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Démographie française :

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L’INSEE a publié le 19 janvier le bilan démographique 2015. Il donne d’intéressantes informations sur la population française. Mais les commentaires sont souvent dominés par la pensée « holiste », globalisante, oubliant que la responsabilité première dans ce domaine revient aux individus, et non à l’Etat. En revanche, l’Etat peut fausser le libre choix des individus.

Une France de 66,6 millions d’habitants

En matière démographique la collecte des informations est si complexe qu’il ne s’agit que d’estimations. C’est d’autant plus vrai que l’INSEE publie son bilan démographique moins de trois semaines après la fin de l’année civile. Il faut pratiquement 3 ans pour que l’INSEE qualifie ses estimations de définitives. Et si l’état civil donne des résultats assez fiables, les mouvements migratoires donnent lieu à des estimations beaucoup plus aléatoires, comme on l’observe en ce moment.

Sous ces réserves, la population française (résidant en France, sans compter les Français vivant à l’étranger et en comptant les étrangers vivant en France) est estimée au 1er janvier 2016 à 66 627 602 pour la France entière et à 64 513 242 pour la seule métropole. Si l’on s’en tient au seul territoire métropolitain, la population continue à progresser, avant tout sous l’effet du mouvement naturel (excès des naissances sur les décès) : en 2015, 762 000 naissances et 587 000 décès en métropole, soit un excédent de 175 000. A cela s’ajoute le solde migratoire (excès des entrées sur les sorties du territoire) que l’INSEE estime à 61 000, au même niveau que les deux années précédentes, chiffre surprenant, compte tenu des phénomènes migratoires auxquels l’actualité nous confronte.

Recul de l’espérance de vie et de la fécondité

Pour le seul mouvement naturel, l’excédent s’est réduit par rapport à l’année précédente, passant de 234 164 à 175 000. Cela s’explique par le recul de la natalité et la hausse de la mortalité. La hausse de la mortalité (40 000 décès de plus) s’accompagne d’une réduction de l’espérance de vie à la naissance, passant de 79,3 ans en 2014 à 79,0 en 2015 pour les hommes et de 85,4 à 85,1 pour les femmes, premier recul depuis 1969. L’INSEE, tout en indiquant sa « surprise », l’explique, au-delà de l’arrivée à un âge plus avancé, donc plus risqué, des générations nombreuses du baby-boom, par une épidémie de grippe plus grave et un vaccin plus inadapté, mais cela peut aussi interroger sur notre système de santé et son financement étatisé.

Les chiffres de l’INSEE donnent aussi des indications sur des évolutions sociologiques : l’âge moyen au premier mariage ne cesse d’augmenter, pour atteindre 30,9 ans pour les femmes et 32,6 pour les hommes (5 à 6 ans de plus que dans l’immédiat après-guerre). De même, l’âge moyen des mères à l’accouchement est de 30,5 ans, contre 29,7 dix ans plus tôt et 27,5 en 1985. Mais c’est la fécondité qui a été la plus commentée. L’indicateur conjoncturel de fécondité (ou nombre d’enfants par femme, en fait « somme des taux de fécondité par âge observés une année donnée ») a reculé en 2015, passant de 1,976 à 1,931 (et de 2,002 à 1,961 en incluant l’Outre-Mer).

Responsabilité des familles ou de l’État ?

Les commentaires soulignent soit le recul de la fécondité et le fait que ces chiffres soient en dessous du seuil de renouvellement des générations, soit le fait que la France reste à un niveau élevé par rapport à ses voisins européens et même « championne d’Europe de la fécondité ». Ces interprétations holistes sont dangereuses. Certes, « il n’est de richesses que d’hommes » (Jean Bodin), mais le capital humain n’est pas d’abord une question de quantité, mais de qualité et donc de la qualité de l’investissement dans ce capital (l’éducation). Mais cette lecture recouvre une conception globalisante, voire collectiviste, comme si on avait des enfants d’abord pour « défendre la patrie », les guerres étant destructrices d’hommes, ou comme si c’était « la France » qui avait des enfants.

Dans une société de libertés, la responsabilité exclusive en matière de natalité est celle des parents. Que la logique étatique soit malthusienne (comme longtemps en Chine avec la politique de l’enfant unique) ou nataliste comme dans d’autres Etats ne change rien à cette réalité : vouloir contrôler les décisions des familles en ce domaine est d’essence totalitaire. Le faire au nom de considérations économiques n’est pas plus acceptable : la question du financement des retraites, souvent avancée, n’existe qu’en raison du système par répartition, qui implique sans cesse de nouveaux entrants, comme dans les pyramides de Ponzi : un système à la Madoff ; or on n’a pas des enfants pour « payer les retraites » et un passage à la capitalisation règle la question démographique.

