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Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu

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L’article de Jean-Philippe Delsol, administrateur de l’IREF, intitulé  » Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu  » a été publié par le site du quotidien Les Echos (3novembre). Lire l’article sur le site des Echos ou plus bas.

 

L’article de Jean-Philippe Delsol, administrateur de l’IREF, intitulé  » Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu  » a été publié par le site du quotidien Les Echos (3novembre). Lire l’article sur le site des Echos ou plus bas.

Ce texte est dans son rôle en évoquant la primauté du spirituel et de l’éthique et en demandant que les politiques soient au service de la personne. Mais il s’aventure au-delà, dans des terres étrangères au domaine religieux, stigmatisant le libéralisme économique en dépit de Jean Paul II qui en avait, avec mesure, rappelé les vertus dans Centesimus Annus (1991). Il requiert la recapitalisation des banques avec des fonds publics alors même que la banque malade est Dexia dont les capitaux sont déjà majoritairement publics et que tous se souviennent des déboires du Crédit Lyonnais au temps où il était nationalisé. Il prône pour les banques la séparation des activités « de crédit ordinaire et d’Investment Banking » alors que le Président Sarkozy en a relativisé à juste titre l’efficacité dans son interview du 27 octobre, les deux grandes banques n’ayant pas résisté à la crise de 2008 étant Lehman Brothers, pure banque d’investissement, et Northern Rock, pure banque de dépôt. Ce texte souhaite encore l’institution d’une taxe sur les transactions financières, sacrifiant à la mode malgré le désaveu donné par le professeur Tobin lui-même à l’utilisation de cette taxe comme panacée.

Ce texte voudrait élaborer un nouveau système monétaire international et des taux de change régulés par une « Banque centrale mondiale » au moment même où la crise de l’euro apparaît d’abord comme celle de la dichotomie entre une monnaie unique et des systèmes économiques et politiques indépendants. Pour y faire face, le Conseil pontifical envisage la perspective « d’une autorité publique à compétence universelle ». Mais très vite il en arrive à l’instauration d’un gouvernement mondial en oubliant la vieille distinction fondatrice entre Auctoritas et Potestas. Tandis que celle-ci relève de la légalité, de l’organisation sociale et politique, celle-là appartient à l’ordre naturel et en appelle à la légitimité.

L’Eglise s’abaisse en se faisant, au-delà de ses compétences, technicienne de l’économie et outrepasse là son ordre. Ce faisant elle contribue à créer la confusion entre les domaines du politique et du religieux qui est précisément ce qu’il faut craindre dans l’islam dont elle paraît ainsi ne plus vouloir se distinguer. Lorsque le président du CNT libyen annonce que la loi sera désormais la charia en Lybie, c’est cette réduction du politique au religieux qu’il édicte, intrinsèque au Coran et à l’Islam. Au-delà de la polygamie que d’ores et déjà semble-t-il le gouvernement libyen voudrait autoriser, c’est à la soumission commune des âmes et ces corps que cette nouvelle loi peut conduire. En Tunisie, la victoire d’Ennahda est inquiétante sur le long terme pour cette raison, plutôt que pour le simple fait que ses adhérentes se réunissent, voilées, séparément de ses adhérents.

La séparation du politique et du religieux est constitutive de la liberté en même temps qu’elle permet la démocratie. Quand il n’existe qu’un seul pouvoir, à la fois politique et religieux, il n’y a plus de refuge pour échapper à une loi en se soumettant à une autre. Lorsque la politique est dictée par la loi divine il ne saurait être question de la laisser entre les mains des hommes. Si le gouvernement était unique et mondial, il n’aurait plus de bornes. Lorsqu’il est multiple, il oblige au respect mutuel.

La pluralité des lieux de pouvoir a permis à l’Occident chrétien d’être le terreau de la démocratie, fondé sur la parole du Christ : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Certes cette séparation n’a pas été de soi, mais le combat du glaive et du goupillon a précisément permis de limiter chacun des pouvoirs qui se faisaient face et de favoriser l’expression de la diversité des hommes. Et lorsque le pape Grégoire VII contraint en janvier 1077 l’empereur Henri IV d’aller à Canossa, il cherche d’abord à rétablir l’équilibre des forces qui est le gage des libertés.

Le petit miracle que représente notre liberté de pensée, de parole et d’action, fondé en particulier sur cette distinction, est un bien trop rare pour que nous en reniions si facilement les sources. Veillons au contraire à préserver ce qui en fait la force. De grâce Messeigneurs, « rendez à César… »

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