la capacité de production de ces électricités, et leur coût.
De même, s'il est fabriqué à partir de gaz naturel, son utilisation dans un véhicule est moins efficace et bien plus coûteux que l'utilisation directe du gaz naturel. S'il est fabriqué par électrolyse de l'eau, il est 3 fois moins efficace dans un véhicule à hydrogène que l'électricité utilisée pour le fabriquer qui serait utilisé dans un véhicule électrique.

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cLAUDIO 9 décembre 2014 - 10:20

réduction du nucléaire
passer de 75% à 50% de nucléaire en 2025 n'est pas réduire d'un quart, mais d'un tiers !!

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Raymond Joumard 5 avril 2016 - 11:23

Une loi qui contredit ses objectifs
Si, à partir de la situation actuelle, on applique les objectifs chiffrés de la loi (un simple tableau Excel suffit), on aboutit à un projet en complète contradiction avec les objectifs généraux : Impossibilité de garantir l'équilibre du réseau électrique par une énergie renouvelable aléatoire et utile à peine 10% du temps. En conséquence, obligation de développer les centrales thermiques à l'énergie fossile, charbon ou fioul. Croissance en flèche de la pollution et des émissions de gaz à effet de serre avec leurs effets désastreux sur la santé (déjà 40 000 morts). Dépendance énergétique accrue, alors que l'énergie nucléaire assure actuellement une indépendance de nombreux mois, qui peut être portée à 1000 ans en développant les surgénérateurs. Accroissement notable du coût de l'énergie, donc baisse du niveau de vie pour tous y compris les plus défavorisés. Perte de notre notoriété dans l'industrie nucléaire, alors que la pénurie de pétrole et de gaz va obliger le monde à trouver des substituts, d'où accroissement du chômage. Pour perfectionner le réseau français, il faudrait tout simplement développer le transport électrique, rechargeable en périodes creuses (le coût du combustible supplémentaire étant négligeable), moyennant des compteurs adaptés. Les fours solaires ne sont économiquement intéressants qu'en Espagne ou au Maroc et l'éolien pour les pays qui dépensent du carburant pour produire de l'électricité, mais pas en France.

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