Libérer les familles de l’État pour leur rendre leurs responsabilités

Il en va de même pour les craintes malthusiennes, comme si la hausse de la population allait ipso-facto entrainer du chômage, et a contrario la baisse des naissances, puis de la population active, permettrait de résoudre le chômage : illusion holiste, car le chômage ne dépend d’abord ni de la natalité, ni de la population active, mais du fonctionnement du marché du travail et de sa flexibilité. L’histoire montre que des pays à la démographie dynamique peuvent avoir un faible chômage (comme les Etats-Unis) et d’autres à la démographie vieillissante (comme l’Allemagne) peuvent aussi avoir un faible chômage: qualité de l’éducation et réformes structurelles du marché du travail importent plus que l’évolution démographique.

Mais l’action de l’Etat n’est pas neutre. Comme en économie, où l‘Etat doit laisser faire entrepreneurs, épargnants et consommateurs, il doit, en matière démographique, garantir les libres choix des familles. Sinon, comme en économie, l’Etat intervient en faussant les choix des ménages, par l’Etat-Providence et le poids des prélèvements obligatoires, confisquant le fruit de leur travail, par le rabotage du quotient familial, alourdissant encore plus l’impôt sur les familles, et par l’impossibilité de choisir leur protection sociale (assurance-maladie, retraites,…). Cette privation de ressources et de liberté de choix impacte la natalité, mais aussi la santé et donc la mortalité. En matière démographique, comme ailleurs, la responsabilité ne peut être que décentralisée au niveau des personnes et des familles, et seuls des êtres libres peuvent être responsables.

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3 commentaires

Jacques Gautron 2 février 2016 - 8:36

Enfin une explication claire de la situation démografique
Bravo et merci Chère Professeur Naudet. Ce texte devrait faire l'objet d'une étude de la part de ceux qui prétendre à nous gouverner en 2017. C'est clair et concis.

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Polaris 2 février 2016 - 9:31

Capitalisation vs répartition, éternel débat de grands naïfs…
Cette absence totale de réflexion et de culture économique qui consiste à traiter invariablement le système de retraite par répartition de « pyramide de Ponzi » est navrante. Au niveau macroéconomique, quel que soit le mode de financement des retraites, les personnes âgées sont TOUJOURS à la charge des actifs. Les pensions (ou les rentes, les deux pouvant se combiner) des retraités sont TOUJOURS une ponction sur les revenus de ceux qui travaillent, que ce soit au travers des cotisations retraites ou via les loyers, les dividendes, les intérêts des prêts ou les coupons d’obligations payés par les entreprises et les actifs aux détenteurs de ces formes de capital – en majorité des retraités ou des fonds de pension, ce qui est par ailleurs normal : on possède plus d’actifs en fin de vie professionnelle qu’au début -. Toujours est-il que dans les deux cas – répartition et capitalisation -, les rentes versées aux retraités sont TOUJOURS ponctionnées sur les actifs. Macroéconomiquement, c’est la même charge. Et d’ailleurs, on voit très clairement que les difficultés rencontrées par les systèmes par répartition – elles sont connues : diminution du rapport nombre de cotisants / nombre de retraités, diminution des revenus des actifs – sont exactement les mêmes que celles auxquelles sont confrontés les systèmes par capitalisation : diminution drastique des rendements obligataires et de l’immobilier, baisse des marchés action et plus généralement la baisse de la croissance économique mondiale. De très nombreux fonds de pension nord-américains et nord-européens – anglais, néerlandais notamment – ont déjà très sérieusement réduits les pensions versées à leurs cotisants, et ce n’est que le début. En France, les rendements de la PREFON et des PERP diminuent fortement. Il y a simplement trop de retraités par rapport au nombre d’actifs et au taux de croissance de l’économie mondiale. TOUS les systèmes de pensions – répartition comme capitalisation – sont intrinsèquement des pyramides de Ponzi et vont voir leur rendement baisser de manière spectaculaire. Faire espérer le contraire est naïf, faux voire mensonger.

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serge G 9 septembre 2016 - 6:57

Je partage totalement votre analyse. Il faut préciser que le problème du système dit par répartition n'est pas une répartition, mais une rente imposée. Un système de répartition devrait réévaluer régulièrement la richesse créée pour la répartir .

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