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Le crépuscule du rêve européen

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Le président des Etats-Unis Donald Trump brandit la menace de sanctions économiques contre les pays qui, selon lui, créent des conditions commerciales déloyales à leur avantage en dévaluant artificiellement leur monnaie. Il vise principalement l’Allemagne, le Japon et la Chine. Il avance un argument intéressant concernant l’Allemagne. Les Etats-Unis soulignent que, en tant que membre de la zone euro, elle utilise une monnaie affaiblie par la cohabitation avec des économies européennes handicapées par d’énormes problèmes structurels. La généralisation négative du président Trump place l’Allemagne dans une position difficile et risque de précipiter encore un peu plus vite l’Europe vers la fin.

Diagnostic erroné

La monnaie commune était un fantastique projet pour renforcer les échanges commerciaux dans le marché intérieur européen. C’était une aide incontestablement bénéfique pour les affaires. Alors, pourquoi l’euro est-il maintenant remis en question ? Un argument couramment entendu est que, pour qu’une monnaie commune fonctionne correctement, il est nécessaire de mettre en place des politiques économiques et fiscales harmonisées. Avant l’Euro, les économies européennes les plus faibles pouvaient dévaluer leur monnaie afin de rester compétitives. Les membres de la zone euro ne disposent plus maintenant de cette solution. Cependant, c’est un point de vue superficiel et à courte-vue.

Le vrai problème de l’euro est que, depuis sa mise en œuvre, il a été utilisé comme un instrument politique. Des économies non préparées, comme celle de la Grèce, ont été invitées à rejoindre le club monétaire, sans respecter les critères d’admission. Dans le même temps, les régulations excessives du marché intérieur n’ont pas permis à ces économies d’accroître leur productivité.

En outre, et c’est le pire, le plafond imposé aux déficits budgétaires des gouvernements, fixé à 3% du PIB dans le traité de Maastricht, n’a pas été respecté. Les déficits publics et la gabegie dans la plupart des pays membres ont conduit à une accumulation de dettes toujours plus lourdes. L’Allemagne et la France ont montré le mauvais exemple en crevant ce plafond les premières.

La Banque centrale européenne (BCE) a rendu la situation encore plus dramatique en trahissant son obligation de neutralité politique, par l’adoption de mesures politiques, comme le rachat de dettes publiques, dans sa panoplie d’ajustement des taux monétaires. Alors que le devoir fondamental de la BCE était de protéger la valeur des monnaies.

Les achats illimités d’obligations souveraines de la part de la Banque centrale ont eu pour effet de repousser les réformes dont les pays de la zone euro avaient désespérément besoin.

La Banque nationale suisse éprouve de nouveau le plus grand mal à éviter que le franc suisse déjà surévalué ne monte trop face à l’euro.
Où en est-on actuellement ? Les politiques à courte-vue de ces dernières années ont créé une situation dans laquelle l’argument superficiel d’une politique d’harmonisation économique et fiscale rallie de plus en plus de suffrages. L’euro est maintenant estimé comme étant au-dessous de sa valeur en Allemagne, renforçant encore cette puissance exportatrice, mais au-dessus de sa valeur pour la plupart des pays d’Europe du sud, y compris en France.
La monnaie commune aurait pu être un facteur de croissance et de productivité pour les pays les plus défavorisés de la zone euro. Cette opportunité a été gâchée. A l’heure actuelle, malheureusement, celle-ci est en difficulté ; il peut être soutenu soit par un système de transfert direct des paiements, soit par un financement via le système Target de la BCE. Au final, l’une ou l’autre solution reviennent à allouer des subventions aux pays du sud de l’Europe, l’Allemagne étant le principal créditeur.

Le dilemme de la Suisse

Dans ce contexte, il est intéressant d’observer les monnaies des voisins de la zone européennes. La Banque nationale suisse, encore une fois, peine à empêcher que le franc suisse, déjà surévalué, n’augmente trop par rapport à l’euro. Au moment où la confiance du public en l’euro diminue, cette pression sur le franc suisse est devenue très forte. Le zloty polonais a également commencé à monter durant ces derniers mois par rapport à l’euro, même si cette hausse est légère. La couronne tchèque reste alignée sur l’euro, conformément à la ligne de la banque centrale du pays. Cette volonté d’aligner la couronne sur un euro faible pourrait se révéler coûteuse pour la Banque nationale de Prague. Mais on peut se demander si les banques centrales suisse et tchèque pourront tenir leur position.

La Suisse affronte une situation difficile. Une trop forte hausse du franc suisse par rapport à l’euro rendrait les exportations du pays hors de prix et pourrait aussi ruiner son industrie touristique. D’un autre côté, les interventions de la BNS pour soutenir l’euro alourdissent considérablement son bilan. Pire encore, ces interventions pourraient être maintenant considérées comme déloyales par les Etats-Unis, dans un contexte d’échanges commerciaux. N’oublions pas que leur but est d’affaiblir la monnaie pour favoriser les exportations.

Ce qui aurait probablement pour effet immédiat une hausse des tarifs d’importation pour les produits et services suisses aux USA.

La manière de gérer la crise, la non-observance des règles de la part de la BCE et les politiques fiscales irresponsables de beaucoup de gouvernements européens, tout cela crée une situation préjudiciable à tous les secteurs de l’économie et de la société, et pas seulement à l’intérieur de la zone euro.

Ce système va maintenant engendrer un mécontentement croissant envers l’euro dans sa propre zone, hantée par un malaise diffus et général.

Michael von Liechtenstein est membre du Comité Directeur de l’IREF et fondateur du think tank GIS (Geopolitical Intelligence Services) sur lequel a été publié la version anglaise de cet article

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